samedi 11 octobre 2014

Fleury d'Aude en Languedoc / LE REPAS DE FAMILLE : LE DESSERT

Nous voici donc au dessert, quand le chocolat du gâteau colle à la cuillère et qu’on entendrait presque la blanquette pétiller de ses perles dans les verres, car chez nous, pas plus de goinfre que de goulu, à l’heure où l’artiste du jour se lève et commence à jongler avec le provençal de Mistral et sa traduction en français :

L'èrbeto dei frisons.
Mirèlha, escota: dins lo Ròse,
Disiá lo fiu de Mèste Ambròse,
I a 'na èrba, que nomam l'erbeto dei frisons;
A dòs floretas, separadas
Bèn sus dòs plantas, e retiradas
Au fons deis ondas enfresqueiradas.
Mai quand vèn de l'amor pèr élei la seson,
Una dei flors, tota soleta,
Monta sus l'aiga risoleta,
E laissa, au bòn solèu, espandir son boton;
Mai, de la vèire tan polida,
I a l'autra flor qu'es trefolida,
E la veses, d'amor emplida,
Que nada tant que pòu pèr ié faire un poton.
E, tant que pòu, se desfrisona
De l'embuscum que l'empresona,
D'aquí, paureta! que rompe son pecolet.
E libra enfin, mai mortinèla,
De sei boquetas pallinèlas
Frusta sa sòrre blanquinèla...
Un poton, puèi ma mòrt, Mirèlha!... e siam solets!
Mirèio. Chant V.

L’herbette aux boucles.
« Mireille, écoute : dans le Rhône,
Disait le fils de Maître Ambroise,
Est une herbe que nous nommons l’herbette aux boucles ;
Elle a deux fleurs, bien séparées
Sur deux plantes, et retirées
Au fond des fraîches ondes.
Mais quand vient pour elles la saison de l’amour,
L’une des fleurs, toute seule,
Monte sur l’eau rieuse,
Et laisse, au bon soleil, épanouir son bouton ;
Mais la voyant si belle,
L’autre fleur tressaille,
Et la voilà, pleine d’amour,
Qui nage tant qu’elle peut pour lui faire un baiser.
Et tant qu’elle peut, elle déroule ses boucles
(Hors) de l’algue qui l’emprisonne,
Jusqu’à tant, pauvrette ! qu’elle rompe son pédoncule ;
Et libre enfin mais mourante,
De ses lèvres pâlies
Elle effleure sa blanche soeur...
Un baiser, puis ma mort, Mireille !... et nous sommes seuls ! »



lundi 6 octobre 2014

Fleury d'Aude en Languedoc / O SOLE MIO...


Vendredi, il ne fallait pas rater Thalassa... même si ce n'est plus la musique d'origine, même si trop souvent les sujets ont un rapport plus ou moins distant avec la mer. Cette fois, pas question de louper Sète et l’Étang de Thau, surtout que nous en parlions voici peu.

La Lagune, le bassin de Thau, peu importe comment on le nomme, se dévoile avec ce pêcheur de Bouzigues qui rapporte des palourdes, des escargots pointus, des oursins, sans trop plonger au même endroit de peur de signaler ses coins. "E hisso !" comme il le dit lui-même ! Plus loin, il nous promène au rocher de Roquerols, celui des "Copains d'abord" "dans la grand mare des canards", chers à l'ami Georges.
La pêche encore avec Robert, natif de la Pointe Courte (Sète), qui affole les dorades autour des tables à naissain. Il évoque son grand-père qui l'emmenait en nacelle ; il parle des barques jadis nombreuses à manier l'arseilhère...
Mais l’Étang vit aussi avec son siècle et s'il eut, comme Brassens, mauvaise réputation, c'est du passé depuis que les sirènes veillent : oui, ces balises, ces bouées partout sur le bassin, les ruisseaux qui affluent, les canaux, dotées de capteurs, prêtes à détecter la moindre pollution. Les conchyliculteurs peuvent immerger leurs cordes. Est-ce pour cela que la maison Tarbouriech a su élever une huître d'exception exportée désormais en Chine, en Russie, en Thaïlande ? (1)


  
Avec Sète, "L'Île singulière" de Valéry encore surnommée la "Venise languedocienne" (2), le Pérignanais que je reste ne pouvait que vibrer en entendant parler des lamparos, des catalanes du thon rouge et des poissons bleus, des baraquettes du Mont-Saint-Clair, du temps des dimanches à la bonne franquette.
Sète où les vieux loups de mer ravaudent encore les filets en chantant le bel canto parce qu'ils n'ont pas oublié Cetara, la cité-mère, au sud de l'Italie. Dans les entrailles du Théâtre de la Mer, d'ailleurs, un peu comme là-bas, des grottes marines se visitent en barque.
Et puis, au levant, cette Méditerranée qui est la nôtre, aux couleurs reconnaissables entre toutes, sous son soleil à part...

Aussi, quand j'ai vu ce New-yorkais qui gobait des huîtres dans un restaurant du lido en disant "Magnifique", je me suis instinctivement demandé ce que je fais moi, si loin...   

(1) et dire que sur la pression des États-uniens qui ne l'autorisent pas chez eux (rien d'étonnant quand on sait le sagan qu'ils font pour le Roquefort !), ce coquillage doit être interdit aujourd'hui en Russie !  
(2) Martigues, entre l’Étang de Berre et la mer, connue en tant que "Venise provençale" si chère à Vincent Scotto...  

http://www.france3.fr/emissions/thalassa/diffusions/03-10-2014_260591

Photos autorisées : merci Wikimedia, merci flickr.