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samedi 14 octobre 2017

DIX-SEPT ANS, IL Y A DES LUNES... / Holoubkov, Československo


La pleine lune qui met en relief le cimier des arbres me transporte aussitôt vers une autre lune, une autre nuit, une forêt plus boréale, peut-être perdue dans un passé presque galactique.

La porte fait passer par le couloir d’entrée où donne le guichet à présent fermé de la vente à la pression (točene), au litre, au pichet, là où défilent, surtout en fin de semaine, les pichets blancs, bleus, bruns (le džbanek des grands-parents est bleu ciel, celui du grand-oncle, blanc). 
 

Dans ce hall, la senteur amère du houblon l’emporte sur le tabac froid filtrant de l’ambiance si enfumée de la grande salle encore bien remplie.  
 
 

Une fois sortis, si un roulement de voix mâles mêlées de rires gras, fait tourner la tête vers les lourds rideaux sombres de l’hôtel (réputation des buveurs oblige) tombés sur la concupiscence à la bière de ces hommes, par ailleurs si durs à la tâche, c’est la nuit qui investit nos sens. Nous traversons la nationale Praha-Plzeň qui passe devant l’établissement. A cette heure avancée, les véhicules sont rares. Au loin, seulement, un bruit de moteur crescendo, amplifié par la saignée de bitume, la montagne russe entre les épicéas. 
  

Ensuite le carrefour de la route de Hůrky (1) avec le kiosque presse-tabac, jaune et rouge pétard, pour offrir un soleil d’Espagne au ciel trop souvent couru par les nuées d’ouest. Si je n’y achetais pas les “kubánsky”, ces brunes cubaines si exotiques au pays des blondes (2), je penserais à un arrêt de bus sauf qu’un tube métallique porte l’enseigne de la ČSAD juste à côté... 

  

Logique, sur ce carrefour, cette patte d’oie qui fait graviter le village autour. D’ailleurs, à l’opposé, vers Těškov et au delà Lhota-pod-Radčem, proche du tilleul et contre le mur de la salle de bal de l’hôtel, stationne souvent la remorque-passagers des autobus Škoda (3).  
  
La nuit est trop douce, trop claire pour qu’il n’y faille rien voir et au seuil de “Na Pekarně”, la descente si raide, faite, on dirait, pour les seuls piétons, s’annonce la symbiose mystérieuse entre l’univers, la nature et l’homme cherchant à s’en émanciper... (à suivre)      

(1) elle limite le quartier “Na Rud
ě” regroupant surtout des logements ouvriers, une promiscuité en apparence sereine pour les deux bâtiments du bas tandis que les deux du haut, plus individualistes (quatre logements de plain-pied mitoyens chacun) expriment une conception du logement social méritant une mention au même titre que les villas célèbres d'Holoubkov (dont la Markova vila de 1908 / architecte Jan  Kotěra). Mes grands-parents y ont habité jusqu’au début des années 60 ; tonton et ma grande-tante y résident.  Ils aiment rester dans le jardinet, juste un lopin de terre mais, plein de fleurs ! (presque sous la route et le kiosque). Le quartier est d’autant plus aimable que la vue, au-delà du lac, en bas, de l’usine souriant peut-être de se trouver à la campagne, puis de la voie ferrée, la gare, se perd dans la forêt jusqu’en haut de croupes sombres  
(2) lieu d’achat aussi des cartes postales, des timbres pour la France et des kři
žovsky de papa (le nom m'échappe).
(3) prononcez “chkoda” et non comme dans la pub pour les bagnoles ! 


Photos autorisées : 
1. Pixabay creativ common. 
2. Svátečni hospoda. Josef Lada. 1932. Kolorovaná kresba.
3. Kiosque à Rokycany. 
4. ČSAD csUserŠJů.
5. Bus Beroun,_DOD_Probotrans, RTO městské s vlekem Author Aktron Wikimedia Commons