vendredi 9 août 2024

INDIEN des vieilles LUNES, le voyage en TCHÉCO (10)

Mercredi 19 juin 2024 (encore ? ) Toul. 

L'Hôtel de Ville, ancien palais de l'évêque ; beaux arbres dans le parc dont un gincko biloba de quelques deux-cents ans, classé “ arbre remarquable ” ; autour du bassin, des bégonias, fleurs antillaises que l'on doit en Europe à Michel Bégon, intendant de Louis XIV. 

13h 30. Quelle idée de penser qu’à une sortie de voie autoroutière correspond une entrée : il fallait traverser Ligny pour retrouver la N4, un kilomètre plus loin, sans plus. En faire treize en supplément, rien de grave, il n’empêche… En cause, tant le conducteur que le navigateur… Bien la peine de disposer d’un atlas routier si c’est pour ne pas consulter ! …

14h 15. Toul après quarante-sept minutes, dont une bonne dizaine à chercher où stationner alors que le long du canal, hors les remparts, un bas-côté à l’ombre d’arbres déjà anciens, n’attendait qu’eux. Bien agréable.

Rester à Toul, revenir à Toul, ne plus revenir sur ce qui déstabilise… 
Malheur, alors qu’il rédige, là-bas dans la cuisine, ABBA, la radio passe « The winner takes it all… » pour ne retenir que l’autre moitié « The loser’s standing small… ». Ne plus revenir à ces chagrins qui à huis clos prennent trop de place… Aussi réaliste sur le succès que lucide sur la portée de l’existence, Marcel Pagnol ne cachait-il pas son pessimisme sous ses personnages à l’allant léger :

« … Telle est la vie des hommes : quelques joies très vite effacées par d’inoubliables chagrins… Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants… » Marcel Pagnol.

Aux infos qui suivent, cette petite Lina, en Alsace, quinze ans, ils n’en cherchent plus que les restes, après dix mois de disparition, cette fois en Haute-Saône.

Et son cœur qui aurait tant de peine ? Non ! faut faire la part des vrais malheurs, de l’horreur faite homme… « C’est bien la pire peine… », même de savoir pourquoi, « … Ce deuil est sans raison… », VERLAINE le dit bien, les états d’âme, la préoccupation psychologique ne sont que surfaites, futiles comparées aux vraies détresses. Autant clore la parenthèse cérébrale :

« La vie ne vaut rien mais rien ne vaut la vie. » Alain Souchon après André Malraux. 


Toul, sous le soleil ; dépassant des fortifications à la VAUBAN, les tours de la cathédrale (1) appellent (XIIIe-XVe). Il faut l’aborder en contournant le chevet, par derrière, par un parc aux vieux arbres. L’hôtel-de-ville, ancien palais épiscopal, côtoie à la fois le parc et la cathédrale. 


 

Le cloître.

 

 À l’intérieur, une fraîcheur aussi appréciable que la sérénité du cloître attenant, sous un ciel pur. L’office du tourisme donne aussi sur le parvis. Disponibles, prévenants, les jeunes qui officient ont tôt fait d’indiquer les bonnes adresses où acheter un gâteau (après la journée, ils sont attendus à Colombey chez un neveu dont c’est l’anniversaire). Intra-muros, les gens se rafraîchissent aux terrasses des cafés ; malgré la chaleur, la petite ville reste bien vivante, avec pas mal de monde. 

(1) de style gothique flamboyant, bombardé par les nazis en juin 1940, elle a entièrement “ flambé ” (vitraux, rosace, orgue…). Revient en mémoire la mention des trois évêchés, Metz, Toul et Verdun (attention, des évêques qui arboraient l’épée et la crosse sur le blason !). Si le regard sur le passé accélère la succession de soubresauts d’inhumanité, entre protestants contre catholiques, entre influences française ou impériale pour des évêchés du Saint-Empire-Romain-Germanique ne parlant pas allemand, il faut bien convenir que ces pays au nord et à l’est de Paris, sans cesse écartelés, disputés par les puissants, ont toujours eu à subir les ravages des guerres… Pardon aux professeurs de jadis, pour ce ton apparemment détaché et ce souvenir des cours de plus en plus léger. 

mardi 6 août 2024

INDIEN des vieilles LUNES, le voyage en TCHÉCO (9)

Mercredi 19 juin 2024, Ligny-en Barrois. 

9h 20, 160 kilomètres parcourus, le temps s’éclaircit, Ligny-en-Barrois, vers l’est, la troisième cuesta du Bassin Parisien… il reste d’un de nos professeurs, pour expliquer ces sédiments en couches au fond d’une mer peu profonde, l’image d’assiettes empilées même si cela va de la soucoupe au plat plat, en passant par l’assiette-dessert et l’assiette plate (cuestas d’Île-de-France [Sézanne], de Champagne crayeuse [Vitry-le-François], Ligny-en-Barrois où de la sèche, crayeuse, dite aussi pouilleuse (cocasse de dire “ pouilleux ” pour les propriétaires de maisons prestigieuses de champagne grâce aux caves creusées dans la craie !), on passe à la Champagne humide, estampillée plus riche avec les dernières cuestas de Meuse [Toul] et de Moselle [Nancy]).

