LE COUSERANS.
«... Mountagno, cad’an coumo la sandoulo ... Montagne, chaque année comme l’hirondelle
Que tourno a soun nits quand ven lou printemps Qui revient à son nid quand revient le printemps
Ieu tourni en ço tiéu, e, luèn de la foulo, Je reviens en ton sein, et, loin de la foule,
Me vau rebrembar le miéu jouve temps... » Je vais oublier mes jeunes années...
Augusto Teulié (1861-1920)
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Laissons Montagagne d’où descendent mes ancêtres, une histoire de malnutrition sinon de ventres creux, de « Demoiselles » en guerre contre l’autorité oppressive interdisant les forêts aux défavorisés, pour pénétrer le Couserans où notre patronyme aussi est commun. Dedieu comme Paul (1933-2012), la petite sentinelle, arrière de Béziers et du XV de France qui y est revenu à la retraite et y repose ; Dedieu comme l’avocat de ce père qui, pendant onze ans, avait enlevé ses fils à la mère pour les élever en marge de la société, dans une ferme perdue ... .
Le Couserans, là encore le nom viendrait d’une tribu gauloise, les Consorans ou Consorannis de Jules César. En gros, même s’il déborde sur la plaine et s’il comprend le Séronais, c’est le pays du Salat et de son large éventail d’affluents : Alet, ruisseau d’Estours, d’Esbints, le Garbet, l’Arac, la rivière d’Alos. Autant de cours d’eau qui démarquent nombre de vallées riches de traditions, pour les principales vu que chaque ruisseau a la sienne et qu’ils se comptent par dizaines : de la Bellongue et ses nombreux villages ; du Garbet avec les eaux d’Aulus ; la vallée d’Ustou avec le ski à Guzet depuis 1960, le Cirque de Cagateille, le Mont Valier (par le ruisseau d’Estours) avec le seul petit glacier de l’Ariège, et ses ports vers l’Espagne accessibles seulement à pied, gardant le lien autant avec l’imaginaire qu’avec le passé ; la vallée de Biros avec la grotte de la Cigalère (concrétions de gypse uniques) et le gouffre Martel longtemps le plus profond de France et enfin la vallée de Bethmale où la prise de conscience ancienne a permis la sauvegarde des coutumes, des musiques et danses, des costumes traditionnels avec les fameux sabots pointus encore fabriqués.
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De l’eau partout, d’ailleurs il a plu pratiquement à chacune de nos visites. Cela laisse songeur alors que la terrible période actuelle de déficit pluviométrique, une sécheresse depuis le printemps 2022 suivie d’un été caniculaire, de l’automne en manque, est plus qu’inquiétante. Est-ce que la couverture neigeuse qui semble sauver les stations de ski dont celle de Guzet, au pied de la ligne de crête, frontière avec l’Espagne, suffira, au moment de la fonte ? Devrons-nous évoquer des conditions heureuses et un bonheur perdu par rapport au passé ? Le Couserans, c’était des eaux courantes, des torrents partout, des sommets, des lacs d’altitude, des cols empruntés par le Tour de France (Portet-d’Aspet, de la Core, De Lers, mur de Péguère...), des cirques de montagne, et leurs cascades, des myrtilles, le plaisir des fromages, d’un folklore de tradition avec le dernier sabotier de la vallée de Bethmale par exemple...
Le Couserans, terre des Mountagnols partis faire les moissons, les vendanges, ou colporteurs ou montreurs d’ours. Et à présent, où partir quand l’anthropocène, l’ère de la domination par l’homme des cycles naturels, opprime et affecte la planète entière ? Le Couserans, terre d’histoire qui vit les Demoiselles, les paysans, le visage noirci, déguisés en chemises de femmes, faire la guerre contre les abus des puissants. Peut-on faire un rapprochement avec la lutte antérieure des Camisards des Cévennes... et celle toujours d’actualité, contre la foutue réforme des retraites, une sacrée régression ?