Pour couper court à des on-dit par ailleurs globalement acceptables, critiquerait-on encore la non-déclaration de catastrophe naturelle, il serait exagéré de toujours accabler la France sur la question de la crise sismique à Mayotte. Ainsi, les explorations sous-marines ne répondent pas toujours à des logiques de profit. En 2004, un profil bathymétrique complet de Mayotte a été effectué par le Marion Dufresne 2, navire océanographique. Cette campagne et l'analyse qui en a été faite par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) apporterait-elle quelques éléments sur les séismes actuellement ressentis à Mayotte ?
https://hal-brgm.archives-ouvertes.fr/hal-00870100/document
Pour ceux qui n'auraient ni l'intention ni le temps de lire, une synthèse sans garantie aucune !
Bathymay: la
structure sous-marine
de Mayotte révélée par l’imagerie multifaisceaux. (version de juillet 2006).
" Résumé
La campagne
BATHYMAY, effectuée en 2004 à bord du N/O Marion Dufresne 2, a permis de
réaliser le premier levé bathymétrique complet de la pente insulaire de
Mayotte.
L’analyse
préliminaire de la morphologie révèle l’existence de nombreux canyons, de
vastes déstabilisations de flancs et d’édifices volcaniques sous-marins. Des
falaises abruptes, dont certaines semblent guidées par des failles, limitent de
vastes plateaux sous-marins.
La campagne
Bathymay a mis en évidence deux mécanismes de déstabilisation du volcan de
Mayotte: la déstabilisation lente, issue de l’effondrement gravitaire de
l'édifice pendant le stade bouclier, puis la déstabilisation catastrophique des
flancs du volcan au stade post-bouclier..."
L’archipel volcanique des Comores
provient de la dérive de la plaque somalienne au dessus d'un point chaud [12,
26], dont on retrouve la trace depuis l’atoll des Glorieuses à 250 km au
Nord-Est de Mayotte, jusqu’au volcan actif de Grande-Comore à 250 km au
Nord-Ouest de Mayotte (Figure 1a)
|
hypothèse du point chaud. |
|
NDLR : sans être invalidée, l’hypothèse du point
chaud est remise en question. En cause, l’île de Mohéli, plus vieille
qu’Anjouan et pourtant plus à l’Ouest.
Si l’activité sismique était classée
comme « modérée » (séismes de 5 et 5.2 en 1993, de 4.1 en 2001), avec
les essaims de séismes de mai 2018 atteignant près de 6 sur l’échelle de Richter,
ce classement est sous-évalué. (NDLR : ce matin du 1er juin,
entre 6h 30 et 8h 30, déjà 5 secousses significatives : meubles hauts qui
branlent, cahots pour les tableaux accrochés aux murs !).
De même, si les épicentres étaient
situés au Nord et à l’Ouest, la série actuelle proviendrait de l’Est, à une
distance comprise entre 40 et 60 kilomètres (NDLR : une paire de points
apparaissent, sur certaines cartes, plus proches de la côte, au large de
Bandrélé notamment... N'en fait-on pas mention par souci d'apaisement ?
« … Par
contre, les flancs de l’édifice volcanique à l’extérieur du lagon restaient peu
connus. Des profils topographiques et des études sédimentologiques ont été
réalisées à partir de campagnes de plongées en submersible entre 1998 et 2003…/…Il
s’agissait en effet, pour la DAF de disposer de levés bathymétriques fins pour
le développement de la pêche hauturière à Mayotte… »
NDLR : relevons
entre parenthèses dans quelle mesure ces relevés n’ont en rien donné lieu à une
pêche désormais monopolisée par les armateurs européens, seychellois…
« … Les
levés ont été effectués du 7 au 12 janvier 2004 à bord du navire océanographique
Marion-Dufresne2 (Figure 2a). Ils représentent 750 miles de levés en mode mixte
(bathymétrie, sondeur à sédiment, gravimétrie et magnétisme) et 230 miles en
mode simple (sondeur à sédiment) à la vitesse moyenne de 13 nœuds. Au total, la
superficie de la zone cartographiée dépasse 8750 km²… »
« … La
cartographie d’ensemble du relief sous-marin montre que l’embase de l’archipel
de Mayotte dépasse 110 km de diamètre sur le plancher océanique, pour une
superficie de 10500 km² : cela implique que seulement 4% de la surface de
Mayotte sont émergés (Figure 2b). Les profondeurs insonifiées s'étendent de - 44m
(relief à l’Est de Petite-Terre) jusqu’à - 3767 m(à l’Ouest de Grande-Terre),
ce qui confère à Mayotte une altitude d’au moins 4400 m au-dessus de la plaine
abyssale. Les pentes se situent en majorité entre 4° et 20°avec des valeurs
maximales à 88° au niveau de falaises situées dans l’Ouest de Mayotte (Figure
2b). Au Nord et à l’Est, la barrière récifale borde des pentes continues
