mardi 10 juillet 2018

1918 – 2018. VOUS AVEZ DIT « RACISTE » ?



Ils osent, en 1918, parler d’une France « ethnographique » !

« … Il est peu d’États au monde dont l’unité nationale soit aussi solide que celle de la France ni qui se rattache par ses ancêtres à des races plus nombreuses et plus variées… ».

Pour un début, c’est fort ! Plus c’est gros mieux ça passe, plus c’est vrai plus c’est faux. Et si cette façon de pratiquer reste un principe premier de la politique, le moins que l’on puisse dire est que le nationalisme ne faisait pas alors dans la nuance…  

La mauvaise conscience semble flagrante, il s’agit, en effet, dans ce manuel de géographie par P. Foncin / librairie Armand Colin / 1918, du dernier volet d’une révision de la France (Relief du sol, Écoulement des eaux, Mers et côtes, Voies de communication, Agriculture, Industrie, Commerce, Défense terrestre, Défense maritime, Alsace-Lorraine, L’Algérie, Tunisie-Maroc, Colonies, Formation historique, et enfin Ethnographie !).

« … la France était habitée par une race de chasseurs sauvages au crâne allongé et étroit…/… puis vint une autre race analogue, mais plus intelligente, habitant des grottes…/… Plus tard parurent des envahisseurs à tête plus courte et plus large… »

Le fond insiste trop sur la forme des crânes pour ne pas annoncer les barbaries racistes à venir, la fureur raciale du Führer et, moins visibles alors pour cette unique raison, les pulsions malsaines toujours entretenues par des puissances se targuant par ailleurs de porter la civilisation aux peuples de la planète !

C’est un ton en dessous ensuite, pour les Ibères et les Ligures,

« … de taille médiocre, avaient les yeux et les cheveux noirs et la peau brune. Ils furent probablement refoulés par les Celtes… »

N’est-ce pas encore conforter la supériorité des Nordistes ou, pour se répéter, l’infériorité des Sudistes :

« … Les Provençaux, descendants des Ligures et les gascons (Vascons), descendants des Ibères, sont encore aujourd’hui, par leur tempérament et leur caractère, assez éloigné du type général celte… »

Après le bon Gaulois moustachu au cornes de vache sur le casque, et surtout parce qu’aujourd’hui, les Belges sont dans la mire des Bleus, concluons ce propos avec le petit florilège qui suit :

« … Les Celtes d’abord puis les Gallo-Kimris, enfin les Kimris-Belges, succédèrent aux ibères et aux Ligures dans tous les pays qui sont au nord de la Garonne. C’est surtout le type des Belges et des Kimris-Belges, aux cheveux rouges, à la taille énorme, au teint blanc et à la voix éclatante, qu’a dépeint l’antiquité classique… »



Pour les Bretons, c’est plus gentil. Demandez toujours ou plutôt zoomez la photo de la page pour savoir mais nous en resterons là avant d’aller chercher quelque chose sur le pédigrée de l’éminent auteur de ce traité de géographie, P. Foncin…

Le monde a-t-il changé ? Faut le dire vite… ces vieux démons pourraient encore ressurgir…    

PS : en rouge sur la carte : « limite approximative des grandes tailles et des tailles moyennes ». Seule note d’impartialité, les limites des parlers d’Oc.

Illustrations tirées du livre.


mercredi 4 juillet 2018

UN MIREPOIX DE PETITS PAYS / Pays d’Olmes, Mirepoix, Razès, Piège.

Le Pays d’Olmes, 300 km2 seulement, mais multiple, avec la Montagne de Tabe (Pic de Saint-Barthélemy 2348 m., Pic de Soularac 2368 m.), la station de ski des Monts-d’Olmes[1]… le château de Montségur sur son pog où deux-cent-vingt Cathares et faydits choisirent le bûcher plutôt que de renier leur foi… 

Pic de Saint-Barthélemy Wikimedia Commons Author Pierre Benard
Le guide qui faisait visiter plutôt bien, genre beau-gosse-randonneur-alpiniste aux muscles fins et bronzés, suivi par l’admiration toute féminine de sa conquête, gâcha cette fois-là l’engouement respectueux de l’assistance, enfin, de ceux qui y furent sensibles, lorsqu’il eut la mauvaise inspiration d’appeler la montagne derrière, seule voie, très dure l’hiver, de ravitaillement des assiégés, « Saint-Bart ». L’irruption incongrue de l’île tropicale haut-de-gamme, la présence béate de sa compagne tout acquise, en auraient été presque risibles sans le respect dû à cette triste, austère et terrible page d’Histoire… Plutôt admirer les cycles étonnants, suivant que le siphon se remplisse ou se vide, de la fontaine intermittente et à fort débit de Fontestorbes alimentant l’Hers sorti des gorges de la Frau.  

