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mercredi 26 mai 2021

Un vieil Indien dans la ville, version mai 2021.

Ah les voyages ! Il faut pour le moins s'en accommoder et en définitive se dire que si l'avion ne fait pas demi-tour à cause d'une panne, s'il ne tombe pas, si un pirate ne le détourne pas, ce n'est pas vital s'il atterrit en retard. Et que si on arrive, au bout du compte, même un jour après, ce n'est pas si grave. Et pourtant, les retards et contretemps ne peuvent qu'être sources de stress même si ce stress génère une adrénaline poussant à faire le maximum pour atteindre le terminus. 

Depuis Mayotte, quand on habite en brousse, paradoxalement, à cause de la vie moderne et du parasitisme bloquant des politicards qui, par trop égocentriques, n'ont jamais anticipé les excès du progrès, du modernisme à tout crin, il faut prévoir jusqu'à deux heures dans les embouteillages là où vingt-cinq ans en arrière il fallait une demie heure pour parcourir les trente kilomètres menant à la capitale... Chance, c'est samedi, une heure suffira... 

Mamoudzou et Grande-Terre s'éloignent.

Plus de lumière à l'opposé mais un matin blafard loin de l'idée qu'on se fait des tropiques.


Puis il faut prendre le ferry appelé ici la barge. Il faut barger pour traverser l'isthme entre la Grande et la Petite-Terre. Six heures moins trois minutes et cette dame forte (une big mama dans le langage local) occupée certes mais qui bouche l'accès à la billetterie... pardon que j'ai dit mais la valise ou le sac à dos l'ont poussée un peu. Je n'ai pas été sourd sauf que n'étant pas tombé de la dernière pluie, du tac au tac elle s'est entendue aussi des noms d'oiseaux dans ma langue locale aussi, en occitan. Et la queue au guichet... Chance, l'amphidrome (dernière version de la barge) patiente un peu. Une pauvre femme mendie de l'un à l'autre. Aïe en période de covid ! Les yeux exorbités d'un compatriote lui lancent un "Dégage" des plus dissuasifs. Tout le monde reste dans l'expectative. 

De l'autre côté, il faut sauter dans un taxi collectif qui n'a que faire de la limite de vitesse en ville. 2,50€. 

Sans le motif impérieux et le test négatif on ne rentre pas dans l'aérogare vide !

La salle d'embarquement.

Plus de monde et des voyageurs qui arrivent alors que l'heure initiale d'embarquement est dépassée... A ne plus rien comprendre alors qu'il faut prévoir d'être à l'enregistrement au moins deux heures avant le départ prévu...

La compagnie monopolistique de l'océan Indien au prix fort par manque de concurrence. Corsair, venant ou ne venant plus, n'a pas assuré un service acceptable sur dix ans en arrière. Cette année Air France était annoncée pour quatre liaisons directes par semaine avec la métropole sauf qu'ils ont démenti. N'étaient-ce que des désirs pour la réalité ? N'était-ce qu'une rumeur ?


Sésame pour rentrer dans l'aéroport : le test négatif au covid. A l'enregistrement, le test négatif au covid. Au contrôle de police, le test négatif au covid. Personne dans la salle d'embarquement. Ensuite, néanmoins, plus de têtes qui dépassent des sièges. L'annonce de l'appel différé en raison du covid, la bonne excuse... comme si l'épidémie datait d'hier. L'avion aux deux tiers quand même avec 20 bonnes minutes de retard. 


dimanche 14 mai 2017

CHRONIQUE D’UN DÉPLACEMENT PRESQUE ORDINAIRE (fin) / Mayotte, La Réunion, Métropole

 



Ça m’a un peu coupé la nostalgie de Mayotte et lors du décollage, c’est tout juste si j’arrive à me dire que nous sommes si peu de chose, qu’une île, une petite terre perdue dans l’océan peut porter la vie, être la vie... notre maison me paraît si fragile mais si rassurante, le jardin, tout ce que ta mère peut rapporter des champs me semble dérisoire et formidable à la fois et entre les bambous, les manguiers, les bananiers, les champs de manioc, les pois d’Angole fleuris de jaune, je te vois, mon fils, partir le cœur léger vers ton collège en haut de Sada. 

 



Tu sais, avant de partir, j’ai tenu à prendre des photos... On dit souvent que la sincérité du cœur n’a pas besoin de ces images et qu’au contraire, leur soutien ne répond qu’à une faiblesse. Et pourtant, si tu savais comme, par exemple, elles aident la mémoire à ne pas dérailler. Je regarde souvent celles, en noir et blanc, du Brésil et soixante ans plus tard, elles m’aident à ne pas tricher avec mes souvenirs, elles confortent aussi ce que les sensations ont de vrai... Alors, j'ai pris aussi le lagon, la barrière de corail, la ligne des monts aux pieds desquels nous abritons l’amour qui nous cimente. 1998, je laissais le sourire aimé de ta mère et la vision de Chissioua Mbouini, l’îlot du sud, dernière terre à défiler dans le soleil couchant, entretient à jamais mon sentiment. 

Mystère du grand océan pourtant sillonné par ces thoniers senneurs du pillage irraisonné. Tu me demandais s’il y avait des orques dans nos parages. Oui, on en voit... sauf que, dans ces eaux chaudes et pauvres, leurs troupes ne font peut-être que passer. 


