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mardi 13 juin 2023

SÈTE 3. Escale à table aussi...

Voilà qui nous transporte en haut du Mont-Saint-Clair pour ces fiers voiliers en approche... Pour les marins, c’est la manœuvre, de force ou non, synchronisée, aussières, cabestan, commandée au sifflet, chantée ensuite, halée en cadence, par la bordée de marinières jusqu’à l’amarrage. Bien sûr, les grands vaisseaux se font plus remarquer avec, cette fois, les mâts et pavillons qui dépassent des toits, pourtant des maisons les plus riches, sur l’avant-scène, celles des négociants et maîtres-voiliers... et tout aussi bien, en intaille, un Bar de la Marine, un patron truculent, César, de son prénom. Alors, sur le quai, en habit, d’une faconde ne devant rien à Marseille, jamais à court de boniment, un Marius tout sourire invite à la visite. Pour un temps, la flotte de pêche a cédé ses anneaux, prêté ses bittes d’amarrage (c’est bien la première fois que je vois que la bite en a deux, en parlant des « T », allons, allons !). 

Escale_à_Sète_2022 Creative Commons Attribution 4.0 International Auteur Christian Ferrer

Combien de visiteurs ? 300.000 en 2022 ! Et combien, avec l’air marin porteur d’Italie, qui vont se disperser à la recherche d’un de ces restaurants très méditerranéen où les noms déjà sont un plaisir des sens. 

Bourride_sétoise 2020 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Arnaud 25

Pourquoi pas une macaronade aux brageoles avec des spaghettis d’un diamètre ajoutant au dépaysement ?

Ou alors une tielle ? Des moules, une bourride, une rouille de seiche, des encornets farcis ? Du poufre puisque le poulpe est emblème de la ville. Et tout à la sétoise pardi ! Sans courir à tous les diables pour trouver un resto, vous tomberez peut-être sur la fontaine du poufre géant à côté des dauphins sur la place de la mairie (Léon Blum ?). 

Zézettes_de_Sète Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur 34 super héros

Pour finir somptueusement, comme sur la nappe blanche des riches négociants et commerçants à l’occasion de la Saint-Louis (comment ne pas revoir Fernand Charpin dans le rôle de Maître Panisse ?), un monumental frescati de plusieurs étages de douceurs bombées au glaçage caramel rehaussé de bigarreaux confits... qui, plus que de la chaleur d’août (même s’il fait bon dans nos vieilles maisons [26-27°]) va pâtir de la gloutonnerie ambiante (mamma mia ! quel coup de fourchette alors !) ! Et pour faire passer, les zézettes avec le ristretto, le café, toujours à l’italienne ! Qu’est-ce qu’ils disent, dans ce cas de figure, les djeuns ? une « tuerie » ! ce ne peut être plus vrai, du coup, je consens, exceptionnellement,  à reprendre le mot ! Moralité : de nos jours, on peut mourir aussi de se faire plaisir ! 

PS : si les clichés ne sont pas disponibles, il est quand même possible de voir sur le Net à quoi ressemble un frescati. 

lundi 12 juin 2023

SÈTE 2. Bateau & rose bleue

MS_Emsstein_cargo_ship_of_the_north_german_lloyd Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Author Buenosera

« Quand je vois passer un bateau, j’ai envie de me foutre à l’eau.../
...  et rire comme un étranger
D’un rire qui fait éclater la rose bleue d’un tatouage.../
... Changer le coton en tabac et le tabac en coc... / 
... enlacer ces filles malhonnêtes.../
Au fonds des clandés de Papeete... /
... les champs de pavots.../
... filles à la démarche étrange
Le pan de la jupe fendue
Bat l'amble sur des jambes nues.../
Quand je vois passer un bateau, je rêve de me foutre à l’eau »

Crédit Guy Bontempelli (1940-2014), chanson coécrite avec Gérard Bourgeois (1966) (dommage de saucissonner par rapport aux lois sur le plagiat).

Préférant pécher par anachronisme puisque à l’époque, le mot « cocaïne » n’avait pas le poids qu’il vient de prendre lors d’un fait divers aussi malheureux que lamentable (affaire Palmade), je relève par contre les champs de pavots suite à l'image de la " rose bleue "... C’est vrai que le Triangle d’Or Birmanie-Laos-Thaïlande, interdit aux importuns, focalisait plus encore le problème de la drogue que la zone Iran-Afghanistan-Pakistan (le Croissant d'Or). Rien n’était dit alors sur la coca d’Amérique du Sud. Aujourd’hui, on sait officiellement qu’avant les indépendances, la France encourageait la culture, avec une Régie de l’Opium (en Indochine), un service des douanes chargé de tenir les comptes... Aujourd’hui on ne le cache plus : les States ont trempé dans ce trafic, la Chine aussi (internationalement plus victime que coupable) , et les petits peuples qui cultivent sont si pauvres que l’addiction aux opiacées des pays riches n’est pas leur problème... De la même famille des papavéracées que le coquelicot, parme, rose, grège, la fleur est d’une beauté fascinante : ses pouvoirs entretiennent le trouble ; des plus utiles pour soigner (morphine, codéine, thébaïne, papavérine, narcotine, etc., parmi la vingtaine d’alcaloïdes qu’elle contient) elle recèle aussi l’innocence gourmande de ses petites graines noires sur les gâteaux au mák si communs en Europe Centrale... Malheureusement, la dernière fois, en Tchéquie, pas moyen de m’arrêter pour une photo (cette année 2023, Vaclav, ami fb de Tchéquie, a incidemment posté des photos d’un champ de pavots de Bohême. Comment m’empêcher d’une réaction pavlovienne avec  un article sur « papaver somniferum » ? d’’une réflexion aussi sur la relative de l’emprise du temps puisque chacun emporte ses sensations les plus marquées jusqu’au bout du chemin ? Mais restons-en à cette chanson qui balance et emporte, ça n’a l’air de rien comme ça mais loin de sa plage (plus précisément de celle des Cabanes où il a campé sauvage les deux dernières années possibles), depuis son HLM à Givors, à l’âge de vingt-cinq ans, ça tangue et ça roule au lit, vous pouvez croire, entre les lectures sur le Triangle d’Or, les aventures risquées des circumnavigateurs, les risques par procuration sauf, à être couché, pour le plaisir de l’amour... Ah la jeunesse... on n’en réalise le privilège que lorsqu’il a fini de nous filer entre les doigts...  

Fregate-Antoine_Roux (1765-1835)source Jean Meissonnier Voiliers de l'époque romantique p65 Wikimedia Commons Domaine Public

Le lendemain, à l’école, en partage, du temps où la récitation menait à la poésie, manière de couper court à une réalité affligeante que l'instit se gardait pour lui, « La Sérieuse » d’Alfred de Vigny (1797-1863) nous sortait du port :

« Qu’elle était belle ma frégate
Lorsqu’elle voguait dans le vent !... »