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mardi 22 août 2023

UNE CABANE à l’Étang, Gaston Baissette

Gaston Baissette (1901-1977) (1). Du médecin-écrivain prolifique, nous aurons à parler de « Ces Grappes de ma Vigne » (SUD, C’EST ÇA tome 4). Sa poésie, ses romans nous ramènent souvent dans cette région de Mauguio avec l’Étang-de-l’Or en tant que centre d’intérêt. L’étang, ses roseaux, ses oiseaux, ses poissons, tout dépend de la force des éléments, d’une nature dans laquelle s’inscrit une catégorie d’humains tenant à la vivre de l’intérieur plutôt que de la prendre de haut. Cela résume la finalité de la cabane au bord de l’étang même si, à l’origine, c’était pour en vivre, en tirer profit. 

Etang_de_l'or 2009 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic license Auteur Frachet

Le chasseur, le pêcheur, le faucheur de roseaux, l’amoureux de la nature, l’inconditionnel libre au point de ne jamais mentionner les nuées de moustiques, apprécient cette parenthèse, cette pause voulue dans la course dite au progrès. Gaston qui passait ses vacances au pays des grands-parents a vécu une enfance charmée par ce milieu, jusqu’à se lier avec les hommes des cabanes afin de s’initier à l’étang, afin de mieux en comprendre la vie, mieux en faire partie. Les levers, couchers de soleil, la marmite de poissons puis les histoires autour du feu le soir. Les virées à la rame, sinon à terre par de longs détours vers d’autres cabanes où sèchent des filets, des nasses, les treuils en bois passé au savon noir de la pêche au globe.  

Incidence aussi indirecte que hors sujet : les Melgoriens surnommés « manjo granoulhos » (à Fleury on dit plutôt « granhiotos ») entendent-ils encore le chant des grenouilles ? Faisaient-elles partie des prises de toute une population de pêcheurs dispersée sur les bords de l’étang (Cabanes du Salaison, des Pointes, chères à Gaston Baissette ? Il me semble avoir entendu mon dernier concert de batraciens, fin des années 70, au Paty-de-la-Trinité, en Camargue (2). Et en 2021, en suivant le dernier affluent rive droite de l’Aude, notre cher Ruisseau du Bouquet, vertes ou rousses, c’est à peine si trois ploufs attestaient de leur survie incertaine. Ne me reste plus que la maigre consolation de pointer du doigt sur la carte, tel l’explorateur se concentrant sur le but de sa quête, un secteur de l’étang de la Matte, en bas de Lespignan, un de ces réservoirs (avec Capestang et Vendres) qui font ce qu’ils peuvent pour épancher les crues aussi terribles que soudaines de l’Aude, non loin du quadripoint Nissan-Lespignan-Fleury-Salles, « Cantogragnotos » ! Oh le joli nom qui en dit tant sur ce coin de nature... ou qui en disait... faudra aller voir !     

(1) Auteur, entre autres ouvrages, de « L’Étang de l’Or » 1946, « Ces Grappes de ma Vigne » 1956, « Le Soleil de Maguelone » 1964...

(2) Dans les rizières aux abords du Petit-Rhône ors d’une remontée vers Lyon, à la fin des vacances de Pâques (fin des années 70).

dimanche 17 octobre 2021

J'AIME car il a parlé des VENDANGES d'antan. 6. Gaston Baissette

 Gaston Baissette (1901-1977), né à Albi, fut, à l'instar d'André Maurois, Georges Duhamel ou Max Rouquette plus près, médecin-écrivain (1). Parisien de par son métier de médecin de l'administration, Gaston Baissette aime le Languedoc depuis son enfance :  

« Enfance à Albi, où mon père était avoué plaidant. Toutes mes vacances se passent à Fabrègues, chez mon oncle paternel, à Mauguio chez mes grands-parents et oncle Ribeyrolles, à Montaud où ma mère a une propriété de famille. Dès l’enfance, je considère Albi comme le pays du devoir, du lycée, des sombres obligations, du climat triste, et l’Hérault comme le pays lumineux, pays de récompenses, du bonheur, des vacances (sans devoir) et de la poésie […] »

Un Languedoc héraultais sujet d'inspiration pour ses livres : 

"L’Étang de l’or" 1946, "Ces grappes de ma Vigne" 1956 (2), "Le Soleil de Maguelone" 1964, "Isabelle de la Garrigue" 1968, "Le Vin de Feu" 1974. 