Statue_du_General_Comte_Barrois avant 1940 This file is licensed under the Creative Commons Auteur BHA37

Question aussi sur le Barrois, la micro-région, le plateau autour de Bar-le-Duc en suivant le cours de l’Ornain, à la vue de la statue, au centre de Ligny, de Pierre Barrois (1774-1860) (1), général fait comte d’Empire… et qui s’est battu à Ligny mais pas en Barrois, à Ligny en Belgique (16 juin 1815), prélude au désastre de Waterloo, deux jours plus tard.

Au bleu pâle du ciel qui revient, répond la qualité d’accueil de la ville. Au bord du port, l’aire camping-car est des plus agréables : un joli cadre avec arbres et herbe tendre, de l’eau à disposition, la possibilité de vidange même si les toilettes restent closes ; aussi le petit parking est presque complet et aussi tranquille que les maisons d’un quartier, chacun vaque chez soi. Sur le bassin, par contre, d’une bitte à l’autre, un homme enlève et rassure les amarres : il tient à remettre sa vedette matriculée en Australie dans le sens du départ.

Sinon, le bourg est calme. Comme en rapport avec la voie ferrée désaffectée, les gens sont rares, les vitrines en manque, les enseignes vaines (quelques unes renvoient aux kebabs ou pâtisseries turques). Les rues sont vides, les gens vont seuls : la femme qui rentre dans la supérette, celle qui cherche à se garer autour de l’église, la dame qui, à l’intérieur, remet de l’ordre dans les livres de messe et remet droit les cierges défaillants. 

Abrite les tombeaux des Luxembourg.

 
Quelques fleurs, quelques couleurs pour rehausser le gris des pierres.


Ligny-en-Barrois vitrail Notre-Dame-des-Vertus 2009 This file is licensed under the Creative Commons Author JI-Elle

Ligny-en-Barrois vitrail 4 Notre-Dame-des-Vertus 2009 This file is licensed under the Creative Commons Author Ji-Elle
 

Visiter les églises, il aime, parce qu’elles traduisent tout ce qu’il faut de ténacité, de courage, de foi, parce qu’elles disent les générations loin par le passé et qui méritent un respect certain. Plus que la croyance, la foi engage, les vitraux, la chaire de bois sculptée (attribuée  à l’école Ligier Richier) de Notre-Dame-des-Vertus en attestent.

À Ligny, la richesse des monuments dénote avec une réalité climatique classant le secteur en climat de montagne (hivers rudes, brouillards de l’automne et de mauvaise saison, comme pour le plateau de Langres et le Morvan). 

Ligny-en-Barrois,_Porte_de_France 2015 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Ketounette   
 
Parc_des_Luxembourg 2015 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Ketounette

Des portes monumentales (de France [1780], de Givrauval), des bâtiments publics historiques (la Mairie [aussi du XVIIIe, l'Hôtel des Fermes), la tour Valéran commencée au XIIIe marquant l’histoire pas facile d’une ville tour à tour aux Champagne, aux Bar, aux Luxembourg, sinon en faveur puis contre le roi de France (Louis XI confisqua le comté et en fit décapiter le seigneur Louis Ier), le vaste parc des Luxembourg jusqu'aux rives de l'Ornain. 

D’autres plaisanciers ont abordé le quai, genre retraités dynamiques, deux couples, tous en marinières de marins d’eaux douces (mais seuls les hommes manœuvrent). Leur pénichette du canal de la Marne au Rhin, pas si chette que ça, va vite échanger avec le boat australien, en anglais, of course… De temps à autre, une voiture libère un toutou pour sa balade… nul besoin de trop réfléchir pour faire cas des pipis-cacas qu’ils répandent, tout bons compagnons qu'ils sont…  

13h 30, sur un banc au soleil, le tondeur de pelouse prend sa pause-déjeuner avant de préférer l’ombre de l’édicule fermé.

Au revoir Ligny-en-Barrois, signes de la main avec les marins à l’apéritif… 
C’est vrai qu’à Ligny-en-Barrois, il y avait autre chose à voir que le savon et le produit vaisselle de la supérette.

(1(1) De 1903, la statue originale fut déboulonnée par les Allemands, pour des canons. Les moules sont retrouvés dans les années 90 et la municipalité charge les lycéens de Nancy de reconstituer le monument. Morceau après morceau, la statue sera à nouveau inaugurée le 15 novembre 2023.