Lavelanet Wikimedia Commons Author LucasD
Et le Doctouyré et le Touyré, ces eaux pures de montagne sans lesquelles le travail de la laine, hélas aujourd’hui presque oublié, n’aurait pas fait la renommée de Lavelanet du pays des noisettes... Ici aussi, le travail des peignes en corne, le polissage du jais. A propos de Lavelanet, une caméra nous a montré Fabien Barthès dernièrement, gardien de but champion du monde en 1998, désormais supporter des Bleus en Russie, se pliant, dans une tribune, à une séance de selfies. Il n’a donc pas piloté, cette année, aux dernières 24 heures du Mans… L’industrie n’est plus qu’un souvenir dans ce Pays d’Olmes. Point positif,  les truites sont revenues dans ces sous-sous-affluents de la Garonne depuis que les pollutions ont cessé.  
Cathédrale Mirepoix Wikimedia Commons Author Andy HM at Esperanto wikipedia
 
Alors, à Mirepoix peut-on à nouveau mirar lous peisses, mirer les poissons[2] ? Plus sûrement, les maisons moyenâgeuses à colombages, la cathédrale Saint Maurice. Son édification prit des siècles à cause des guerres, de la peste, de la nomination de Pierre Poisson, auteur des plans, comme cardinal, ce qui laissa l’édifice en plan. Elle reste remarquable pour son clocher (le plus haut d’Ariège), son impressionnant bourdon de deux tonnes, deux fois moins lourd toutefois que « François », celui de Montpellier ! Sa nef de 21,40 m. est la plus large du gothique languedocien. 

Achille Laugé / Route bordée de genêts voir source sur Wikimedia Commons
Le Razès, plus vers le levant, vers Carcassonne d’une part, avec les collines de la Malepeyre, Limoux de l’autre que nous avons liée à la vallée de l’Aude et qui aurait pu être considérée en tant que capitale de cet ancien Bas-Razès. Sous les collines boisées, cette zone de transition agricole voit les céréales remplacer peu à peu les dernières vignes. Achille Laugé a admirablement rendu sur ces toiles, ces paysages avec les amandiers ou les genêts en fleur. Des impressions justement, sur ce qui reste du Razès, des touches seulement par exemple sur la présence des loups jusque dans le Fenouillèdes ou encore, dans les collines, la silhouette de Philippe Noiret en promenade sur son cheval… 
Couronnée par le Lauragais, le Razès, le Mirepoix et l’Aganaguès[3], la Piège telle un œil-de-chat, jaune de son soja d’août. Collines maigres, combes seulement en culture, maigre productivité malgré le remembrement avec quelques « gros » cultivateurs seulement et pris en otage par une aberrante agriculture mondialisée. Le Garnaguès semble associé à la Piège[4], inclusion aussi mystérieuse que le pastel en cocagnes qui, entre Albi, Toulouse et Carcassonne, enrichissait les nantis en laissant à ceux qui pourtant avaient fait tous les efforts, seulement de quoi survivre… 



[1] Perrine Laffont, championne de la station, médaille d’or à Pyeongchang !
[2] Des érudits de l’étymologie disent néanmoins que Mirepoix signifie « qui regarde la montagne »… il y a pourtant une truite d’argent sur le blason de la ville ! 
[3] Le Lauragais s’appelait Auragès, en occitan Lauraguès, pays de l’aura (vent d’autan). L’Aganaguès fermé à l’est par les collines du Pédaguès anciennement Podaguès.
[4] La Piège est incluse dans la Garnaguès, quadrilatère irrégulier avec pour axes Cintegabelle-Fanjeaux et Mirepoix -Villefranche-de-Lauraguais. 

Photos autorisées Wikimedia Commons.