Avant d’emprunter le sillon audois qui verse doucement vers le Golfe du
Lion, quelques pistes encore à l’ouest de l’Aude déjà au-delà de la ligne de
partage des eaux entre Atlantique et Méditerranée. Au départ de Quillan,
plus que le col du Portel (601 m.), c’est le village de Nébias qui matérialise le
versant déjà aquitain. Heureusement que les cours d’eau courent vers où ils
penchent ; à ces pays apparemment protéiformes suite aux aléas historiques,
ils dessinent une réalité physique qui repose des dénominations intriquées dues
par les aux hommes.
L’Hers[1] et ses affluents marquent en effet ce coin. Entre
les Pyrénées et encore un bourrelet montagneux (774 m.) que l’Aude a coupé des
Corbières, les plis est-ouest du Plantaurel semblent plus comprimés encore. Les
rivières ne les passent que grâce à de nombreuses cluses : une double pour
le Blau après Puivert, une série de trois pour l’Hers (L’Aiguillon, Lesparrou,
La-Bastide), deux pour le Touyré (Lavelanet, l’Entounadou [l’entonnoir]), deux
(?) pour le Doctouyré dont les gorges de Péreille.
Chateau Puivert Author Arno Lagrange |
Chalabre, au confluent de l’Hers, du Blau et du Chalabreil, capitale du
Quercorb (dit aussi Chercorb ou encore Cheircorb), se confondant avec le
Chalabrais des Chalabrois, à environ 25 kilomètres de la vallée audoise, est
difficilement accessible depuis Limoux. L’altitude semble modeste mais même
vers 600 mètres, la neige, plus fréquente en février, n’est pas rare sur les
cols peu fréquentés. L’appartenance de Chalabre à la Communauté des Pyrénées Audoises
est tout aussi révélatrice. Sur l’itinéraire depuis Espéraza, le village de Saint-Jean-de-Paracol
où Momon Billès (Fleury), je crois, passa quelque temps, pendant la guerre (encore
si je ne fais pas erreur… Mais qui nous dira maintenant que les témoins de sa
génération ne sont plus ?). La commune est classé village le plus pauvre
de France… Prenons garde d’abord qu’une statistique orpheline ne vienne fausser
notre ressenti… Et puis, gageons, à regarder de plus près la géographie locale,
qu’en plus de l’originalité de la situation, sur un col qui n’en serait pas un
car sur un vallon, que les habitants y sont riches d’une qualité de vie ne se
monnayant pas ! Le cours du Faby (Ruisseau de Fa), confluant avec l’Aude à
Espéraza, confirme cette originalité.
Chalabre
(qui a perdu, depuis 1836, plus des deux-tiers de sa population (1111 / 3529)) formait
un centre jadis très industriel, connu pour travailler le caoutchouc, la laine,
le textile, les chaussures, la corne, le jais encore, trouvé dans l’est du
Plantaurel ariégeois.
[1] Hers-Vif, principal
affluent de l’Ariège, 135 km du col du Chioula à Cintegabelle. A distinguer de
l’Hers-Mort, affluent de la Garonne, 89 km entre le Lauragais et Saint-Jory en
aval de Toulouse, plus mort du tout puisque plus jamais à sec depuis qu’il
alimente les cultures maraîchères grâce au barrage de la Ganguise.
[2] Si quelqu’un sait à
quoi correspond le Sarvatès ?.. Mystère…
[3] Le 16 juin 1289,
suite à de fortes précipitations, le verrou du lac de Puivert lâcha. Une vague
de submersion suivit le cours du Blau et détruisit Chalabre puis, s’ajoutant à
la crue de l’Hers, Mirepoix avec un millier de victimes. A Puivert, les terres
désormais émergées furent confiées à des usufruitiers devant, en échange,
défendre le château du suzerain. Une dizaine de nouveaux hameaux portant le
préfixe Camp- virent ainsi le jour.