jeudi 7 novembre 2019

SARDO & CANSOUS / La sarde et les chansons des vendanges

Libations et chansons au dessert mais même dans les vignes des airs égaient parfois les vendangeurs. 

Marie Laforêt Mostra di Venezia 1994 Wikimedia Commons Auteur Gorup de Besanez
Quand la mort de la fille aux yeux d'or a récemment été annoncée, comment ne pas penser aux Vendanges de l'Amour ?

 https://www.youtube.com/watch?v=aj42vpjJBQU

Et, tant que nous y sommes, pourquoi ne pas se demander si d'autres chansons ne marquent pas un moment aussi important de l'année, de la vie même des hommes, au même titre que la moisson ? Entre parenthèses, avant la vigne, l'Aude comptait beaucoup pour la production de blé et à ce titre, la plaine de Coursan était particulièrement renommée.

Une vraie colle quand le net lui, répond aussitôt :
"Trois jours de vendanges", zut de l'opéra et ce n'est pas faire injure au genre que de demander les paroles faute de ne rien comprendre.

https://www.youtube.com/watch?v=k-3ZyRQgHb0

En suivant, "Vendanges à Porto" par Yvette Giraud (1916 - 2014)... pas de quoi faire le dégoûté mais ça fait rengaine, de celles que la profession se permettait, sur un 45 ou un 33 tours derrière un titre phare, comme "Les Lavandières du Portugal"... Sinon une belle voix grave et une belle carrière au Japon !

https://www.youtube.com/watch?v=_hPvM13Wy34

Avec les Zouilles, en 1989, c'est dur de couper les raisins, c'est dur dur dur aussi pour les portugaises même si la musique est pas mal...

https://www.youtube.com/watch?v=JhMeBxwVnP0

Et là, l'envie me démange d'aller en vendange même si ces paroles s'entonnaient plutôt au dessert d'un bon repas... Oh qu'ils étaient joviaux et rougeauds les convives. Jusqu'alors, m'interrogeant sur la forme de grappillage avec un petit panier percé, j'ai cru que c'était seulement leur état qui les mettait en joie, aujourd'hui je réalise seulement les idées égrillardes à peine cachées sauf qu'enfant nous n'avions pas les codes et que quand nous fûmes en âge, c'était passé de mode de s'échauffer par ce biais :

"...  Ninette, ma Ninette, vois ce beau raisin
Oh ! Fit la fillette, y en a plein la main ;
Que la grappe est belle, que les grains sont noirs
Le bon vin, dit elle, coulera du pressoir..." 

http://www.dutempsdescerisesauxfeuillesmortes.net/paroles/petit_panier_le.htm

Chanson de vendange Wikimedia Commons Author L.L

Retour à l'ordi. En 2009, pour Gérald Genty, auteur-compositeur-interprète, "... j'en ai marre du sécateur (...) le premier qui regarde sa montre c'est toujours une sale rencontre..." On sent le vécu, les sous à la fin... parent éloigné "t'es porteur", parent proche "...sur le tracteur...". C'est gentil.

 https://www.deezer.com/fr/track/3766197?autoplay=true

Encore de la rengaine cent pour cent "tralalala" avec Lily Fayol (1914 - 1999). Franchement franchouillard...

https://www.youtube.com/watch?v=Owmg1GQn3yQ

Marie Laforêt encore en italien cette fois "la vendemmia dell' amor" : l'occasion de dire que les échanges semblent grippés... Qui sait ce qui a du succès en Italie maintenant, ou en Espagne (Y volvamos el amor) ? Dommage si cette réflexion alimente l'idée que l'Europe n'est que celle du pognon...

Luis Mariano redonne lui aussi dans la recette qui rapporte avec le rythme gnagna de ses "Vendanges à Madeira".

https://www.youtube.com/watch?v=x70hKIptyCE

Et pour ceux qui aiment le genre, "La Marche des Vendanges" d'Edouard Duleu (1909 - 2001).

 https://www.youtube.com/watch?v=3yLTZjK9aHM

Bouquet final avec les Petits Chanteurs à la...

"... s'il picole c'est qu'il doit boire, pinot pinot pinot noir... buvons à sa santé et à celle des cocus pinot pinot pinot..."  

Comment ? les petits chanteurs ?? oui mai à la Gueule de Bois fallait préciser, genre barbus...

https://www.youtube.com/watch?v=uG907s1tn9A

Alors est-ce sain d'abonder pour un florilège pas en rapport avec les Vendanges de l'Amour" (1964) de Marie Laforêt (1939 - 2019) ?  Le seul rapport n'est-il pas avec l'adolescence ? Et puis cet esprit famille à l'époque... L'oncle Noé notre vedette avait ses airs de vendanges : 

« Lous anciens rasclaboun,                  « Les anciens raclaient,
Nous autris rasclan,                                 Nous autres raclons,
Lous joubés ba saboun,                           Les jeunes le savent
Elis rasclaran,                                          Eux ils racleront… »

Ah ! L’envie me démange
D’aller en vendange… etc… »

Air connu... Par contre, pour Michaëla, on en sait moins... Il semblerait que ce soit Micaëlla mia, chanson napolitaine  1910, paroles F.L. Benech / musique Léo Daniderff ? (3) :

"... Quelques paroles (j’ignore la suite) de Michaëla  (et non Manuela, 1er succès de Julio Iglesias).

