lundi 28 novembre 2022

CHEVAUX DE GUERRE.

 Le souvenir des guerres passées et plus particulièrement, en novembre, celui de la première guerre mondiale, nous revient avec acuité à cause de ce qui se passe en Ukraine. Encore une " Grande " guerre, ce qui est certainement toujours en dessous de la vérité concernant la cruauté, la bêtise humaine, pour le dire poliment. 

Outre le fait que l'humain persiste à s'auto-détruire, ce qui, entre parenthèses, contredit  l'anathème aussi récurrent que simpliste des pays du Sud sur la coalition des Blancs pour exploiter les Noirs (d'ailleurs, à propos de la guerre d'Ukraine, ne les entend-on pas estimer que c'est entre Occidentaux, que cela ne les concerne pas ?), nous devons reconnaître que les bipèdes ont entraîné, sans scrupule aucun, nos animaux domestiqués dans ce délire mortifère. 

Si la réquisition des équidés marque particulièrement les esprits, n'oublions pas les chiens pour la recherche des blessés, les messages, la chasse aux rats, la garde puisque eux seuls pouvaient prévenir qu'à 100 mètres, de nuit, des ennemis approchaient en rampant (300 m. pour les meilleurs flairs), les pigeons voyageurs, les moutons envoyés paître pour déminer des zones dangereuses. 
Nous avons été particulièrement sensibles au sort des chevaux, plus partiellement à celui des traits demi-lourds ou lourds, mais tous, demi-sang, pur-sang, postier... ont servi à transporter les troupes, la roulante, le ravitaillement, les munitions, l'artillerie légère, sans compter, et ce n'est pas accessoire, qu'ils ont contribué au moral des soldats du fait de l'affection pour les équidés (3,4 millions de paysans mobilisés). Honorer nos morts certes (parmi lesquels 0,55 millions de paysans) mais a-t-on voulu des monuments pour exprimer la reconnaissance due aux animaux embarqués dans l'horreur ? 
Sous cet aspect-là, la ville de Saumur a un monument aux morts avec un cheval représenté. Quant au célèbre Cadre Noir, son allégorie de centaures, pour marquer la complicité homme-cheval ne me plaît pas du tout : une allusion, même lointaine, à la zoophilie peut-être, et puis trop d'officiers bornés (postérité de l'ancienne noblesse, de nombreuses familles à particule gardant une tradition militaire permettant de dominer, de commander même dans l'armée républicaine, et ce, sans qu'on puisse toujours imputer les défaites aux politiques...). 
Mon venin libéré, concernant la reconnaissance due aux animaux de guerre, les Britanniques nous font la leçon : avant l'engagement de 1914, leur armée comprenait des structures vétérinaires alors qu'en France il faut le concours d'associations pour soigner les chevaux blessés : en comparaison du respect pour les chevaux outre-Manche, cela tend à une insensibilité barbare chez les Français. 
A Saumur ne dit-on pas que le cheval qu'on a soigné et dorloté doit être versé dans la bataille sans hésitation parce que son sacrifice donnera une fin heureuse ?) ; à un jeune vétérinaire qui voulait ménager les chevaux épuisés, son supérieur n'a-t-il pas répondu " Avec un révolver, il a tout ce qu'il lui faut pour remplir sa mission " ? Et pour ajouter à ce triste constat, les Anglais ont malheureusement remarqué que les cavaliers français chevauchent des heures sans jamais descendre de monture pour soulager le dos des chevaux... 

Port de St-Nazaire, le paquebot Venezia, et, à quai les chevaux d'Amérique qui viennent de descendre. Licence Ouverte 1.0 Photographe Opérateur Z (code armée)


Et quand il a fallu importer des chevaux d'Argentine notamment, ceux des Français restaient tout le voyage à fond de cale avec des animaux morts qu'on ne pouvait enlever qu'une fois arrivés (les chevaux anglais ont droit à la promenade). Pour le passage de l'Équateur, la chaleur, la moiteur posant problème, aux deux ponts intérieurs, on adjoignit deux étages en plein air sauf que les animaux au niveau inférieur recevaient la pisse et le crottin du niveau au-dessus...   

Alors pour les décorations, pour les monuments, aux chevaux comme aux chiens, ce n'est pas de notre côté qu'il vaut mieux regarder. Même sur notre sol, à Chipilly en Picardie, le monument au cheval blessé est dédié à la 58e London Division...  