jusqu’à 1000m de profondeur, alors qu’au Sud et à l’Ouest, la barrière se
raccorde à la plaine abyssale par l’intermédiaire de deux plateaux sous-marins… »
« … Plus
de 200 reliefs coniques de petites dimensions (2 à 3 km de diamètre ) ont pu
être recensés sur la pente insulaire de l’île (Figure 3). Leur densité est
particulièrement élevée à partir de 2000 m de profondeur au Nord-Ouest (V1) et dès
600 m de profondeur à l’Est (V2) et au Sud-Est (V3). Ces reliefs coniques
s’élèvent de 100 à 500 m environ au dessus de la pente insulaire, altitudes
comparables aux reliefs volcaniques observés à terre; ils sont en majorité
isolés mais quelque-uns apparaissent coalescents. On note aussi que certains présentent
un sommet tronqué. Au pied de l’escarpement sub-circulaire au Sud-Est de l’île (S3),
deux cônes de plus de 400 m de hauteur sont observés à 600 m de profondeur (V3)… »
« … Les
reliefs «rugueux» ou «fripés» sont interprétés comme le résultat de déstabilisations
de flancs ou de glissements sous-marins de grande ampleur (S1 et S2). Ce sont
des avalanches de débris dont l’aspect est similaire, par exemple, aux «hummoky
surfaces» des glissements observés à Hawaii [18] ou en Polynésie [6]. Les
matériaux, issus des bordures des plateaux ou de la pente externe, se déposent
sur la plaine abyssale. Ces glissements sont particulièrement abondants en pied
de pente insulaire au Nord-Est et à l’aval de la plate-forme effondrée au Sud-Ouest… »
« … Les vastes avalanches de
débris peuvent également générer, selon les conditions de mises en place, des
séismes (séismes hawaiiens de 1868 et 1975) ou bien des raz-de-marée [18, 19].
À Mayotte, des indices existent en faveur de ces deux types de phénomènes, mais
les liens de cause à effet ne sont pas encore établis : on observe par exemple
(Figure 3) que les épicentres des séismes de 1936, 1941 (précision faible),
1993 et 2001 (précision bonne) sont situés non loin de glissements (S1 et S2)
ou de failles présumées actives (F1 et F2). De même, des transcriptions de
l’histoire orale de Mayotte font état de raz-de-marée qui auraient détruit des
villages du sud de l’île vers le XVIIème siècle [13].
La morphologie concave (S3) observée
dans le Sud-Est de Mayotte (Figure3) est interprétée comme la trace d’un
effondrement gravitaire de la totalité du versant (récif-barrière et flanc).
Les deux édifices de 400 m de hauteur observés au centre de la loupe d’arrachement
sont probablement d’origine volcanique et pourraient marquer le début de déstabilisation
de ce secteur. De tels écroulements catastrophiques liées à l’intrusion du magma
dans des flancs pentus sont en effet décrits dans d’autres volcans pour
expliquer l’origine de glissements.
…/… Les nombreux reliefs isolés de
forme sub-circulaire sont interprétés comme des édifices volcaniques attestant
d’une activité magmatique récente sur la pente insulaire. Ces reliefs coniques
présentent parfois une forme évasée au sommet, interprétée comme un effondrement
du toit de l’intrusion, car la présence de cratères est peu probable à ces profondeurs.
Discussion : À l’inverse des
canyons observés sur toute la pente insulaire, les zones de déstabilisation sont
préférentiellement situées au Nord-Est et au Sud-Ouest, alors que les «champs»
de reliefs volcaniques sont répartis au Nord-Ouest et au Sud-Est. »
« …/… La
partie Sud-Est de l’île se distingue à la fois par la présence de très nombreux
édifices volcaniques et par le glissement concave (S3) qui interrompt la morphologie
générale convexe de la pente insulaire. Sur Petite-Terre, des maars
pyroclastiques et des cônes stromboliens quaternaires à sub-actuels ont percé
le récif barrière [7, 27, 32]. La partie Est-Sud-Est de l’île représente donc
le domaine le plus actif et le plus récent de Mayotte.
La décompression brutale, marquée
par les failles normales au Nord-Ouest et les effondrements au Sud-Est, a
probablement participé à la concentration de l’activité éruptive récente dans
ces secteurs bien localisés, à terre (dykes etc.) et en mer (essaims d’intrusions),
comme cela est observé aux Canaries ou bien sur les flancs du volcan Kilauea à
Hawaii [1, 19]… »
NOTES tirées du document :
* Ennoiement progressif du lagon
depuis 11600 ans.
* Mayotte s’enfonce en moyenne de
0,19 mm /an… 10.500 ans pour que le centre de Sada (2 m ; d’altitude) soit
atteint…
* La partie Ouest du lagon est plus
profonde, 60 mètres en moyenne contre 30 à l’Est.