« … Quel est donc ce billet                       
Entre tes seins caché                                  
Michaëla ?                                                 
Et, pâle de fureur,                                     
Antonio le pécheur                                    
LuT (1)  ce mot  
Qui lui brisa le cœur :
« Michaëla la brune,
Ce soir au clair de lune,
Comme par le passé,
Nous irons nous griser
De baisers… »

L'oncle Noé à droite.
Et  pour finir comme les barbus de tout à l'heure :
« J’ai mal occu… j’ai mal occu…
J’ai mal… occupé ma jeunesse :
J’ai troP (2) été, j’ai troP été,
J’ai trop été dissipateur »

 (Caboujolette / 2008 / François Dedieu).


(1) Il faut bien prononcer le “T”, comme dans “luth”.
(2) bien faire entendre la liaison.  
(3) voir https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2018/09/vendanges-ambiance-fleury-daude-en.html
Cela parait futile mais papa aurait aimé l'évocation de cette piste pour cette chanson marquant nos pages de vendanges à Fleury... Il n'empêche, pour être heureux, chacun se doit de chercher et de cumuler ses petits bonheurs, ses bonnes émotions, comme des perles de couleur pour un collier ou un bracelet...  



 


 

samedi 2 novembre 2019

LA SARDO, le festin qui clôt les vendanges ! (suite & fin) / les vendanges à Fleury.

Jean Camp
Suite de la sarde dans la Clape, quelque part vers la chapelle des Auzils : extrait de Vin Nouveau, un roman de Jean Camp paru en 1929.

"... Le maître s'est assis au centre de la table. A sa droite la "moussègne" qui dirigeait la file ardente des coupeuses ; à sa gauche, Elida, la plus jolie fille du pays qui va se marier dans quinze jours. [...] Placide et les femmes mûres passent les pots et les plats. [...] nous sommes ici entre paysans qui savent que le pain qu'ils broient et les mets dont ils se nourrissent sont des choses sacrées et qui coûtent à produire.
On mastique à grand bruit, posément [...] les quartiers de viande disparaissent avec tranquillité. de larges rasades les accompagnent. les cruches vont et viennent de la barrique aux mains des dîneurs. Les chiens rôdent autour, langue pendante, et broient les os dépouillés qu'on leur lance généreusement. [...] Parfois, hilare et ruisselant de graisse, un mallorquin rote bruyamment et soulève des tempêtes de quolibets ou de protestations [...]
le maître rit à cette liesse qu'il a voulue; il remplit le gobelet de la moussègne qui proteste et qui sent chavirer sa tête ; il glisse une galanterie à Elida qui, rouge de chaleur et de plaisir, se renverse, le corsage tendu, et rit aux anges, en coulant de loin, un regard à son promis. les saladiers sont vides, les gigots avalés, les os aux chiens, les cassoulets engouffrés, tandis que les vins guillerets de la plaine coulaient à flots.
Et voici l'heure ardente et douce des desserts. Les matrones portent à bras tendus les tours frissonnantes des flans dorés nageant dans une mer de crème, les pyramides sucrées des coques (...) Les grappes croulent (...) On se lance des grains à la tête. Les gars ont ouvert leur gilet, leur chemise et montrent le poil de leurs pectoraux. Les filles ont la gorge nue, les lèvres écarlates, les pommettes chaudes. des refrains s'élèvent, titubant (...) et cassés soudain par une rafale de cris confus [...]
Le maître a quitté son siège [...] Les vendangeurs s'égaillent à la recherche d'un retrait vers lequel ils traînent une fille, consentante et folle qui se pend à leurs bras, les baise à pleine bouche et secoue sa crinière brune en dévalant les pentes glissantes de la colline... "

Ah ! me concernant plutôt que les pentes glissantes de la colline, ce ne fut que le raide rampaillou en bas du roc des Pénitents. Qui devinerait aujourd'hui qu'en surplomb de la route, au pied de la garrigue, juste séparées par quelques amandiers ou un figuier proche d'un bassin bleu de sulfate, de petites vignes se côtoyaient sur deux courbes de niveaux aujourd'hui squattées par des genêts et même des pinèdes. Et faute de faire équipe avec une belle brune, je me coltinais les comportes pleines. C'était raide avec en prime un lacet... C'est la responsabilité des raisins qui rend le souvenir si présent et si plaisant à rappeler... Le pontet de grosses pierres plates à passer, les voitures en bas, pas l'envie de faire l'andouille ! Combien de coustals sur la remorque ? Une dizaine peut-être... Elle n'est pas haute car attelée à un motoculteur vert qui se mène avec un guidon. 



C'est un Holder, vert et à coup sûr vaillant vu le petit moteur !
Et si j'en parle, ce n'est pas pour le petit Holder, vert et vaillant pour sa taille, c'est parce que c'était chez Odette et Georges Bonnet ; ils nous avaient embauchés avec Vincent... quatre personnes, la petite colle, familiale, des patrons gentils, doux et aimants... Et à la fin, nous avons été invités pour la sardo !

Un bon pâté onctueux de Lacaune, des œufs au mimosa... j'imagine peut-être. Je ne me souviens pas du dessert (une île flottante ou un flan aux œufs, peut-être quelque chose de jaune mais là je brode)... par contre, le lièvre à la broche et servi avec son saupiquet, pas un salmis, ça, j'en suis certain !  

Pas chez Odette, le tourne-broche, mais chez mamé Ernestine, ici avec une dinde on dirait...