samedi 6 décembre 2025

De la côte SWAHILIE au CANAL de MOÇAMBIQUE (16)

 Autres détails sur ce vol sans problème : chicken, beef or vegetables (si j’arrive encore à tirer quelque chose de mon “ english ” trop scolaire et enfoui, à ne pas mélanger avec le teuton). Très bien préparé le plat… un conseil pourtant : ne pas prendre le bœuf à cause du couteau en bois, aurait-il honorablement remplacé le plastique. Et une Tusker ! Et pas un mot de français, ce qui, malgré la qualité de la bière, vaudra une deuxième étoile de moins à la compagnie kenyane desservant un département français... 

Île Mafia. 

Et oui, déjà la mousson. Pas de Zanzibar ourlée de plages, peut-être un brin de Mafia, l’île, pas l’organisation criminelle (j'ai cru avoir lu quelque part que des U-boot allemands y auraient été basés pendant la première guerre mondiale, mais rien au fil des ans n'est venu confirmer). Rien du survol non plus de Ngazija, la Grande-Comore. 

On dirait que le vol veut passer le plus loin possible de la province de Cabo Delgado au Moçambique où une peste noire, un cancer djihadiste menace de ses métastases toujours plus agressives comme au Congo et peut-être déjà en Afrique Australe, pour ne pas parler de l'Europe, de la F... Certes, au Sahel, au Nigeria, un peu au nord des pays du Golfe de Guinée, mais on ne veut pas en dire davantage, surtout par la télé d'État, aux infos. La règle est « Dormez tranquilles braves gens ! enfants que vous êtes, laissez-vous endormir, anesthésier... »
Dans « Des trains pas comme les autres », documentaire conviant de manière implicite à se dire que finalement c'est pas mal chez nous, récent de 2025, Gougler reste dans le “ tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ” ; il est plus facile pour lui, de rappeler le passé et la longue guerre civile de quinze ans suite à l'indépendance. À sa décharge, son sujet se limitait à ce que le réseau lui offrait, à savoir qu'il n'y a pas de voie ferrée sur les 500 kilomètres à vol d'oiseau entre Nacala et au nord, la frontière tanzanienne, la région des exactions, tueries, viols, enrôlements de force d'enfants-soldats. Normal de ne pas s'y risquer donc, mais un mot de la part du voyageur-vedette n'eût point été de trop...  
 
Sauf que le temps n'est plus aux cocotiers de la plage...

Une population jadis paisible ; ici elle reçoit des insecticides de l'aide internationale afin de prévenir le paludisme. Morts ? réfugiés ? démunis de tout ? Entre la fureur des djihadistes, les violences, dit-on, des soldats officiels, une collusion peut-être seulement de fait de Total Energie, que sont devenus ces femmes et enfants ? 

J'ai quand même regardé, avec intérêt, en quête de ce qui peut associer l'identité mahoraise à la côte swahilie et aux pays riverains du Canal de Moçambique. En plus de la nourriture, du masque de santal, du syncrétisme entre sorcellerie animiste et religion, de termes lexicaux partagés, tout comme partout, des peuples confondent leurs origines puisque les esclaves déportés à Mayotte étaient des Makuas du Nord-Mozambique, des Mushenzis ou autres M'shambaras jusqu'à la Tanzanie (1). 

Faut dire que jouant l'isolement de Mayotte pour ne pas rendre les gens plus intelligents, en fille sage de France 2, 3, 4, 5, “ soleil ”, Mayotte Première préfère aussi le nombrilisme à l'ouverture régionale (2)... 
Pas de survol non plus, d'Anjouan avec parfois Mohéli au loin. Bien visible, nous remettant à l’échelle réelle, avec ses limites cernables, une averse, peut-être un grain sauf que la photo n'a rien rendu... (à suivre)

(1) à Mayotte, évoquer un M'shambara revient à moquer un esclave plus esclave que soi, une distance sinon un humour bien féroce, comparé à celui, chez nous, lorsque le languedocien, l'occitan en général se font rabaisser en tant que patois...   