Quatrième de couverture.

 "Ces Grappes de ma Vigne" raconte l'histoire mouvementée de la vigne entre 1860 et 1907, l'année de la révolte menée par Marcelin Albert et qui vaudra en 14 aux Méridionaux une des récidives chroniques, toute de mépris raciste et sadique ne faisant pas honneur aux Nordistes, il faut le dire ! 

Ouf ! laissons-là ces rancœurs, hélas fondées face à un racisme toujours latent pour consoler nos cœurs avec un tableau de vendanges signé Gaston Baissette : 

"... L'équipe des vendangeurs débarqua [...] avec ses grandes malles de bois dont le couvercle était garni de poils de chèvre collés [...] Tout le monde alla loger à la paillère [...] A sept heures, ils descendirent pour dîner. Dans le chais, une longue table était mise. A la lueur des lanternes, tous, coupeurs et coupeuses, vide-paniers, porteurs de comportes, charretiers et hommes de cave se mirent à table devant le grand chaudron de soupe au lard que Cécile avait préparé. Puis harassés par la fatigue du voyage, ils allèrent dormir dans la paille [...] 

A la vigne [...] tout le monde chantait. Ce n'étaient pas les tons vifs et les farandoles chers à la plaine. Les vendangeurs de la montagne imposaient leur lente mélopée, que tous reprenaient sans exception. La joyeuse vendange se faisait sur l'air de complainte le plus douloureux qui soit, où passaient es bises sur les châtaigniers, des nuages, noirs, des malheurs et des crimes [...] les interminables hivers dans des chaumières bloquées par la neige et la tristesse des chemins perdus. [...]

Ils étaient montés aux garrigues et se trouvaient dans une vigne de petits noirs, au jus très coloré. Or il est de tradition que lorsqu'un vendangeur (3) oublie de couper un raisin, on écrase la grappe sur le visage du coupable, on le farde. [...] Soudain Philippe aperçut un énorme raisin oublié dans le rang de Marie. L'avait-elle fait exprès ? [...] Mais Marie était robuste. Il fallut trois hommes pour la maîtriser, après une lutte. Philippe finit par écraser le raisin [...] Ils tombèrent et roulèrent dans le fossé, haletants. Voici les deux lutteurs face à face, dans l'accomplissement inconscient d'un vieux rite. Voici la figure fardée du sang de la vigne, comme la charmeuse antique chargée des maléfices et désirs de la tribu. Voici, descendue chez les hommes des coteaux, la déesse des lieux hauts et de la neige, aux joues rebondies et luisantes. Alors Philippe prend cette figure dans ses mains, l'immobilise, lentement et sauvagement, avec fougue et précision, il lèche la peau noircie par la sueur, le raisin et la terre. [...] Ils n'entendent plus, au-dessus d'eux, la joie bruyante des vendangeurs qui assistent à la scène..."

(1) ne me parlez pas de Louis-Ferdinand Destouches pour ne pas le nommer, cet antisémite notoire, raciste viscéral "pléiadisé" pour la France rance par l'éditeur Gallimard, une maison "aryenne à capitaux aryens"... J'en ai déjà fait état sur ce blog

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2014/10/la-france-en-danger-la-france-rance-des.html
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2014/10/la-france-rance-des-gallimard-les.html
 https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2014/10/la-france-rance-des-gallimard-ii.html
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2014/11/la-france-rance-des-gallimard-ii.html

et deux articles ont été acceptés et publiés sur Agoravox : 

 https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/la-france-rance-des-gallimard-i-158142
 https://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/la-france-rance-des-gallimard-ii-158606
 
Et mon acharnement tient au motif suivant, légitime je pense, devant donner à réfléchir à tous les Sudistes confondus :  

« Zone Sud, peuplée de bâtards méditerranéens, de Narbonoïdes dégénérés, de nervis, Félibres gâteux, parasites arabiques que la France aurait eu tout intérêt à jeter par-dessus bord. Au-dessous de la Loire, rien que pourriture, fainéantise, infect métissage négrifié. » LFDestouches nov 1942. 

