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lundi 5 février 2024

MAYOTTE ACCABLÉE (4)

Les trop sûrs d'eux qui attaquent froidement :

Eric F 4 février 13:45
J’ai beau chercher, je ne vois strictement aucun intérêt géopolitique ni économique à cette anomalie que constitue la souveraineté sur une île située à des milliers de kilomètres. Ça nous attire des griefs et inimitiés, ça déstabilise l’archipel, la situation est intrinsèquement intenable et très artificiellement tenue à bout de bas.

On peut comprendre des positions personnelles nostalgiques de l’époque où une partie de la mappemonde était teintée en bleu pour les possessions françaises, époque de la marine à voile et des équipages. Ce n’est plus ’’soutenable’’.

Jean-François Dedieu 4 février 15:00
@Eric F

Ce n’est pas que vous ne voyez pas, c’est que vous ne voulez pas voir. Quant au “soutenable” si vous pensez que ce sont les aumônes pour 0,45 % de la population française qui vont nous sauver de la faillite...

Voyons quelques points d’Histoire. Étranglée par l’Angleterre, perdant Maurice, la France, pratiquement avec la permission du vainqueur va s’emparer de Mayotte en maigre compensation. Laissons la marine à voile pour ma deuxième bordée de canons à savoir une période plus récente, celle des deux blocs : entre le Mozambique marxiste et Madagascar socialiste révolutionnaire bien sûr que les Étasuniens et leurs alliés tiennent à garder un ancrage dans le Canal de Mozambique. Ajoutons-y la route maritime de secours si le Canal de Suez est fermé, ce qui semblerait être le cas à cause des Houthis... Plus proche de nous, des intérêts presque inavouables ont joué pour aller dans le sens des Mahorais dont le maillage des Îles Éparses, les intérêts des pilleurs de thons et actuellement des gisements de gaz et de pétrole de grande importance. Ces intérêts ont bien sûr pesé pour laisser Djibouti pourtant stratégiquement située (avec la différence qu’eux réclamaient l’indépendance). Ces intérêts pèsent davantage encore quand les pays du Sahel nous mettent dehors et que les Russes et les Chinois s’immiscent toujours plus. Et les ZEE, n’ont-elles pas un intérêt économique ?

“ griefs et inimitiés ” de toute façon avec ou sans Mayotte cela ne changerait rien... Ah si, pardon, ce serait pris pour une faiblesse et on serait attaqués, dépecés de toutes parts.

“ l’archipel déstabilisé ” oui, par la corruption, l’autocratisme et viser Mayotte est dès lors tant un réflexe politique qu’un chantage récurrent (sauf qu’ils n’arrivent pas à vélo comme à la frontière de la Finlande.

“tenue à bout de bas ”, pardon d’en plaisanter, ce serait bien si cela ne dépassait pas le cadre d’une rencontre galante, nostalgique, elle. Non, la France ne tient pas Mayotte à bout de bras, en renvoyant toujours aux calendes grecques, dans une radinerie innommable. Alors qu’elle continue de donner à millions au monde entier, elle laisse une bonne part de la population dans la pauvreté (42 % de la population avec moins de 160 euros par mois / décembre 2022 / Le Monde). À l’abjection s’ajoute le cynisme lampant, qui freine les projets, les retarde de 20 ou 30 ans. À court terme néanmoins, elle permet la prospérité du capitalisme international calquée sur la progression globale du pouvoir d’achat.

Merci pour votre intervention.

L’apostilleur 4 février 15:35
@Eric F

Oui vaste question.
Un parallèle peut être fait avec les îles de l’arc antillais.

En parcourant les Grenadines indépendantes on mesure l’écart de niveau de vie et d’insécurité avec leurs voisines. Les anticolonialistes avaient raison en leur temps, aujourd’hui pas sûr que les populations ne regrettent pas ce statut.
A Cuba, une jeune femme me racontait discrètement ses difficultés du quotidien, en quelques mots je lui disais la vie chez ses voisins antillais. Le pire n’est jamais loin, le meilleur n’a jamais existé pour tous.
Mayotte c’est comme la Corse et d’autres encore, l’autonomie et les droits exigibles oui. L’indépendance non.
La Nouvelle Calédonie, l’Ecosse, la Bavière, la Padanie (Italie), la Catalogne.. des territoires riches égoïstes qui réclament leur indépendance.
Mayotte et les territoires pauvres c’est le contraire.

Le rattachement de nouveaux territoires candidats à la France ou à d’autres devrait pouvoir être possible sans attribuer la citoyenneté et les droits afférents. Il en résulterait une amélioration progressive des conditions de vie des populations. Une chimère impossible que les don Quichotte humanisateurs condamneraient au nom de la République.

Dont acte, on laisse donc en l’état.
Taubira et son compagnon indépendantiste usent du beurre et de l’argent...