(2) infos pour le côté pratique, au-delà de la santé, de la culture, on reste attentif aux déconvenues et contrariétés, les coupures d'eau, les travaux et autres vecteurs d'embouteillages, sinon, du bout des lèvres, les barrages routiers de la population tolérés contre les descentes de voyous : aveu d'impuissance des autorités, les faits divers délictueux, plus pour relever qu'il ne faut pas se faire justice soi-même, que pour aller dans le sens d'une réalité des violences, éhontément réduite en sentiment d'insécurité... 

PS : pas plus tard que le 5 de ce mois, sur Arte, un reportage sur Ilha de Moçambique. 

vendredi 5 décembre 2025

Les NEIGES du KILIMANDJARO (15)

 La porte 16, c'est moins à part, plus pour une clientèle reconnue parce qu'en nombre, d’ailleurs ce n’est pas un autobus qui emmène pour un appareil distant sur le tarmac au milieu d'autres, proches parfois de vénérables aéronefs jadis fumants et pétaradants, de collection, réformés. Désormais nous avons droit à la passerelle télescopique directe vers l’avion. Étonnement aussi, nous sommes à l’heure, enfin, à dix minutes près. En attendant, avec cette histoire de carte d'embarquement, me retrouvant voisin avec un jean déchiré, de ceux qu'on porte pour travailler au champ (je n'ai plus l'âge d'être accessible aux modes), ma place au fond de l'Embraer pratiquement complet est perdue. Période rouge ou bleue, morte ou pleine saison, toute l'année, le monde bouge de plus en plus, c'est d'autant plus visible chez les îliens.  

À une autre échelle, le trajet Nairobi-Dzaoudzi me fait l'effet d'un Béziers-Fleury, à bien s'imprégner du cadre page après page, à en reconnaître les moments, les vues, à s'y reconnaître, s'y intégrer mentalement. 

Toujours le même plateau aux abords de Nairobi. 


Après les terres brunes des hauts plateaux (mais une saison verte doit bien revenir à savoir l'importance de la faune herbivore et ce que Karen faisait pousser dans sa ferme par là d' « Out of Africa »), le Kilimanjaro porte-t-il encore sa calotte de neiges et de glace ? 
La chanson Kilimandjaro... Qu'on soit africain ou méditerranéen, la neige c'est blanc, lumineux, frais, agréable longtemps l'inconscience de l'âge ne veut pas en voir les tourmentes, le danger, la mort, longtemps, l'ignorance empêche de savoir qu'il neige et fait froid au Lesotho. Pascal Danel (1944-2024) peut bien chanter « Il n'ira pas beaucoup plus loin... » et plus loin « ...il va mourir bientôt... », nous nous refusons à entendre que le blanc manteau de neige n'est qu'un linceul et puis qu'est-ce qu'on peut bien entendre, à danser le slow avec une fille agréable (la chanson est de 1966) ? Cet homme jeune qui va mourir, il ne se cristallise qu'avec le temps... oui, jeune vu qu'il pense en premier « dans son délire [...] à la fille qu'il aimait » ... la vieillesse “ dépouille ”... Que les neiges du Kilimandjaro lui fassent « ...un blanc manteau où il pourra dormir », c'est son truc... pardon d'être à l'âge où il ne reste des pensées que les branches nues d'un arbre sans feuilles, dont la verdure remonte à trop loin... Oh, une chose cependant, si tout fond là-haut c'est que nous l'aurons bien esquintée la Planète ! 
À peine le temps de réaliser l'injustice d'ignorer complètement le Mont Kenya bien alpin et pointu plutôt que bossu, avec à peine quelques centaines de mètres en moins mais quelques plaques de neige et petits glaciers aussi... il faut dire que les vols arrivent ou repartent de Nairobi surtout de nuit. 

Kilimandjaro, la montagne pleure, du rimmel coule sur son visage... 


Mombasa et l'Indien. Mauvais signe et confirmation puisque les neiges du Kilimanjaro émergeaient à peine de la ouate (était-ce le cas de tout l'ensemble de volcans ?), à vrai dire d'un trou improbable dans la nébulosité ambiante, les trains de nuages marquant déjà une inversion de la mousson : la saison des pluies (le climat équatorial du Kenya en connaît deux phases distinctes dans l'année) va nous masquer tous les bleus tropicaux des côtes coralliennes. (à suivre)