samedi 9 septembre 2023

LES-SAINTES-MARIES-DE-LA-MER (1).

Bac du Petit Sauvage sur le Petit Rhône 2006 Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic Auteur sjdunphy
 

Dans les années 60, nous y sommes allés visiter des amis. Sur la route du bac du Petit Sauvage, pratiquement à l’arrêt, la Dauphine a glissé vers le fossé... Ne me demandez pas dans quelles circonstances : nous n’avons retenu que le mot de ma grand-mère Ernestine que nous avions emmenée : « Aro, i sen ! » (maintenant on y est). Il me semble qu’on s’en est sorti sans dommage.

Au loin, le clocher-mur imposant de l’église des Saintes. Si proche de la côte, fortifiée, rappelant, plus bas sur le Golfe, la cathédrale de Maguelone, elle symbolise une résistance de longue haleine, conduite d’une main de fer par la chrétienté face aux razzias des Sarrasins. Édifiée aussi entre les XIe et XIIe siècles, c’est au XIVe qu’elle est transformée en forteresse dotée de meurtrières, d’un donjon, contre la menace des pirates barbaresques. Les habitants y trouvent refuge (un puits a été creusé) tandis que le toit bordé de créneaux et machicoulis permet aux défenseurs de contenir les assaillants.

Années 60, au transistor, on entend  : 

« ... Magali, Magali,
Qu’est-ce qui t’a pris de t’en aller pour le pays de nulle part
Parce qu’un gitan t’a regardée en faisant chanter sa guitare?
Magali... » Robert Nyel 1962.

Tout y est : le refrain en occitan "... L’amour que pourra pas se taïre, e ne jamaï se repaua, Magali...", les gitans, le soleil qui rend fou ; en prime, l'évocation de la grande steppe de la Crau, créée par la Durance, encore une fille folle de Provence. 

Années 1850, c’est ici que Frédéric Mistral vient faire mourir Mirèio venue implorer les Saintes. Une statue le rappelle. Par ailleurs, il note la présence des gitans au pèlerinage, celui des trois Maries s’étant substitué à un culte antique aux trois Matres de la fécondité. L’église recèle un autel païen du IVe siècle avant notre ère ; même le rite lié à Sara la Noire est antérieur à la dévotion témoignée par des gitans d’abord tolérés mais qui, depuis, enchantent un pèlerinage dont ils forment le principal attrait. 

Campement_gitan_aux_Saintes-Maries-de-la-Mer_en_1927 Domaine Public Wikimedia commons


jeudi 7 septembre 2023

LA CAMARGUE / DE PHARE EN PHARE...

Le_Grau_du_Roi Phare de_l'Espiguette 2015 license Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Daniel VILLAFRUELA

L’Espiguette : 27 mètres de haut. La météo, les vents violents, les tempêtes, la chaleur, le manque d’eau, l’ensablement, les difficultés d’acheminement des matériaux ont retardé la construction. Peut-être aussi une jolie histoire d’amour contrarié entre l’ingénieur et la fille du maçon : la famille, protestante, ne voulant pas de cette union, l’ingénieur a fait traîner en longueur pour rester le plus possible près de celle qu’il aimait... Neuf années ont été nécessaires entre la décision et l’allumage de la lanterne (1860-1869). 

Lighttower La_Gacholle under the Creative Commons Attribution 3.0 Unported Author Henk Monster

La Gacholle : 35 kilomètres à l’est dont une bonne douzaine depuis les Saintes-Maries, haut de 18 mètres, le phare de la Gacholle a été construit en 1882 sur la digue à la mer et mis en service deux ans plus tard ; il signale le golfe de Beauduc, unique abri dans le secteur contre les vents d’est, ceux qui démontent les flots. Uno gacholo est un endroit pour agacher, pour regarder... dans cette platitude, un tronc de tamaris permettant de voir plus loin, de guetter, s’appelle souvent « gacholo ».  

 Juste dans le creux de l’abri, les cabanes de Beauduc.  

Phare_de_Beauduc 2004  the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International, 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Auteur GHIRARDI

Beauduc : contrairement aux deux premiers, carrés, le phare de Beauduc se présente sous la forme d’une tour cylindro-conique de 27 mètres (lanterne à 25 m. d’une portée de 17 milles marins soit 31,5 km). Planifié en 1900, il est mis en service en 1903. Remplacé par une bouée repositionnée et plus puissante, il a été définitivement arrêté en 2019. 

Phare de Faraman Salins de Giraud (Arles) 2017 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Florine Vanorlé

Faraman : En bois, le premier phare (feu) de Faraman date de 1830 ; le second, de 1840, en dur, a été détruit par la mer ; à présent, 1200 m. en arrière (à 800 m. de la côte) ce sont les six bandes alternées de noir et de blanc (1934) qui marquent le troisième du nom, tour  tronconique de 1892, dominant à une quarantaine de mètres de haut (43,3 ou 45 ou 46,5 suivant les sources), jumelle de celles de Penmarc’h (1835) ou de Batz (1836) en Bretagne. 296 marches conduisent à la lanterne, une des dernières dues à Fresnel, portant à 42 ou 51 kilomètres (qui croire ?) et qui tourne grâce à un moteur électrique de 40 watts.

Désormais monument historique, le phare de Faraman a servi de décor lors du tournage du Petit Baigneur avec Louis de Funès, en 1967. (Tourné aussi aux Cabanes-de-Fleury). 

Phare ! un symbole étonnant ! une aide dans la nuit, la tempête, l’indication d’un refuge, d’un havre. Phare aussi, l’être d’exception quelle que soit la réalisation humaine honorable liée à l’esprit, à la main, au mot, au son, au ton, au muscle dont il est le vecteur. Phares aussi ceux qui nous aident à faire le chemin, qui soutiennent lorsque l’incertitude, le doute, l’hésitation arrêtent...

Ronde ou carrée, la tour qui protège n’est que le produit de l’Homme, ici dans ce qu’il a de beauté puissante, dans toutes ses dimensions...

Oh ! cet escalier en colimaçon, vraiment coquille d’escargot, spirale en 3D comme celle que j’aime appréhender, à l’envers, pour en remonter l’enroulement jusqu’au point d’origine, en partant d’une certaine idée du Sud pour revenir au village. Exactement la vue vers le haut du phare, avant d’en gravir les marches, de remonter la volute, la contre-révolution, partir de l’expansion de l’Univers pour revenir à son commencement. Il ne s’agit pourtant que de déboucher sur la plate-forme, serait-on déjà au ciel... Manière de revenir sur Terre, l’hélice, la vis sans fin d’une mécanique si poétique, viennent côtoyer le dessein infini de l’Homme pour découvrir toujours plus, toujours plus loin dans les mystères apparemment insondables de l’Univers justement, qui pourtant se dévoilent, les avancées n’en seraient elles qu’infinitésimales.

Ah ! Augustin Fresnel (1788-1827), mettant au point, avec ses lentilles dites “ à échelons ”, un système révolutionnaire d’amplification de la lumière, inauguré en 1823 à Cordouan, “ roi des phares et phare des rois ” !

Un clic pour fermer la page mais laissez les moi, dans un éclat de mémoire, ces phares qui aident à ne pas piétiner avant de périr sur pied !

Quatre phares pour ce bout du Monde, pratiquement autant que pour le déploiement sud du Golfe du Lion...

PS : Un site sur les phares du Golfe du Lion, mais qui s’arrête, étrangement, à la limite de la Camargue :

256-phares-languedoc.pdf (unanmediterranee.fr)