Eric F 4 février 18:58
@Jean-François Dedieu

Vous ne répondez pas à la question des intérêts géopolitiques pour la France à maintenir une situation très singulière par rapport à la norme internationale d’auto-administration des peuples.
Jadis il s’agissait de comptoirs maritimes comme accès au commerce continental, ou encore de base d’escale pour la marine militaire qui patrouillait dans le monde. Cela n’est plus en vigueur. Il a été aussi question de la richesse que constitue un vaste espace maritime, c’est très théorique dans l’hypothèse de gisements sous marins, hormis bien sur pour l’intérêt local.

Concernant le terme ’’non soutenable’’, cela s’applique à la persistance des disparités et singularités avec l’archipel et le continent de rattachement. La question migratoire est intrinsèquement insoluble. Cela ne fonctionne que par palliatifs et exceptions.

Enfin, l’expression ’’tenu à bout de bras’’ signifie juste qu’il n’y a qu’une très faible autosuffisance, les standards appliqués ne correspondent pas à la rentabilité d’activité locales, et la situation n’est pas propice au tourisme intensif comme les Seychelles.

Je comprends que vos attaches personnelles vous donnent une approche affective sur cette question, et je reconnais que la mienne est prosaïquement distanciée et rationnelle.

Jean-François Dedieu 4 février 20:08
@Eric F

la norme internationale d’auto-détermination des peuples ? Vous y croyez ? Je vous en livre les contre-exemples et encore je me suis arrêté à 2012...

Les contradictions de l’ONU, vous les voulez sauce tartare ?

1948 République populaire de Corée coréenne.

1950 La Chine entreprend de « libérer » le Tibet.

Années 50 – 60. La fédération Ouganda – Kenya – Tanganyika ne se fera pas à l’indépendance.

1960 L’indépendance sépare le peuple Ewé (0,5 Million) écartelé entre le Ghana, le Togo, le Bénin.

1961Les Britanniques trahissent la promesse d’autonomie faite au Buganda (royaume intégré à l’Ouganda).

1961 Cameroun britannique partagé entre le Nigeria et le Cameroun français

1968 Rodrigues refuse l’indépendance mais est intégrée à Maurice.

1971 Taiwan refuse la Chine Populaire à l’ONU et perd son siège

1973 Cap Vert bissau-guinéen ?

1976 République arabe sahraouie marocaine.

1983 République turque de Chypre du Nord

1988 Palestine israélienne.

1990 Transnistrie russo-moldave

1991 Ossétie du Sud russo-géorgienne

1991 République du Somaliland somalien

1992 Haut-Karabagh Azerbaïdjanais

1992 Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Macédoine, Kosovo yougoslaves

1993 Erythrée éthiopienne

1999 Abkhazie russo-géorgienne

2002 sécession du Timor oriental indonésien

2006 Montenegro yougoslave puis serbe

2008 Kosovo yougoslave puis serbe

2011 Soudan du Sud soudanais ?

2012 Azawad malien

Si, si, les activités locales sont rentables, ce fut même un eldorado comme pour cette femme partie de rien et à présent en tête de la plus grande flotte de bus...

Pour finir, ce n’est pas par affect qu’il faut défendre à tout prix la position de Mayotte française, les arguments sont recevables et bien plus moraux que ceux des « sans cœur » aux oukases inhumains allant jusqu’à livrer toute une population au nom du premier principe de l’ONU sur la décolonisation et avant tout par négation du sens de l’Histoire, et, il faut le dire, par haine de la France et des Occidentaux...


vendredi 29 novembre 2019

QUESTION d’ACTUALITÉ / mythes croisés d'un Moyen-Age arriéré et de l'Andalus lumineux...

La Renaissance s'est tant voulue légataire d'un héritage antique de prestige qu'elle a considéré le millénaire la séparant de l'antiquité comme un bas-fond d'obscurantisme et d'ignorance. L'appellation "Moyen-Age" dit abusivement que ces mille ans auraient seulement été une parenthèse difficile, sombre, sale, obscurantiste et de régression.

Pain trempé dans du vin au Moyen Age Wikimedia Commons Auteur Unknown 14th
 
Difficile ? "A fame, bello et peste, libera nos Domine" : 
"De la peste, de la famine et de la guerre, délivrez-nous, Seigneur." 
La vision des disettes et famines ne doit pas occulter que si le paysan mangeait moins de viande que le seigneur, il disposait néanmoins, fut-ce moins souvent, de salaisons et de viande fumée pour agrémenter les légumineuses ou accompagner le pain, aliment de base. 

Sombre ? alors qu'entre le style roman ramassé, aux petites ouvertures et le gothique aérien aux grands vitraux parlants, on est passé de la prosternation religieuse, de la crainte des flammes de l'enfer à l'élévation mystique vers le paradis et la lumière ?

