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lundi 6 novembre 2023

MARTIGUES et le CANAL (fin) .

Guédiguian-Darroussin 2008 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Auteur Thierry Caro

Martigues a beaucoup plu aux faiseurs d’images dont, dans plus de trente réalisations listées par Wikipedia, Jean Renoir (“ Toni ” 1935), Karl Anton (“ Arènes Joyeuses ” et la chanson “ Venise Provençale ” 1935), “ La Cuisine au Beurre ”, 1963, Gilles Grangier, avec Bourvil, Fernandel, un film qu’on croirait tourné au fond d’une calanque marseillaise. Quoique... à parler des calanques, même la commune de Martigues en compte, sur la Côte Bleue. Sans quoi, il y a au moins un autre parallèle à faire avec Marseille, à savoir l’expression d’une fibre populaire, la mise en scène d’employés, d’ouvriers, de pêcheurs, les problèmes de société aux marges interlopes jusqu’au glauque, avant tout la vie simple pointant du doigt les inégalités devant un ramequin d’olives vertes et le pastis, une atmosphère si bien saisie par Robert Guédiguian (1953-), à Marseille et Martigues (“ Dieu vomit les Tièdes ” 1991, “ À la Vie, à la Mort 1995 ”).      

LE CANAL (ou chenal) de CARONTE. 

Pedro_Américo (1843-1905) Caronte_Atravessando_o_Aqueronte Collection privée bien que du Domaine public


Caronte ? « Bon dieu mais c’est bien sûr ! » dirions-nous, nous qui avons connu le commissaire Bourrel des Cinq dernières Minutes, années 58-73, en noir et blanc ... je n’avais pas fait le rapport or, grâce à Pedro Americo (1843-1905), le peintre brésilio-italien et plus précisément sa toile “ Caronte Atravessando o Aqueronte ”, il est question de Charon, passeur des morts, traversant l’Achéron ou le Styx, marais et fleuve des Enfers. Quoique, à ce stade, je ne suis plus bien sûr : ce sont des morts que Charon charrie, non ? Et là ce sont de charmantes créatures dans leur plus simple appareil, de celles, négligemment offertes par nos manuels d’histoire et de littérature sur l’antiquité, que je (les autres aussi j’espère) mangeais des yeux avec l’envie du puceau en mal d’initiation aux mystères d'Éros... Pas possible qu'elles aient l’obole sous la langue : trop belles et vivantes, les créatures de Pedro Americo ! 

Martigues Canal_de_Caronte 2008 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International, 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Jarke

 
Pont ferroviaire Caronte 2007 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Peiom

Entre la mer et l’étang de Berre refermé, ce sont les Romains qui ont percé le canal initial à travers un étang et des marécages. Historiquement, il traverse Martigues et ses îles ; long de près de cinq kilomètres depuis le port de Lavéra, large de quarante mètres, profond d’une dizaine, au prix de la suppression des salines et des bourdigues pièges à poissons, grâce au pont levant en ville (de 1929 mais qui n’était pas le premier à libérer le passage), aussi à celui, tournant, pour le chemin de fer (1915), du fait de ses aménagements, le canal de Bouc à Martigues permet la transition, pour les pétroliers, entre la mer et l’étang, jusqu’aux raffineries de la Mède et Berre.

Avec la section d’Arles à Bouc, il fait partie de la liaison Marseille-Rhône, malheureusement empêchée depuis 1963, par un effondrement dans le canal souterrain du Rove. 

Martigues viaduc autoroutier 2018 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Georges Seguin (Okki)

Martigues_viaduc_A55 2008 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International, 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Wierzbowski

Et puisque le transport par la route a toujours prévalu sur le rail, la réussite et l’opulence du privé valant plus que le bien commun (entre 1995 et 2018, la France a investi deux fois plus d’argent PUBLIC pour la route et les intérêts particuliers que pour le rail), le pont autoroutier a remédié à l’étranglement du trafic par la nationale et le pont mobile ; un pont très esthétique, à béquilles, inspiré de celui de la Grande Duchesse Charlotte au Luxembourg, antérieur de seulement quelques années, d’une longueur proche de 900 mètres comprenant de part et d'autre, les viaducs d’accès à la partie centrale, aux 45 mètres de hauteur permettant le passage des gros navires. 

