samedi 10 juin 2023

SÈTE 1. D'ici et là-bas...

D'ICI. La Montagne de Sète.

Depuis sa plage de Pissevaches, il les devine seulement, patchwork en ville, piquées dans la verdure et les raides accès du Saint-Clair, les tuiles rondes, ces autres " toits tranquilles " où reposent au moins deux noms célèbres, Valéry et Brassens. Finalement, Brassens a poussé la modestie à ne pas demander un " cimetière plus marin que le sien ", et la supplique pour la plage de la Corniche n’a valu que pour une chanson... d’autant plus belle, entre nous, pour ne pas en dire plus sur sept minutes magnifiques à donner des frissons... un format hors normes que seuls peuvent se permettre les destins exceptionnels... Et quand l’harmonie des lieux s’en mêle, avec, à jamais, entre Valéry et Brassens, la route de la Corniche, plus en lien magnifié qu’en opposition, contour de la Montagne de Sète...

En demandant pardon à " l’humble troubadour " et au " bon maître " pour cette libre interprétation, nous terminerons, avec le lido qui rejoint Agde : côté mer, la nationale rétrogradée et le trait de côte, la plage rongée par les vagues ; côté étang, les vignes du sable, la voie ferrée et plus au sud, sûrement les campings des vacanciers.

LÀ-BAS. En bas de sa montagne.

Puisque nous avons fait le tour de l’Étang de Thau dans le sens des aiguilles de la pendule, abordons Sète, « Venise du Languedoc », depuis Frontignan, par le port, le réseau de canaux, les gros bateaux dont les mâts et cheminées dépassent le toit des maisons pourtant à étages de la ville nouvelle. 

Escale_à_Sète 2016 wagon-foudre Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Christian Ferrer

D’abord considérons la patchaque, l’embrouillamini accolé à son nom. Si les grecs la nommaient déjà  « τό Σίτιον όρος », la Montagne de la ville, les Romains « Setius mons » sinon l’occitan « Seto » bien que paronyme,  il a bien fallu toute une cordée d’hurluberlus sur presque deux millénaires pour qu’ après Ceta, Cetia, Cette, et un rapprochement avec le latin cetus, la baleine, et des marins croyant pouvoir assimiler le Mont saint-Clair à la tête renflée du cétacé sinon un cachalot (plutôt que la queue, je suppute), et encore Sette, Sète ne reprenne, en 1928, le nom officiel mais éphémère de 1793.  

Créé à l’origine en liaison avec le Canal du Midi pour exporter les produits de la région, le port était tout indiqué pour faciliter les importations, une fonction qui, à terme, va pleinement associer Frontignan. Formant certainement le seul site favorable à un établissement d’importance après Marseille, sa création sur le Golfe du Lion compta beaucoup pour Louis XIV désireux avant toute chose de se défendre encore contre l’Anglais (voir plus loin).

Dès 1839, une des premières voies ferrées arrive de Montpellier, en 1853 de Toulouse, et en 1857 le lien est fait avec Bordeaux et l’Atlantique, doublement si on considère la mise en service du Canal latéral à la Garonne (1856). Aujourd’hui plus que jamais la desserte du port (rail, route, autoroute, canaux) est un atout premier pour sa santé économique ; les investissements se poursuivent ; l’aménagement continue en gagnant sur la mer, en direction de Frontignan. D’abord le débouché du Canal du Rhône à Sète vers la mer (1988), ensuite une longue digue parallèle à la côte protégeant un vaste plan d’eau (2002) ; la Région gestionnaire compte atteindre 5,8 millions de tonnes à l’horizon 2025.

Le port a été le plus important au monde aux XIXe et XXe siècles pour le commerce du vin, ce qui n’est pas allé sans tiraillements, avec les tonneliers d’abord, dès que le transport en futailles a été remplacé par le transport en cuves, avec les viticulteurs ensuite, à cause de la concurrence déséquilibrée due aux importations de vins d’Algérie, d’Italie et d’allez donc savoir où encore (voir le naufrage à Frontignan du pinardier « Roger-Juliette » qui venait de Gênes)...

Toujours les coups en douce de gros négociants, copains comme cochons, qui plus est, avec les politiques au pouvoir de quelque bord que ce soit. Jean Huillet (né en 1944) de Valros, un des meneurs d’un Comité d’Action Viticole dans les années 80, n’a jamais nié avoir participé à l’abordage, dans le port de Sète, du pinardier Ampelos qui proposait un faux rosato, un mélange interdit de blanc et de rosé... allez donc le retrouver celui-là, qui a dû changer de nom et d’armateur pas net plus d’une fois... En 2013, les douanes allemandes ont alerté  leurs homologues françaises pour, dans le port de Sète, des citernes de vin bulgare artificiellement reconstitué à l’aide de glycérine de synthèse... 

Escale à Sète 2016 Marité_(ship,_1923)_and_other_ships the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Christian Ferrer



Escale_à_Sète 2022 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Broenberr

Sète pour les voyageurs, premier port à destination du Maroc depuis son terminal des ferrys. Sète, escale pour les croisiéristes. Sète pour « Escale à Sète », l’événement qui tous les deux ans voit un formidable rassemblement international de voiliers. Afin de les voir arriver de loin, parader toutes voiles dehors, les gens gagnent les hauteurs du Mont Saint-Clair pour des photos belles comme des tableaux. 

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