Sale ? alors qu'à la suite des Romains l'habitude des bains publics perdure, une fois par semaine et tous les jours pour les mains et le visage ? Finalement, avec les bains-douches encore dans les années cinquante c'était la même chose à notre époque. Et quoi qu'il en soit, la saleté est venue après, sous le roi-soleil par exemple. L'élite s'aspergeait de parfums pour tenter de camoufler les mauvaises odeurs... Les pores de la peau devaient rester fermés aux agressions extérieures et avant tout à la peste noire !.. Il était donc dangereux de se laver !

Detail of Les tres riches heures March Wikimedia Commons Auteurs Paul, Hermann & Jean Limbourg

Obscurantiste ? dans le sens de la rétention de la connaissance, du refus du changement et du progrès ? alors quid des mouvements hérétiques sans le ferment des idées ? alors pourquoi les premières universités, le roman courtois, la place de la femme ? et au chapitre des innovations, l'assolement triennal, la charrue, le collier d'épaules pour le cheval, la brouette, les boutons, les lunettes, l'horlogerie, le moulin à eau, la forge...

C'est bien qu'on ait oublié la signification profonde et péjorative de l'appellation "Moyen-Âge" pour ne retenir qu'un concept neutre d'âge moyen, ni bon ni mauvais en apparence et pourtant bien mieux que cela, car ni sombre, ni sale pas plus qu'obscurantiste et porteur, comme l'est chaque ère à son tour, des acquis du passé à transmettre !  

Et il ne faut pas surenchérir au prétexte que sans les traités arabes, la médecine européenne aurait stagné.   

A cause du romantisme, le XIXème siècle a justement rajouté le cliché idéalisé d'Arabes cultivés, brillants et bien supérieurs à nos Européens sales et obscurantistes. Un escamotage qui prévaut encore aujourd'hui.

Alhambra Granada wikimedia Commons Author Lettkow

Certes il y eut Averroes, Avicenne, les jardins de l'Alhambra, la mosquée de Cordoue, la transmission par leur entremise du bagage, des connaissances antiques, de la Grèce notamment... sauf que c'est cacher son ignorance derrière son petit doigt si on occulte l'esclavage, l'hégémonie islamique, la domination tyrannique que certains minimisent en prétextant que l'exploitation des territoires conquis ainsi que la gestion des terres étaient laissées à des locaux, des "collabos".

Déjà lorsque on s'extasie à propos de la gestion de l'eau sous un climat difficile, l'avis est plutôt péremptoire ! Sûr que les Berbères issus des oasis y sont pour quelque chose mais pas les Arabes, piètres agriculteurs et de toute façon enclins à faire travailler les vaincus.
Concernant l'esclavage, ce n'est pas parce que le capitalisme européen s'en est gavé pour déjà multiplier millions et milliards entre les XVème et XIXème siècles (1) qu'il faut taire, même sans parler ici des traites arabes transaharienne et de la côte swahilie, les filières européennes, ces slaves raflés en Europe Centrale, ces Blancs amenés à Verdun, centre de castration et marché aux humains renommé !

Concernant l'hégémonie religieuse, la rumeur insistante à propos d'une tolérance qui aurait duré des siècles ne résiste pas à la réalité historique.
Au IXème siècle, une islamisation violente a accompagné la mise en place de la domination arabe. De nombreux martyrs chrétiens en furent victimes. Conservatrice et intolérante, la charia est à l'origine de persécutions, d'expropriations de terres, d'extirpation généralisée des noms de lieu et des langues locales, de destruction des églises au profit des mosquées. Dans ces conditions la conversion massive des colonisés se comprend aisément. Avec la perte du statut de dhimmi, dans le meilleur des cas, ils n'avaient plus à payer l'impôt des infidèles (3,3 fois plus élevé que celui des musulmans). Contrairement au mythe entretenu de l'islam éclairé en Espagne médiévale, les trois religions n'ont pas cohabité en harmonie et la confrontation a même dépassé les Pyrénées, ce dont il sera question bientôt... 

Al_Andalus_geopolitico Wikimedia Commons Own work Author Bettyreategui / Pour Narbonne, "Harbuna" en phonétique arabe...
(1) vous remarquerez que je ne dis pas Espagne, Portugal, France, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas... parce qu'il est foncièrement malhonnête de faire endosser une responsabilité collective de l'esclavage à des peuples derrière lesquels se cachaient ces faiseurs de fric... des dominateurs qui se voudraient élite, qui se cachent d'ailleurs toujours, qui plus est, sous le vocable de "libéralisme" aussi hypocrite que partial s'agissant de la liberté d'accumuler des richesses déraisonnables au nom d'un sacro-saint principe simpliste de propriété individuelle...   

Sources et pour aller plus loin, entre autres :  
 https://histoirebnf.hypotheses.org/1378

https://www.franceculture.fr/histoire/des-paysans-sales-et-affames-a-lobscurantisme-cinq-cliches-sur-le-moyen-age

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Al-Andalus