Photo de Régis Esteban parue sur "Pays d'Aude et autres curiosités audoises". |
" Torrès Pierre ?
- Présent.
-Torrès Patrice ?
- Présent. " !
Les nouveaux ravivent toujours la curiosité des habitués. Collège Victor-Hugo (non répertorié, entre parenthèses, dans les monuments ayant quelque intérêt à Narbonne), lycée-caserne au milieu des années 60. On se presse autour d'eux. Ils se présentent : un bel accent rocailleux leur fait rouler les "R" comme exprès réitérés dans leurs noms et prénoms. Le père est berger ou éleveur, ils sont Andorrans... Encore des lettRes "R" !
Tout bienvenus qu'ils sont, que font-ils là ? Sauf que la curiosité est primaire par rapport à l'intérêt que l'on peut porter à l'autre... et je ne devais guère me démarquer... Peut-être en gagnant leur amitié mais nous n'étions pas du même âge et dans le parcours scolaire, les divisions cloisonnent. Alors il faut les belles photos de Régis, prises exactement là où ça s'est passé, pour enclencher ma machine à remonter le temps.
Appelons-le Marcel (j'en connus un, vieux garçon et fermier avec ses parents sur les hauteurs de Villefranche-de-Conflent), il pratique la transhumance descendante entre Porté-Puymorens, presque l'Andorre... et l'Aude. Il a 45 ans. Au printemps et en été il est à Porté où il possède 20 hectares dont 19 de pâturages et de prairies à foin, le dernier étant réservé aux pommes-de-terre. A l'automne, depuis des années, il pratique la transhumance descendante à Lézignan-Corbières où il a une maison et une bergerie neuve de 600 m2. En train via Toulouse, outre ses 700 bêtes, il peut emmener dix tonnes d'aliments (foin, céréales) ainsi que son déménagement.
"Plaine de Caumont, Lézignan-Corbières / Photo Régis Esteban parue sur "Pays d'Aude et autres curiosités audoises". |
S'il laisse les brebis en pension, comme il le fit en 1963 à Capestang, il doit laisser en paiement environ 80 % des agneaux nés.
En 1971 une grève de la SNCF a bloqué le retour de Marcel à Porté. Depuis Carcassonne, le transport avec son camion lui prit deux jours (sûrement en plusieurs navettes).
Sans parler des échanges ancestraux avec l'Espagne, l'existence du Pays-Quint en est emblématique, une histoire encore tiède, bien que plus ancienne que celle de Marcel, fait état de la transhumance, à pied, des troupeaux andorrans... Torrès Pierre, Torrès Patrice, je ne vous oublie pas.
Source principale : "Situation récente de la transhumance ovine dans les Pyrénées françaises par Gisbert Rinschede, maître assistant de Géographie à l'Université de Münster. traduction de l'allemand par Mme C. Péchoux à partir du manuscrit de l'auteur "Die Transhumance in den französischen Pyrenäen".
https://www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1977_num_48_4_3523
addendum : à propos de la flore de la Clape, un correspondant a noté "Dépêche toi l'an dernier les moutons ont bouffé tout un tas d'espèces protégées au Rec."
Un grand merci à Régis Esteban qui a très aimablement mis les photos à disposition.