A côté de ce lourd réquisitoire contre l'armée (et non contre le paysan avec son compagnon de travail qui, au contraire marquait son affection pour l'animal, comme la plupart des soldats), avec un mot  pour les mules, mulets et les ânes (à qui on entaillait la lèvre supérieure sous une narine pour que leurs braiements n'alertent pas / de nombreux ânes périrent mitraillés, gazés, parce qu'ils montaient au front tous les jours), manquaient des détails sur la réquisition des bêtes. 
Dès le début de la guerre, avec 0,2 million de chevaux aux armées, on dut en mobiliser un demi-million chez les particuliers (2,8 millions sur toute la durée de la guerre, chevaux, juments, mulets, mules, ânes, au début de plus de cinq ans mais pris dès leur entrée dans leur quatrième année). 
Réquisition_chevaux Paris 1914 Auteur Agence Rol wikimedia commons domaine public


Comme pour les hommes, des affiches sont apposées, le maire doit recenser les bêtes. Le jour dit, les propriétaires doivent présenter les animaux concernés sous peine d'amendes et sanctions. 
Louis Bréchard, vigneron du Beaujolais, déjà sollicité ici même pour les vendanges, raconte que les paysans devaient faire courir leur cheval sur cinquante ou cent mètres, deux vétérinaires observaient puis auscultaient, prenant aussi les rythmes pour les poumons et le cœur. Sachant que le cheval s'essouffle s'il mange trop de foin, on ne lui donnait pas d'avoine ce matin-là, des fois qu'il puisse être réformé. En plus des hommes, on prenait le cheval qui recevait un nouveau nom ; le paysan, lui, ne recevait qu'un faible dédommagement (et ce sont les femmes qui ont maintenu les terres et nourri la France). 

A la fin de la guerre, l'armée a revendu les chevaux démobilisés avec une priorité donnée au propriétaire s'il se manifestait, c'est ainsi que le brave cheval de Bompas put, depuis Lyon, comme les chevaux dont parle Papa Bréchard, rejoindre son mas... il faut dire qu'il avait eu la chance d'être mobilisé avec le ramonet...

jeudi 24 novembre 2022

Une VIRÉE au PAS-de-la-CASE

Pays de Salt Roquefeuil_Espezel_Belvis Auteur Jcb-caz-11 licenceCreative CommonsAttribution-Share Alike 4.0 International.

Dans l'environnement voisin du département, en direction du Sud, on se retrouve vite en Espagne, juste derrière la chaîne des Pyrénées. Parfois c'est seulement l'occasion d'une escapade touristique par la Côte Vermeille, souvent le but est d'aller acheter à la frontière où les prix sont moindres. Au Perthus, les acheteurs font des affaires ; l'autre destination est la principauté d'Andorre. Si seulement l'agrément des paysages comptait autant, le trajet pour le Pas-de-la-Case est des plus dépaysants. Depuis Fleury, en voiture particulière et à condition de partir tôt le matin, la route des Corbières, Quillan, le Plateau de Sault permettent de rejoindre la vallée de l'Ariège et, par Ax, de monter en Andorre ; elle fait passer de la Méditerranée à la montagne, des vignes aux sapins, aux champs de patates, au plaisir exotique des vaches au pré et enfin aux rocailles de la haute montagne. Plus direct et rapide, l'itinéraire par Carcassonne-Pamiers-Foix-Ax est plus adapté s'il s'agit de faire des achats, en voiture particulière ou en bus pour un voyage organisé. L'accès au Pas-de-la-Case a été bloqué vingt jours, entre avril et mai 2019 à cause d'un éboulement... il est logique de penser qu'en hiver, à 2000 mètres d'altitude, la neige puisse fermer le passage...   

Dans ces années que les moins de cinquante ans ne peuvent pas connaître, avec le tabac et l'alcool, le principal motif reste la nourriture : beurre, sucre, charcuteries... Et les stations de ski s'offrent aux amateurs qui peuvent se le permettre. 