 
 


Madagascar, terre des hommes. On ne saurait voir un rivage sans émotion. Et cette baie qui pénètre telle une large virgule australe, n’est-elle pas liée à l’élevage des crevettes ? Ensuite ce sont ces rivières ocres des sols qu’elles emportent ; elles serpentent entre des bancs de sable. Madagascar, île rouge des forêts disparues où même les lémuriens, si emblématiques, sont désormais menacés. Côte Est, l’empennage sagittaire d’une flèche imaginaire tendue sur le cordon de Nosy Boraha, l’île Sainte Marie. Plus au nord, l’année a été plus marquée par les cinquante morts du cyclone Enawo que par les traditionnels letchis de l’été austral. 

 

La nuit monte de la surface déjà obscure des eaux. Elle va rattraper les ultimes lueurs rosées plus haut dans le ciel. Et sans l’électronique, serait-il facile de trouver La Réunion ? A dix-mille d’altitude, et avec le Piton des Neiges à plus de trois-mille mètres, l’île est visible dans un rayon de 400 kilomètres environ. Avec une boussole, même les pionniers de l'aviation l'ont trouvée... Trois-quarts d’heure après, les lumières du Port puis la route du littoral où les voitures bouchonnent en attendant la nouvelle voie suspendue au-dessus de l’eau : des lumières clignotent pour signaler les piles pharaoniques des nouveaux aménagements. Après le Barachois de Saint-Denis, ourlé de lumières, atterrissage à Roland Garros. 


L’aéroport : plein et en travaux pour accueillir encore plus de gens. Les périodes creuses semblent ne plus exister que de nom, les congés se prennent à longueur d’année, les avions sont remplis à 70, 80 %. ce soir, deux vols pour Paris et un troisième pour Bangkok...
 
Dire que c’est d’ici, ton île de naissance, que tu as commencé à t’envoler vers la métropole et Mayotte. Tu sais combien j’aime les chansons de Brassens, pourtant il y en a une qui me déplaît, celle des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part », imbéciles, d'après lui, car méprisants, chauvins, cocardiers, fiers même de leur crottin... un parti pris trop distordu et subjectif que je récuse... Savoir qu’on est né quelque part nous inscrit dans la course de la planète, dans celle des siens, de sa famille ; c’est aussi important que d'avoir des parents. Et comment, tout à l’heure, avec l’île qui se dessinait sous mes yeux, ne pas te revoir bébé et pour tes cinq premières années dans ce qui fut pour nous un havre de vie ? Mais quelle mouche avait piqué Brassens pour cette chanson ? 

Riz froid salé sucré avec de l’ananas en entrée. Encore du riz avec des morceaux de filets de poulet en sauce. Très bon malgré la redite. De l’edam de l’autre pays du fromage, « skyteam » oblige, (remarque que sur KLM ils servent du cheddar anglais). La bière ? de ce même pays des tulipes parce que la Dodo, quand on décolle de la Réunion, n’a pas la faveur d’Air France. Correct le café, néanmoins, jadis dégueulasse !

Survol de la Somalie, de l’Ethiopie, un écart pour éviter la Libye où l’Occident a semé le chaos. Remontée le long de la botte italienne puis les Alpes, le Léman et cerise sur le gâteau, ce qui ne m’est jamais arrivé, alors que le trop-plein de pavillons, d'immeubles, d'ensembles, de villes qui se touchent défilent sous l'aile, le commandant Jobard (peut-être sans "d" à la fin) a posé le 777 en effleurant la piste sans qu’on ait pu dire quand eut lieu le contact avec le sol. Super !  

Orly Ouest. Un grand escalier à la soviétique tout encombré. Je comprends que les escalators sont à l’arrêt pour ne pas engorger davantage. Des oiseaux se font entendre, je lève la tête vers les poutrelles du plafond, étonné d’entendre des passereaux et pas seulement de simples moineaux. Mais avec les cris de mouettes, je réalise qu’il s’agit d’une bande son qui sort des hauts-parleurs. C’est le contrôle des passeports avec trois guichets ouverts sur sept ; des hôtesses veillent pour faire passer en priorité ceux qui ont une correspondance à prendre sans lambiner. 
 
   

C’est un Bombardier de la filiale Hop qui nous emmène vers Perpignan. Étonnant le bruit des réacteurs, plus celui d’un micro-onde ou d’un moulin à café et pourtant, une heure cinq de vol seulement. J’ai noté un château, un hippodrome, une péniche, une autoroute qui fait des coudes brusques, une rivière aux larges méandres, des serres, le camaïeu de la terre nourricière : quatre tons de vert au moins, ponctués ça et là, d'un champ labouré. Ensuite, plus rien ne sera visible avant l’étang de Canet-en-Roussillon et Rivesaltes le terminus. La mer de nuages parfois dense comme la laine neuve d'un matelas. 
  


Le Sud aussi est sous les nuées venues de la mer. On descend directement sur le tarmac, on attend les bagages avec les accueillants. Ton oncle est là et il ne reste plus qu’à remonter vers l’Aude. 

Je vois que tu es passé chez le coiffeur ! Tonton a fini le boulot d’Eliès... tu as confiance de confier ta tête au cousin qui a à peine douze ans. Joli résultat, ça te va bien !
Pense à ton topo sur "San-Pedro-de-la-Mar".
Gros poutous de ton papa.