Martigues Pont basculant (levant) 2018 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Georges Seguin (Okki)

Martigues Pont levant 2018 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Georges Seguin (Okki)

Martigues_—_Pont_levant_sur_le_canal_Galliffet 2008 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Author Airair
Alors ? Martigues ? 

samedi 4 novembre 2023

MARTIGUES ENFIN (2)

 — ...Le jour dit, 29 octobre, de la part d’une Nathalie qui, sur fb, se souvient, Brassens aurait dit « Qu’importe ma vie ! Je veux seulement qu’elle reste jusqu’au bout fidèle à l’enfant que j’étais ». Nathalie illustre sa réaction avec un Titi parisien de 7-8 ans, un poulbot, un Gavroche presque, en culotte courte, au sourire gouailleur, chaque bras soutenant du majeur le cul d'une bouteille de pinard calée contre l’aisselle, pour papa, pas Gervaise j'espère, une photo n. et b. signée Henri Cartier-Bresson (1)     

C'est pas le tout... Et alors ? Martigues ?  

— ...Bien sûr que l’inspiration est un mix particulier entre la personnalité éponge de ce qu’elle ressent d’un présent submergé de passé, l’état d’esprit du moment, sa perception et conscience des générations antérieures, des plus modestes personnages familiaux, locaux, jusqu’aux signatures qui insufflent ou font autorité ; dans cet ensemble, la base bibliographique à portée importe, de même que la ressource actuelle, magique, offerte par l’Internet. Cet assemblage qu’on voudrait mosaïque, marqueterie, réagit, résonne lorsqu’on lui présente un matériau, une idée, un mot... et là, faut vraiment rester vigilant, disponible : ne pas rater le chaînon, enchaîner les jalons sans lesquels la veine se perdrait...

— Et Martigues dans tout ça ?  

Martigues Miroir_aux_Oiseaux 2023 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International, 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Benjamin Smith

— Alors, Martigues, Martigues... « Les Martégaux oh oh, de la Martiale... ». Pardon de mémoriser de travers, après vérification, ce sont bien les “ pescadous ouh ouh, de la Martiale ” chantés par Alibert en 1936 ! Formidable Wikipédia ! Pour présenter Martégaux et Martégales, ils invoquent l’inévitable “ Venise Provençale ” ; bof, on banaliserait presque suite à la surprise que nous fit Brassens... Par contre, à côté, la photo des barques “ aux douces couleurs ”, ces tartanes sœurs de nos catalanes (des chances pour que les plans de ces bateaux soient venus de Catalogne), finalement, rappellent qu’à Martigues, plus que des pescadous du dimanche, les marins-pêcheurs du lieu damaient le pion à Marseille (343 tonnes en 1842 !)... À quai, amarrées telles des juments patientes, Camargues cela va sans dire, chamarrées, les héritières des tartanes offrent au touriste plus qu’une carte postale : avec elles, ce sont les anchois, les sardines, les maquereaux, les thons d’une mer jadis riche... le parler sans fard des poissonnières. Qu’on doive associer à cette conque d’abondance, le prédateur insatiable en bout de chaîne, qui lui s’est cru malin d’avoir tout raclé, est vraiment regrettable. Derrière les barques, roses, ocres, pastel, les couleurs aussi douces des façades, rehaussées par deux extérieurs lie-de-vin. Quitte à passer pour un allumé du parler familier, la légende de la photo “ Le Miroir aux Oiseaux de Martigues ” a encore de quoi m’exalter, comme si le tableau n’y suffisait.  
Émile Beaussier Martigues musée_Ziem 1930 Domaine Public

Ziem_Félix Les Martigues Rentrée_des_tartanes Domaine Public Passeur Rvalette

Le “ Miroir aux Oiseaux ”, un des nombreux petits ports de Martigues, avec ses deux îles restantes, ses canaux, ses ponts qui lui ont valu, depuis Alexandre Dumas, le titre de “ Venise Provençale ” : le site comptait alors de nombreuses îles que le creusement du canal de Caronte supprima à partir de 1863. « Aux oiseaux oh oh... »... une légende raconte que des vignes poussaient devant les maisons et que, perchés sur ces treilles, les oiseaux se miraient dans l’eau. Légende, poésie, beauté ne pouvaient qu’attirer les artistes peintres : Eugène Delacroix (1798-1863), Camille Corot (1796-1875), Émile Loubon (1809-1863), Félix Ziem (1821-1911), Paul Guigou (1834-1871), Henri Aurrens (1873-1934), Émile Beaussier (1874-1943), Raoul Dufy (1877-1953), Vincent Manago (1878-1936).

(1) Mon commentaire : « je me reste fidèle... quand je ne serai plus là, le sale gosse que j'étais pourra le prouver... »... Libre vous êtes d'aller chercher la photo que je ne peux rendre publique. 

Martigues 2018 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 Georges Seguin (Okki)