lundi 24 février 2025

L'IMPOSSIBILITÉ D'UNE ÎLE 1ère partie

Dimanche 23 février 2025, avec « LE MONDE EN FACE » en trois parties, France 5 consacre toute la soirée à Mayotte. D'abord le documentaire « MAYOTTE, L'IMPOSSIBILITÉ D'UNE ÎLE », ensuite la discussion, enfin un dernier documentaire «  MAYOTTE LE CHOIX DE RESTER FRANÇAIS ». 

Mayotte, l'impossibilité d'une île en replay - Le monde en face | France TV 

(Replay disponible jusqu'au 28 août 2025). 

Première partie : rappel historique et immigration. 

Circonstances : l'équipe de Julie Peyrard qui réalisait ce documentaire sur les problèmes du 101ème et plus pauvre département de France, était sur le départ juste avant le passage du cyclone CHIDO. 

Notes : 

Le lien est fait entre la crise économique, démographique, migratoire et l'histoire du territoire. L'accent est mis sur le rôle primordial des femmes dans le refus de l'indépendance au sein des Comores, dès 1960, avec le mouvement des chatouilleuses. Moins peuplée, craignant l'envahissement par Anjouan et la Grande-Comore, les femmes chantent « Maoré Farantsa », Mayotte à la France. Comme en gage, une interlocutrice évoque l'islam ouvert et favorable aux femmes sur l'île. 

Le film est ouvert à tous les avis, pour preuve, l'intervention d'Ahmed Thabit, diplomate comorien, affirmant de façon primaire que Giscard d'Estaing aurait dit oui à l'indépendance des trois îles sans Mayotte qui serait à lui !  

Rémi Carayon (moins coincé à gauche qu'à l'époque...) relève l'importance stratégique du Canal de Mozambique où 60 % des pétroliers nous approvisionnant passaient. Par contre, à propos de la guerre froide, dire que la Chine prendrait la place à Mayotte me semble anachronique. Ces années 70, c'est plutôt l'URSS qui influence : à Madagascar Ratsiraka impose un régime révolutionnaire tendance bloc de l'Est (la France devant quitter la base navale de Diego-Suarez [ 1973-1975], le Mozambique indépendant est dirigé par le Frelimo victorieux aligné sur les soviétiques. 

Au bout d'une vingtaine de minutes, le documentaire parle de l'immigration : 
* au moins 1/2 habitant est étranger, principalement comorien. 
* entre 22 et 25.000 personnes sont expulsées chaque année. 
* le bras de mer entre Anjouan et Mayotte doit être le plus important cimetière marin au monde (10.000 victimes estimées). 
* Pour Safina Soula, présidente du collectif des citoyens, les Mahorais n'ont rien en commun avec ces immigrés qui profitent des services gratuits comme l'école, l'hôpital. Ce collectif bloque le service des cartes de séjour à la préfecture.  
* Marine le Pen qui a obtenu 60 % des suffrages à Mayotte fait le lien entre immigration et insécurité. 
* Lors de sa visite, Darmanin ministre de l'intérieur annonce un droit du sol plus restrictif. 
* Le décasage d'un bidonville de 5.000 habitants sans eau ni électricité est aussi lié à la lutte contre les gangs de délinquants souvent rivaux avec ceux du voisinage ; armés de machettes, ils caillassent, coupent les routes, dépouillent les gens, prennent des otages et quand ils sont pris encombrent la justice jusqu'à l'asphyxie (30 avocats seulement pour 5.000 gardes à vue annuelles. 
* cette insécurité vide les rues et les routes dès 17-18 h. 


LA CAMARGUE de FOLCO de BARONCELLI

Par bien des aspects, tant pour sa nature que pour sa culture, la Camargue doit sa notoriété à un être exceptionnel, Folco de Baroncelli.

Folco de Baroncelli-Javon (1869-1943), dit « le marquis », est le descendant d'une vieille famille florentine, en bute aux Médicis et réfugiée en Provence (XVème s.). 

Fervent adepte du provençal (publication en 1890 de « Babali, Nouvello prouvençalo », bilingue, 53 pages), il se lie avec Roumanille, Mistral et le Félibrige. 