De nos jours, l'intérêt pour remplir le frigo ayant bien diminué (et L'Espagne étant plus accessible et plus intéressante), on va en Andorre principalement pour les cigarettes et l'alcool, pour des vêtements, chaussures, lunettes, équipements de ski et de sports divers... les habitués me corrigeront vu qu'il y a bien dix ans que je n'y suis allé, que le 22 juillet 2022 cela a fait vingt ans que j'ai arrêté la cigarette, que le pastis, c'est surtout s'il y a quelqu'un et que je n'ai à déclarer qu'une averse de neige un 5 ou 6 août de je ne sais plus quelle année...     

Pas-de_la_case licenceCreative CommonsAttribution-Share Alike 2.0 France. Auteur Cevenol2

Si vous envisagez d'y aller, ci-dessous, les quantités autorisées en douane, par personne (à diviser par 2 pour les mineurs exceptés l'alcool et le tabac qui ne leur sont pas autorisés) : 

Par personne 1 kg café ou 400g de soluble, 200g thé, 1,5 litre de pastis, 300 cigarettes ou 150 petits cigarillos ou 75 cigares, 75 g de parfum, 900 euros d'achats autres, 300€ d'achats pour les autres productions agricoles sans dépasser 2,5 kg de lait en poudre, 3 kilos de lait concentré, 6 l de lait frais, 1 kilo de beurre, 4 kilos de fromage, 5 kilos de sucre ou sucreries ou 5 kilos de viande. 

Les visiteurs qui dépassent les quantités autorisées s'exposent au paiement de la TVA s'ils déclarent et certainement d'une amende s'ils sont pris à passer en fraude. 

En amont de cet article, un reportage est passé à la télé sur le retour d'Andorre : des milliers d'euros d'amende pour trop de parfums, les douaniers qui courent en vain derrière des passeurs qui grimpent (ils ont fait mine de les poursuivre pour donner une image positive vu qu'ils étaient filmés... l'un des passeurs s'est quand même débarrassé de son ballot de cartouches sanglé avec du plastique collant en forme de sac à dos).  

Alors que la TVA est en moyenne de 20 % en Europe, l'Andorre attire avec son taux à 4,5 % (la part de ce commerce représente le 1/4 des entrées pour la principauté / une taxation de 10 % des bénéfices ayant ou devant changer cette situation). 

Au-dessus du_Pas_de_la_Case_-_panoramio Auteur Gilles Guillamot Creative CommonsAttribution-Share Alike 3.0 Unported.

Quand la cartouche du " chameau " ou du " cow-boy " vaut 36 euros en Andorre, il en coûte 56 en Espagne et 110 € en France, ce qui ne peut que stimuler une contrebande en plus du trafic international à l'arrivée des avions et, plus dangereux lui, celui des conteneurs dans les ports de commerce. 

Une loi prévoyait un prix qui ne pourrait pas être de plus de 35 % moins cher qu'en France et en Espagne, ce qui donnerait 71,5 euros par rapport au prix français, or les 36 euros correspondent, me semble-t-il à une différence de 35 % avec l'Espagne... le trafic peut se poursuivre avec, en corollaire, l'exploitation d'humains, tels ces mules quand on évoque la drogue. En septembre 2018, suite aux indications d'un randonneur, les autorités ont récupéré 150 cartouches cachées dans un orri, un des nombreux abris de bergers, côté français du Port de Rat (à l'autre bout de la frontière franco-andorrane). Toujours en 2018, en novembre, un passeur, "a priori originaire d'Afrique du nord" a été retrouvé inanimé à cause du froid. A l'hôpital il n'a pas été possible de le ramener à la vie. Sur place, le ratissage a permis de mettre la main sur une centaine de cartouches tandis que d'autres "contrebandiers" ont fui pour se réfugier en Andorre.  

Concernant la nécessité de devenir raisonnables, notons que la réalisation d'un aéroport de l'autre côté du Port d'Envalira a été abandonnée, de même qu'une jonction entre les domaines skiables de Granvalira et Porté-Puymorens. Vu la nouvelle crise de l'énergie et le changement climatique qui se confirme, on ne va pas s'en offusquer. 

Pour conclure, alors qu'avec l'hiver et la nécessité d'équiper son véhicule en montagne, du 1er novembre au 31 mars, ce qui constitue un surplus pour quelqu'un de la plaine, plutôt parler de l'Andorre pour ces étapes cyclistes spectaculaires du Tour de France ou de la Vuelta... en dépit de tous les signes de dopage...