vendredi 2 juin 2023

FRONTIGNAN (2), la GUERRE & la TEMPÊTE de 1947.

Renault Juva 4 (1958) the Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication Author Alf van Beem

* Le 28 juin 1940, à La Peyrade, le président du Conseil démissionnaire (16 juin) Paul Raynaud (Putain vient de se dévouer pour « sauver » la France) est victime d’un accident quand sa Juvaquatre Renault s’encastre dans un platane ; il se blesse légèrement à la tête mais la passagère, la comtesse Hélène de Portes, sa concubine, meurt sur le coup (ils voulaient se marier).  

* Arrivée des Allemands au mois de novembre 1942. Les Allemands occupent la France « libre ». La mer, les plages sont minées, des bunkers de défense sont construits. Wikipedia donne le détail de l’armement : quatre canons Skoda de 150 mm, un canon Bofors suédois 40 mm, un canon Oerlikon suisse de 20 mm, un canon double Hotchkiss de 13,2 mm, deux canons quadruples Hotchkiss de 13,2 mm (à l’origine un Étasunien installé en France, industriel en armes puis automobiles) et quatre batteries antiaériennes de 75 mm, 100 à 120 hommes furent nécessaires. Ces détails pour dire comment, par lâcheté et avec l’espoir que l’Allemagne se tournerait à l’Est contre les bolchéviques (Staline), la France, suiveuse du Royaume-Uni, a laissé « Monsieur Hitler » devenir toujours plus fort (en mars 1939, l’invasion de la Tchécoslovaquie donna 1/3 de moyens supplémentaires à la Wehrmacht...). 

Frontignan_plaque_bombardement Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Fagairolles 34 

*« Frontignan, Frontignan outragée ! Frontignan brisée ! Frontignan martyrisée ! mais Frontignan... libérée ! » ; il faut rendre, bien sûr, ses mots, seraient-ils théâtraux, au général de Gaulle lors de la libération de Paris, et au masculin s’agissant « d’un Paris » ! S’il y a bourg et chef-lieu, je préfère le féminin pour une ville, bourgade, localité ou commune. La guerre, elle, n’a que faire de ces futilités : le 25 juin, le bombardement de la raffinerie par les Américains a touché la ville « par erreur » et causé la mort de 39 civils (les lignes de défense furent bombardées les 13 et 14 août ; les Allemands quittèrent les lieux le 18). La reconstruction de Frontignan prit 15 ans et fit perdre à la ville ses petites rues bien du Midi. 

Pinardier à Sète vers 1930 wikimedia commons Domaine Public... " Outremer " ? Pour ne pas dire " Algérie " ? 

* Dans la nuit du 27 au 28 novembre 1947, par un coup de forte mer (le Grec en est souvent la cause), le pinardier « Roger-Juliette » (30 mètres, de 1916, enregistré à Lorient) venant de Gênes, fait naufrage couché par les vagues sur les hauts fonds (un banc de sable ?) à 100-150 mètres de la plage des Mouettes. Les Allemands ayant détruit les moyens de sauvetage, les fusées lance-filins n’arrivant pas à atteindre le bateau, malgré le froid et la rage des éléments, seulement harnaché par une mince corde, André Massias dit « Tarzan » n’hésite pas à se jeter à l’eau. Mais comme pour les fusées, les vagues et le vent n’ont rien permis. Bilan : un survivant, six morts (tous marins de l’île de Groix / une source mentionne qu’ils s’étaient attachés au mât pour ne pas être emportés / le bateau a été renfloué et réparé à Marseille, en 1948). 

jeudi 1 juin 2023

FRONTIGNAN, pétrole, muscat, poissons...

Frontignan,_Hérault, 2013 cuves de pétrole filiale de BP depuis la Gardiole the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported  Auteur Christian Ferrer

On avait tant l’habitude de traverser avec la nationale de Montpellier à Béziers par Sète (un contournement aujourd’hui) que c’étaient surtout les torchères et les vastes cuves d’hydrocarbures qui marquaient (seulement les cuves à présent)... On en oublie d’autant plus l’Étang aux coquillages que sur le triangle bleu qui revient à la ville, Géoportail a mentionné « Usine de gestion de déchets industriels ». certainement liés, en plus du pétrole, à la chimie du soufre, des superphosphates, au sulfate de cuivre, à une production pharmaceutique, à la cimenterie. Vraiment pas envie de presser un citron ! 

Muscat_de_Frontignan the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Véronique Pagnier. 

* Frontignan est célèbre pour son muscat connu dès le XVe s.. Une légende imagée raconte qu’Héraclès aurait vrillé la bouteille pour en tirer la dernière goutte... en marque de reconnaissance, le verre torsadé juste sous le goulot. Le muscat de Frontignan est aussi le nom du cépage reconnu en AOC (Appellation d’Origine Contrôlée), dès 1936. Un commerce de vins qui a favorisé la tonnellerie locale.   

* Suite à la construction, sous Louis XIV, du canal du Rhône à Sète, l’accès à la plage étant empêché, les habitants ont demandé un pont. D’abord en pierre il s’est mué en pont métallique et tournant avant de devenir pont-levant (trois fois par jour, il permet le passage des pénichettes puisque le tourisme a pris le pas sur la navigation de commerce).

* Après Sérignan et Balaruc pour ce que nous avons vu du territoire, Frontignan dut aussi en céder une partie lors de la création du port de Sète. 

La_Pointe-Courte,_Sète 2017 the Creative Commons Attribution 4.0 International Auteur Christian Ferrer

Addendum suite à l’apport d’Achille Munier (voir plus loin) : alors que les Frontignanais tergiversent pour une meilleure santé des gens grâce l’ouverture d’un grau entre Thau et la mer, une chasse d’eau en provoque un de naturel au départ de la plage de la Bordigue (la Pointe Courte). Aussitôt les pêcheurs de Frontignan s’y installent ; la pêche y est si bonne que les cabanes en roseaux deviennent vite des maisonnettes. Cette colonie prospère alors que Colbert, à côté, décide la construction d’un port à Cette (1666)... aux dépens de Frontignan. Achille Munier déplore même que la fête de la Barque Maure des pêcheurs désormais sur le grau de la Bordigue, laissée pour compte à Frontignan, ait alors été aussi adoptée par Cette qui, n’étant pas née, n’a jamais connu le pirate sarrasin ! Il n'empêche, c'est à Cette désormais qu'on brûle la barque des envahisseurs ! L’auteur considère que la fille dépouille sans pitié la mère et que ce n’est qu’un début ! 

À Cette, vers 1830, une nouvelle race de négociants hardis venus du Nord a demandé la Bordigue. Frontignan a cédé... Malheur, le nouveau port, les gares, les grandes sécheries de morues, les chantiers de bois, de tonnellerie, les abattoirs, la gendarmerie, sur ce qui était le territoire frontignanais ! de quoi attiser les jalousies en effet ! Ensuite vint le tour des Eaux-Blanches contre une indemnité promise mais verbalement seulement : tout bénéfice pour Cette avant que Balaruc ne connaisse le même type d’arnaque ! Vers 1874, Achille Munier prédit que le quartier de la Peyrade sera le chaînon qui verra in fine l’annexion de Frontignan par les Cettois... la fille aura dévoré la mère ! Un siècle et demi plus tard, nous pouvons le rassurer... Frontignan est restée Frontignan !