dimanche 7 juin 2020

MARCEL SCIPION, Le Clos du Roi.


Un Clos dit “ du Roi ”, un vallon où emmener les moutons l'été à transhumer. Faire son pain mais pas pour rigoler (50 kilos de farine, 15 jours de miches pour la dizaine de personnes d'une famille élargie), faire ses patates, ses choux, son miel, sa médecine même avec les limites qu'on sait, son vin, distiller son marc en fraude, braconner les sangliers, le lièvre les nuits glacées de pleine lune malgré les gendarmes... Et tout ça conté presque au coin du feu... Oh c'est rustique, presque un cliché pour citadin mal à l'aise, rêvant d'un retour impossible à la nature... 

Pourtant cette prise de conscience ne date pas d'hier. Il y a bien 50 ans qu'elle s'est formée. Une extravagance de nantis au début mais qui petit à petit devient une obligation sans quoi nous allons à la catastrophe de plus en plus annoncée. De timide, le changement de cap devrait se préciser avec moins de bagnole, moins de produits, finie l'obsolescence programmée, il faut des circuits courts, il faut retrouver le bonheur de manger ce que donne un jardin sain... On ne parle de sa vie que parce qu'il y a eu rupture ; Marcel Scipion et bien des auteurs bêtement traités de régionalistes ont pris conscience de la mise en danger du planétaire, de l'universel, déjà avant 1980.  

Mais l'homme ne vit pas que de nourriture terrestre. Aussi au risque de passer pour un ethnocentré (je m'en fous c'est moins grave que le nombrilisme jacobin), je me laisse aller à apprécier notre penchant méditerranéen. Le littoral oui mais l'arrière-pays surtout, qui aborde vite l'altitude, chez nous, Corbières, Pyrénées, Montagne Noire, Espinouse, Cévennes, Monts de Vaucluse, Préalpes de Digne ou de Castellane avec une végétation qui rompt avec les garrigues et maquis. 

Gabachs ou gavots, partout des montagnards de quand la montagne était belle. Et ces mots, cette langue qui se doit de résister tant qu'une domination d'un autre âge n'a de cesse que de l'effacer pour ne pas qu'il soit dit qu'elle a été soumise... 
"Dijous ma finestro i a un ametlièr que fa de flours blancos coumo de papièr"... 
Et ce n'est pas parce qu'entre la science, le réchauffement climatique et l'épuisement des nappes phréatiques, l'amandier pousse plus au nord qu'il en a perdu pour autant sa portée symbolique.  


samedi 6 juin 2020

PARTIR (5) / Vigo, Galicia.

Centro_e_porto_de_Vigo wikimedia commons Author  User Dantadd

"... Nous avons accosté à Vigo ce matin. Nous y étions à 7 heures, et, à 9 heures et demie, avec Georgette et Jean-François nous avons foulé le sol d'Espagne et visité la ville..." 

620 milles marins en 38 heures soit 16,3 nds à l'heure : la pointe de la Bretagne et le Golfe de Gascogne apparemment passés sans problème. 

"... Vigo, l'eau vert-bleu de sa baie splendide inondée de soleil. Les maisons accrochées à la montagne verte. De jolies choses dans cette ria de Galice : les boutiques ouvertes toutes grandes sur la rue, un beau parc non loin du port, femmes et filles portant un panier ou fardeau sur la tête, les maris à côté, bras ballants. A la banque, les employés avaient suspendu des cruchons à rafraîchir aux fenêtres. Une église au hasard de la promenade. Le marché aux vives couleurs, aux légumes variés, aux poissons d'un bleu miroitant, des fleurs aux cent nuances. Habits vaporeux des Espagnoles, taillole rouge des garçons. belles notes locales de Galice. Une pensée pour monsieur Fariña d'ici, mon professeur d'espagnol à Prague. Dommage la fumée noire de l'Alcantara quittant son mouillage..." 
François Dedieu / lettres et notes sur le voyage en bateau de 1953.    
Vigo_dende_o_monte_do_castro wikimedia commons Author Publicada por kai670