lundi 18 septembre 2023

Du RIZ bio (1).

 De la Haute Camargue cultivée, fluvio-lacustre, recevant, par les roubines, les martelières (1), toute l’eau du Rhône nécessaire, résidus d’engrais et de pesticides descendent en aval jusque dans le Vaccarès. D’une longévité pouvant atteindre trente ans, les flamants méritent pourtant plus d’égards. En ce sens une initiative d’agriculture écologique promet pour l’avenir.

Au moins deux agriculteurs la promeuvent ; ils sont passés au riz 100 % biologique grâce à un petit ouvrier désherbeur capable de contrer la croissance opiniâtre de la panisse et du triangle, des adventices sauvages qui harcèlent et rudoient le riz domestique (2). 

Riso_Amaro 1949 Domaine Public Author Giuseppe De Santis, Otello Martelli. Uploaded by User Pizzaebirra2008 om Italian wikipedia.

“ Un petit ouvrier désherbeur ” ? Nous sommes loin de « Riz Amer » (1949) de ce cinéma italien aimé à jamais, depuis, avec Vittorio Gassman, le short moulant, la poitrine arrogante de Silvana Mangano (1930-1989) surtout... Dans la vallée du Pô si vite descendu dans sa plaine, c’étaient alors les mondines, ces saisonnières du riz jusqu’aux plus basses classes, plus exploitées, faisant tomber au plus bas le salaire (un des thèmes du film) : elles éliminaient à la main les mauvaises herbes, émondaient les rizières. Mais cette première moitié du XXe siècle est si loin, quoique, relativement loin seulement, pour ceux de mon âge, le temps d’une vie passant si vite... Et ces “ petits ouvriers ” ne sont pas non plus de cette main-d’œuvre immigrée venue d’Espagne ou d’Italie. 

Récolte_du_riz_en_Camargue 2009 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic license Auteur Bérichard

Tel que nous le présente, non sans malice, Bernard Poujol, le “ petit ouvrier désherbeur ”, n’a rien à voir déjà avec  les moissonneuses à chenilles, les roues “ squelettes ” des tracteurs. Ouf ! C’est d’autant plus rassurant que pour la taille des exploitations, les rapports avec l’argent de l’Europe, cette Camargue du riz fait plutôt penser à la Beauce qu’à la petite production du terroir, le peu de présence humaine aidant à ce qu’il n’y ait pas d’association pour contester la façon de conduire les cultures.

Ce “ petit ouvrier désherbeur ” nous vient du Japon, du moins l’idée. Passant avec le train, le fils de Bernard qui l’a vu à l’œuvre, s’est renseigné avant d’en parler à son père : dans les rizières nippones, ce sont des canards qui enlèvent les mauvaises herbes, l’heteranthéra plus particulièrement. 

(1) Les vannes, “ martelhières ” on dit à Fleury, en languedocien francisé. 

(2) La “ panisse ”, panic des marais dit aussi “ pied-de-coq ”, “ patte-de-poule ”, infeste les rizières. Elle absorbe 80 % de l’azote, abrite des virus mosaïque, accumule des nitrates dangereux pour les animaux. Seul l’émondage des mondines permettait d’en limiter les méfaits dans la plaine du Pô (voir “ Mon cinéma italien ” / Un Messager qui surgit hors de la Nuit 2). Le triangle est une variété de scirpes.

Camargue_brulis_chaume_rizière 2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Ddeveze


vendredi 15 septembre 2023

BEAUDUC & PIÉMANSON, plages de Camargue (fin).

Camping_sauvage  the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Lubman04

Sauf qu’aux temps des tolérances a succédé celui, plus corseté, de l’application des lois, de l’autorité institutionnelle. Ainsi, l’État, bien que jactant plus qu’il n’agit, s’est attelé un jour à régler le cas des cabaniers... Compte tenu des tergiversations, des désaccords sinon l’opposition entre les administrations centrales et locales, l’inertie se confondant avec le temps long, nous nous devons de relativiser cette volonté étatique. Pour être concret, chez nous, la deuxième moitié des années 70 a mis fin à la pratique du camping sauvage, d’abord à Saint-Pierre-la-Mer, ensuite à Narbonne-Plage et aux Cabanes-de Fleury où certains se sont ajoutés afin de profiter de quelques années supplémentaires. De leur côté, les Beauducois, loin de l’agitation estivale des stations nouvelles entraînant les anciennes, également revitalisées par le Plan Racine, ont pensé, non sans logique, qu’un long sursis devrait permettre à leur tribu perdue de continuer. Nonobstant, plutôt que subir, ils ont préféré se faire valoir en mettant en avant leur société originale pourquoi pas porteuse d’avenir, une attitude qui s’est muée en plaidoyer lorsque, en 1996, en la personne de Michel Barnier, l’État a refusé, proposée par l’ensemble des organisations de défense de la Camargue, la charte de protection globale, parlant de la pollution du Rhône, des rejets de l’agriculture dans le Vaccarès mais pas plus de Beauduc que de Piémanson. La nouvelle mouture de 1998, par contre, vaut un réquisitoire en règle contre les plages sauvages ; en dépit des efforts des associations, elle mentionne :

* ce littoral soumis à une trop forte pression touristique, le piétinement de la flore, le dérangement des oiseaux, l’envahissement par des plantes importées (griffes de sorcière). 

Dune_à_Carpobrotus_edulis 2009 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Lubman04

* la pollution, les épaves de véhicules et caravanes en fin de saison.

* la circulation anarchique.

* l’hygiène en absence de sanitaires, d’évacuation des eaux usées, d’enlèvement des ordures ménagères.

* le dérangement à la faune sauvage, la divagation d’une faune domestique, dont les chevaux.

 Et tout converge avec la fin du camping sauvage, l’illégalité de l’occupation par certains d’espaces en commun particuliers, sans y être autorisés malgré les règlements (Domaine Public Maritime, zones protégées, sites inscrits...). 

Plage_de_Piemanson 2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Author Charlottess

En 2004, vingt cabanons sont détruits dont deux restaurants. Et si à partir de 1975, les installations se sont comptées par centaines, il ne devrait rester que quelques dizaines d’installations peut-être de pêcheurs de poissons ou de tellines... Et même ces derniers sont incités à partir parce que les tempêtes, l’élévation du niveau de la mer, l’érosion marine alors que tout ce secteur “ engraisse ” et que l’alternance entre plages qui diminuent ou qui augmentent  relève d’une réalité (aux Saintes-Maries, il faut protéger la côte : la carte de Géoportail montre la côte dotée de très nombreux épis sur une longue distance. À St-Pierre-la-Mer, au sujet de l’aménagement de la station, le maire a fait état d’une régression au niveau de la plage de Pissevaches et d’apports au centre de la station)

Source principale : La gestion d’un grand site camarguais : les cabanes de Beauduc (openedition.org) 

Plage_de_Piémanson_IMG_9326 2009 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Author Roehrensee