(2) Adapté à la télé pour France 2... sauf que l'accent pointu pour une fresque méditerranéenne, c'est une honte ! Dommage aussi que la belle chanson de Marty en occitan soit associée à cette série... Dans l'Espagnol de Jean Prat d'après Bernard Clavel les gens du cru ont-ils l'accent de Montpellier ?

(3) C'est carrément un non-sens de le dire au masculin ! 

Vendanges. Gustave Doré.


lundi 23 septembre 2019

BARBOUILLER, FARDER... / Les vendanges à Fleury.

" Samedi 23 septembre 1939. Encore pour l’oncle. Ce fut sans doute, mais je ne l’ai pas noté, « uno partido de cabanot »
Joie 41 comportes dont 14 à la vigne « des roseaux » et  20  à celle du milieu."

"Uno partido de cabanot" ? 
Qu'est-ce qu'il y a à comprendre ? Que ce fut aussi récréatif qu'un repas du dimanche au cabanon ?  Les 41comportes seulement par rapport à celles de l'avant-veille encore (62) puisqu'à Rouch il a plu le matin et qu'ils n'ont certainement pas travaillé une journée complète ? Et avez-vous quoi qu'il en soit remarqué, que la vigne se nomme "Joie" ?

Sinon, dans notre papier d'hier, Jean Camp, attaché à son village et à la vigne malgré les circonstances (avant 1914, ses parents, chassés par la mévente du vin, ont quitté Salles pour Levallois-Perret), reste impressionné par la symbolique mythique des vendanges. Dans "Vin Nouveau" son roman de 1929, il décrit une scène de barbouillage, une forme de bizutage entretenant une domination machiste mais accompagnée d'une réaction féminine ambivalente, ambigüe. 

Vendanges_Maestri__Michelangelo_-_Busto_di_Bacco_-_1850-

On retrouve ce passage bacchique chez d'autres écrivains dont Gaston Baissette (1901 - 1977) qui lui, dans "Ces grappes de ma vigne" (1975) parle de farder (la scène se passe dans les années 1870, dans la plaine héraultaise, du côté de Mauguio) : 

         "... Or il est de tradition que lorsqu'un vendangeur oublie de couper un raisin, on écrase la grappe sur le visage du coupable, on le farde. Philippe, tout en vidant les seaux pleins de raisins dans la comporte, guettait du coin de l’œil une défaillance de Marie. [... ] Soudain Philippe aperçut un énorme raisin dans le rang de Marie. L'avait-elle fait exprès ? C'était en tous cas la belle occasion. Mais Marie était robuste. Il fallut trois hommes pour la maîtriser, après une lutte. Philippe finit par écraser le raisin sur le visage de Marie, la barbouillant de jus rouge et poisseux. Ils tombèrent et roulèrent dans le fossé, haletants. Voici les deux lutteurs face à face, dans l'accomplissement inconscient d'un vieux rite. Voici la figure fardée du sang de la vigne, comme la charmeuse antique, chargée des maléfices et des désirs de la tribu. [...] Alors Philippe prend cette figure dans ses mains, l'immobilise, lentement et sauvagement, avec fougue et précision, il lèche la peau noircie par la sueur, le raisin et la terre. Comme le chat patient et méthodique, il parcourt depuis la racine des cheveux jusqu'au menton, , depuis le nez jusqu'aux oreilles, le visage abandonné, aux lèvres entrouvertes. Ils n'entendent plus, au-dessus d'eux, la joie bruyante des vendangeurs qui assistent à la scène. 
Le soir même, Philippe grimpa à l'échelle du grenier et alla retrouver Marie. Il redescendit au petit jour..." 

Le_Courrier_Français_1887_Vendanges_dessin_d'Adolphe_Willette

Mais c'est qu'on ne s'en fait pas dans cette colle des années 1870 même si nos deux jeunes gens vendangent ensemble et sont amoureux depuis petits ! Mais c'est que les artistes on toujours su exprimer ce côté charnel de la récolte...  

Toi qui es parti le 23 septembre 2017 et qui a su si bien partager et prolonger nos jours au village, tu me l'aurais dit, avec retenue mais aussi la malice de ton sourire, que moi aussi je ne m'en fais pas de publier avec cette allégorie plantureuse... En cherchant comment illustrer justement, je suis tombé sur cette photo de toi qui m'a sorti ces mots du cœur : " tu es beau, papa..."