vendredi 26 juillet 2019

LE TEMPS NOUS A-T-IL POSÉ UN LAPIN ? / passé, chasse et nature.

Il y a encore 60 ans, plus qu'un mode de vie la chasse représentait une ressource non négligeable pour les familles, surtout concernant le petit gibier. En un demi-siècle, le rapport à la nature a  été chamboulé, les conditions de vie ont complètement été bouleversées, les mentalités ont suivi. 
Voilà une paire de mois, sur le bulletin municipal "Le Cagnard" de juillet 1998, un article sur la chasse au lapin signé par le président du syndicat de chasse, resté aussi dans les mémoires en tant qu'instituteur, aujourd'hui disparu (novembre 2018), Francis Patrac. 
Et pas plus tard qu'hier, la page la plus émouvante sur la détresse des lapins, il est vrai signée par une plume des plus prestigieuses, Maurice Genevoix. 

1939 Tableau de chasse aux lapins de garenne et autres gibiers. Wikimedia Commons. Auteur Unknown 1939.
Vers 1950 et même avant  : 

"... C’est encore l’oncle Noé qui avait ce chien étonnant nommé Picard. Lorsque sa sœur Marie-Louise et son beau-frère Jean Grillères (ça s’est produit au moins une fois, et lui, faisait comme si cela avait été habituel) décidaient de venir à Fleury manger chez eux, et que rien n’avait été prévu au menu, l’oncle et son chien – la chasse étant déjà fermée – allaient faire un petit tour dans les vignes voisines, à commencer par la grande vigne qui laissa la place à la maison Fabregas, au centre médical, et dans un mois … à la pharmacie, et ils revenaient dès que Picard avait pris un lapin. C’était l’époque où les  « garennes » (plur attesté in Petit Robert) étaient nombreux, sans pulluler comme ils le firent en 1942 : à cette époque, en une semaine, papé Jean en avait pris (les trappes étaient forgées à Villesèque-des-Corbières) quarante-trois !!! De quoi garnir le « riz au gras », les « pâtes en sauce », ou de les rôtir à la broche, alors qu’il n’y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent … et que la myxomatose, heureusement, ne sévissait pas encore..." 
Histoires de chiens, chapitre La Rentrée, Caboujolette (2008) François Dedieu.

Ce passage venait prolonger un constat représentatif des années 60 : 
"... La garrigue, en septembre, c'est l'ouverture de la chasse. Le premier dimanche, passées les dernières maisons, ça pète sur tous les coteaux. 
Les hommes crient, font le siège des buissons (1)[...] le plus vaillant (des chiens) investit la garrouille, les hommes le suivent au bruit du grelot. Affolé le lapin déboule. Les fusils tonnent, le lapin roule, stoppé dans son élan et finit dans la gibecière [...]
 La chasse au lapin est une chasse populaire. Chacun est sûr d'amortir le prix des cartouches : les lapins prolifèrent [...]. Dans la garrigue pas moyen de faire venir un mailheul (2)... "

(1) garrouilles de kermès.      
(2) jeune plantation de vigne. 

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