C’est le coup de gueule d’Arnaud
Daguin sur l’élevage à la chaîne et pour rien de bon des cochons qui m’a lancé sur ce
rituel de l’abattage, cette fête du cochon des tartufes que nous sommes. Depuis
Laval, près de Quillan, avec Monsieur Reverdy, nous avons rayonné à Lavelanet
avec Madame Tricoire, à Sorgeat avec des chroniqueurs qui ont bien du mérite à
honorer la vie d’antan.
J’ai gardé aussi en mémoire le
sourire ravi d’un pépé de Nescus près La-Bastide-de-Sérou, encore en Ariège. Fin
août, 1977 peut-être. Avec sa femme : ils arrachent des pommes de terre, à
la charrue. Je me suis arrêté pour tirer le portrait de la vache, si coquette
avec son cache-yeux rouge-blanc-jaune comme ces rideaux de cotons noués, frangés,
montés sur les seuils de nos maisons vigneronnes, contre les mouches aussi, avec la chaleur.
Sur les bords de l’Arize, en bas
des reliefs (500 – 750 mètres), c’est déjà une lumière de fin d’été, estompée
même, en cette fin d’après-midi. Calme, immobile, prenant la pose, la vache me fixe,
pauvre touriste qui prend la photo. Nous échangeons quelques mots. Il est cordial,
enjoué, si content de rentrer ses pommes de terre : « C’est qu’on
élève le cochon ! Pas vrai mémé qu’on fait toujours le cochon ! ».
Il veut partager ce bonheur avec sa vieille plus loin, il veut qu’elle confirme ! Courbée,
toute à son travail, à décoller la terre sur les patates, elle se tourne à
peine mais hoche un visage tout rayonnant, en réponse à l’allégresse du vieux. Ils
sourient aux anges, ces deux, tels des enfants parce que le père Noël est passé !
Ils sourient aux jambons, aux saucissons pendus, au lard qui viendra si bien assabourer
(1) la bonne soupe aux choux de l’hiver !
Ce souvenir m’habite depuis ce
temps. J’ai d’abord ri parce que leur
malice m’a fait penser à ce conte de la vieille accrochée au petit vieux lui-même
arcbouté sur une betterave géante difficile à arracher. Avec les années, le
sentiment s’est fait plus profond. C’est beau, c’est grand, en effet, cela nous
dépasse, cet hymne à la vie, ce défi à la mort de deux êtres unis depuis si
longtemps, pleins d’allant tant qu’un nouveau jour voudra bien succéder à celui
qui s’efface.
Et je les vois toujours, ces deux, sortis d’une toile de Jean-François Millet avec, dans le moment crépusculaire,
Victor Hugo pour réciter combien « ils doivent croire à la fuite utile des
jours… », à la ronde des saisons. En musique de fond une joie qui demeure…
En partant du cochon, j'en arrive à me demander comment s’appelle cette coquetterie si utile sur les doux yeux de
vache. Il y a des années que je cherche, malgré l’Internet. Et ce matin, même
si je ne sais toujours pas, sur l’écran, des cache-yeux sur des attelages de bœufs.
Devinez où ? à NESCUS, petit pays perdu d’où viennent mes aïeux, de Montagagne pour être exact !
Celui qui travaille avec des
chevaux, des mules, des bœufs s’appelle Olivier Courthiade. Poète, paysan, il
doit jouer Franz von Suppé comme il pratique l’autre piano pour une cuisine
vraie. Et, vous avez entendu sur la video ? Parlo occita ! Il parle
occitan !
Travaillait-il déjà à la ferme
vers 1977 ? Qui sait s’il les a connus mes petits vieux de Nescus ?
Je lui porterai les diapos et du rouge du Bas-Pays !
(1) Assaboura = donner du goût,
assaisonner
Crédit diapos de mon pauvre papa, François Dedieu : Montagagne, printemps 1968.
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