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vendredi 29 janvier 2021

LE POUDAÏRE TAILLE LA VIGNE / Fleury-d'Aude en Languedoc

Il y a un an, nous parlions de Josep Salvat (1889 - 1972), l'abbé, pour son poème "Lo Podaire". Puda c'est tailler et plus particulièrement la vigne, pour la discipliner à donner de belles grappes. Le poudaïré s'y attelle entre décembre (à l'époque, la nature était plus respectée) et la reprise de la végétation. Penché sur la souche le poudaïre taille la vigne, il coupe les bizes destinées à être ramassées en fagots...

Moines de l'abbaye de_Fontfroide Auteur JPS68 via photoshop

A l'instar des vieux trublions qui aiment qu'à l'occasion d'un repas de famille, on leur redemande la récitation, la chanson, l'histoire, toutes tant de fois répétées mais dont on ne se lasse pas, je tiens à perpétuer cet art de vivre... N'était-ce pas une façon de s'inscrire dans le lignage, le cousinage ? N'était-ce pas l'occasion d'exprimer indirectement la force de l'amour de la part d'êtres pour qui dire "Je t'aime", en dehors de l'intimité du couple, relevait du tabou ? Et puis n'y avait-il pas une première fois pour une jeunette, un jeunot de la génération montante à initier ? Traduction dans la tradition des œufs au mimosa, de la langue en gelée, du loup ou du turbot sinon de la langouste pour marquer plus encore l'évènement, du civet ou salmis sinon le saupiquet, des pigeons, dindes et chapons et autres poules à la crème voire le cochon de lait, pour finir même sans vouloir s'appesantir (mais les menus gardés peuvent encore en témoigner), par la mousse au chocolat, le bras de Vénus, la bombe glacée, l'académique pièce montée... le tout arrosé de nectars éclipsant l'ordinaire des jours... 

Ciseaux à tailler forgés à Pézenas.

Tout ça parce que l'an passé je promettais la traduction du Podaire de l'abbé Salvat si l'article touchait vingt ou trente lecteurs... Tout ça parce que je n'ai pas encore tenu ma parole alors que l'article compte (79 vues sur blogger, 288 sur facebook) et parce que tout le monde s'en fout, qu'il n'y en a pas un pour me gourmander (ne cherchez pas le rapport avec nos menus gourmands !) et puis, parce que, l'hiver venu, l'image du poudaïre bravant la froideur du Cers, un amandier en fleur sur le marge derrière, me revient malgré moi, comme celle des premières pousses ou des pampres lourds de raisins aux vendanges quant à ne parler que de la vigne dont la verdure, même sous d'autres latitudes, me touche droit au cœur pour me l'avoir trop bien bercé, au pays, au village, depuis la maison natale, la même qui vit naître mon père vingt-huit ans plus tôt. 

C'est que j'allais remettre "Lo Podaire" et que personne n'allait m'en faire la remarque et à y être, me faire réaliser que j'ai l'âge désormais de répapiller, de radoter. 

Je vous laisse aller voir :

 https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2020/01/lo-podaire-sermon-de-labbe-josep-salvat.html

rivelpatrimoine.frlienshebergement

Josep Salvat, pour l'état-civil Joseph, l'auteur est né le 8 novembre 1889 à Rivel dans l'Aude, le pays des comportes et des sonnailles. Pauvre, sa famille compte sept enfants (1). Une fois prêtre et nommé au petit séminaire de Castelnaudary, il fonde, avec Prosper Estieu (1860-1939) (2), lou Collègi d'Occitania qui encore de nos jours assure des cours par correspondance (cycle d'études de 4 ou 5 ans). La même année (1927), il est élu Félibre Majoral. 

Déporté en août 1944 au camp de Neuengamme, il tient un journal de captivité qui ne sera pas découvert. Ce diurnal est vite écrit en occitan (3). Ce sont vraiment des notes à la signification souvent obscure. L'abbé a tenu à sa publication après sa mort...

https://www.cieldoc.com/libre/integral/libr0688.pdf 

Il a passé ses vieux jours à Surba dans l'Ariège, au bas de la route du col de Port, côté Tarascon, le village où il est inhumé.   

Et cette traduction promise ? Mais il faut que je vous dise celle du coiffeur ? Vous la savez ? Mais si... "Demain on rase gratis !" On fait comme ça alors !

(1) A-t-il été repéré par le curé du village qui a fait prendre en charge les frais de pension au petit puis au grand séminaire où seuls les meilleurs pouvaient entrer ? 

(2) poète audois d'expression occitane et française. 

(3) Je ne peux que penser à mon père au travail obligatoire à Dresde et qui écrivait suite, certainement, à la découverte de son carnet clandestin : 

"... je me trouvais à l'immeuble central de la Gestapo, derrière la Hauptbannhof, au troisième étage pour un interrogatoire en règle. Ils m'ont demandé pourquoi j'avais écrit à propos du débarquement allié en Sicile "Alors bonne nouvelle" pour une fois bien traduit "Also gute Nachricht", les trois mots qui me valurent trois semaines de cellule et ma signature au bas d'une feuille me signifiant que la prochaine fois, le camp de concentration, je n'y coupais pas. heureusement que ce que j'avais écrit de plus délicat l'était en occitan..."

Pas un mot de plus sur cette affaire. Sinon il a parlé une fois d'une gifle peut-être reçue pour avoir répondu qu'il avait le cafard...