Folco_de_Baroncelli-Javon photo offerte par des habitants des Saintes-Maries 2003 Auteur TONIOJF

Saintes_Maries_de_la_Mer_Manade_du_marquis_de_Baroncelli Scan de carte postale ancienne Domaine Public Auteur inconnu.

1895, il loue un mas aux Saintes-Maries en vue de monter une manade. Au bout de quelques années, refusant les croisements avec l'Espagne, il s'attelle à une sévère sélection des bêtes basée sur la forme des cornes tant pour les taureaux que les vaches. Lors des courses camarguaises, les succès de son taureau Prouvenço lui valent le surnom de « roi des cocardiers ». 

Bien que marquée à titre personnel par bien des épreuves, sa vie reste liée à un engagement aussi unique qu'exceptionnel en faveur de la Camargue.  

En 1907, une crue du Rhône noie une partie de sa manade, il ne peut plus assurer ses courses et doit vendre la demeure familiale au centre d'Avignon. 
À partir de 1930, alors qu'il atteint la soixantaine, ses finances se détériorent, il doit quitter le mas de l'Amarée ; les habitants des Saintes-Maries se cotisent alors pour lui offrir un terrain où il construira le mas du Simbèu (du taureau, lou bèu, meneur du troupeau), identique à celui qu'il louait. 
1935 : il tombe gravement malade. 
1936 : le décès de son épouse le marque. 
1943 : il est chassé par les Allemands qui occupent le mas (1942). 
15 décembre 1943 : il meurt dans la belle famille de sa fille, à Avignon.   
1944 : les Allemands détruisent le Mas du Simbèu à l'explosif.  

Dans un registre plus positif à entendre, notons la réussite du marquis en tant qu'éleveur détenteur, grâce aux taureaux (dont Set-Mouraou [ 1930] et Clan-Clan [1937] à quatre reprises de la Cocarde d'Or (Biou d'Or à partir de 1952). 
1905 : il fait connaissance de Buffalo Bill alors en tournée en Europe. 
1909 : il crée l'association « Naciou Gardiano » pour la défense et le maintien des traditions camarguaises. 
Avec ses gardians et ses bêtes il collabore au tournage de films, les westerns camarguais. 

Il a contribué au sauvetage de la Confrérie des Gardians (créée à Arles en 1512. 

Capelado_de_la_cocarde_d'or_2009 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license Author Mikani

Le Grau_du_Roi_camarguaise avec le taureau Ullin 2017 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur Hyppolyte de Saint-Rambert

Il a participé à l'organisation codifiée de la course camarguaise : 
* l'abrivado, l'arrivée du troupeau de taureaux encadré par les gardians. 
* la capelado sur l'ouverture de Carmen, avec des provençales en costumes traditionnels, avant le défilé des raseteurs tout de blanc vêtus. 
* quinze minutes au cours desquelles, à l'aide d'un crochet, le raset, il faut enlever des trophées attachés aux cornes du taureau (ruban de la cocarde, glands, ficelles), valant plus ou moins de points et comptant pour le championnat saisonnier. 
* la bandido, le départ du troupeau qui regagne son pâturage. (Depuis les années 70, abrivado et bandido se font en camion). 

Croix_camarguaise_(Notre-Dame_de_la_Garde_de_Marseille) 2019 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur Arnaud 25

1926 : dans l'exaltation et la promotion de traditions qui se perdent, il a demandé que soit créée la croix camarguaise. 
1930 : il s'oppose au projet d'assèchement du Vaccarès et plaide pour la création d'une réserve permettant l'essor du tourisme.  
1935 : c’est encore lui qui fit accepter le pèlerinage gitan auprès de l’archevêque d’Aix (1935). 

Les_Saintes_Tombeau_du Simbèu 2020 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur Finoskov

Manadier, plus gentilhomme-gardian qu'aristocrate désargenté, majoral du félibrige, écrivain, Folco de Baroncelli-Javon, lou marquès, a pesé pour la reconnaissance tant culturelle que naturelle de la Camargue. Ses cendres reposent dans un tombeau érigé sur les ruines du Mas du Simbèu.