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mercredi 10 décembre 2025

Le ROCHER, les CHATOUILLEUSES (20)

Des oiseaux, des fleurs, le jaune des allamandas, le rouge des flamboyants et tulipiers du Gabon, le parfum douceâtre des frangipaniers, ne manque, au milieu, que le préfet en tenue « grand blanc ». Le taxi nous dépose dans cette atmosphère, 2 € la course plus un par bagage. De là il faut rallier le débarcadère, trois cents bons mètres séparent du « Quai Ballou » (1), abrité des vents de mousson du nord, au nom de famille visiblement originaire du sous-continent indien, installée à Mayotte depuis 150 ans (2). Abandonnée, l’imposante barre commerciale qui en jetait encore dans les années 90 : le débouché de la barge, l’excentration de la presqu’île par rapport à Petite-Terre, le développement de Grande-Terre, semblent en être les causes. Fini le temps où le Rocher restait synonyme de protection, de dernier rempart contre les razzias sakalaves, contre les sultans batailleurs d'Anjouan.  


Depuis le débarcadère, un catamaran de belle taille, échoué parce qu'éventré en plusieurs points, rappelle la puissance destructrice du cyclone Chido. De l’autre côté de la rampe d'accostage, sur un quai flottant, des gens semblent attendre un embarquement pour Anjouan.

En ce milieu d’après-midi, l’amphidrome n’est que très moyennement fréquenté. « La Chatouilleuse », l’autre bâtiment, termine sa rotation en sens inverse. « La Chatouilleuse », au nom bien trouvé puisqu’il représente et honore les femmes de Mayotte, les chatouilleuses qui pratiquaient afin de signifier à tous les envoyés comoriens qu’ils n’étaient pas les bienvenus, qu’il leur valait mieux rembarquer sans tarder (3). Ne voulant pas en faire trop, peut-être aussi par relâchement, quitte à me rattraper quand je récupèrerai les valises, je ne sors pas le téléphone pour la photo. (à suivre)

(1) en « kusi », la saison sèche des alizés, c’est le quai Issoufali au nord du Rocher qui est utilisé. 

(2) les échanges entre la façade occidentale du sous-continent indien et la côte Est de l’Afrique, de Zanzibar aux Comores, Mayotte, Madagascar et les Mascareignes étaient régis par l’inversion annuelle des vents de mousson. À “ l’époque moderne ”, c’est le tissage anglais demandeur de coton qui a provoqué la misère et l’émigration des Karans et Banians sur les voies commerciales assurées par des boutres. Claniques, ces sociétés matériellement aisées, restent marquées par l’endogamie et l’homogamie des mariages “ arrangés ”. (Qu’une “ Indienne ” au chaperon couvrant la tête et les épaules, me passe son stylo oblige à revenir sur ses façons de voir…).

(3) À la vision de résistance liée au Rocher de Dzaoudzi, en tant que bastion ultime, nous nous devons de joindre l'action des femmes de Mayotte : face à la France se lavant les mains de déshériter, de brader des terres “ volées ” aux locaux, de trahir,  suppléant les hommes, embarrassés de ne pas se mettre la métropole davantage à dos, la position de Mayotte étant des plus délicates, ce sont les femmes qui ont infléchi, pesé pour un le futur de l'île. Pardon de n’avoir retenu que “ les trois Z ”, Zaina Meresse, Zakia Madi, Zéna M’deré et Coco Djoumoi, parmi les meneuses d’une centaine de femmes organisées en commandos de protestation ; avec les chatouilles, elles passaient aussi les nuits à jeter des cailloux sur les toits de tôle rendant ainsi le séjour des officiels comoriens insupportable. L’Histoire est d’autant plus émouvante que les hommes, face à la volonté française de transférer le pouvoir politique à Moroni, se retrouvaient alors tout à fait réduits à l’impuissance.


mardi 2 septembre 2025

Carte Postale de Mayotte 3

Chiconi le 14 avril 1998 (pardon de les prendre dans le sens où se dévoilent les archives de papa). 

La_barge_à_Dzaoudzi_(Mayotte) Petite-Terre au fond, 2017  under the Creative Commons Attribution 2.0 Generic license, auteur Jean-Pierre Dalbéra Paris.

« ... Il y a des moments où on peut regretter la lenteur du trajet entre Grande et Petite-Terre. J'étais dans cette situation à cause, dans le bleu du ciel, au delà du Rocher de Dzaoudzi, la silhouette d'un Transall blanc qui grossissait (j'ai dit vert dans un précédent post... mystère 27 ans plus tard...). Avec la lourdeur et la fausse lenteur d'un hanneton, il abordait la phase finale du vol, l'approche de la piste de Pamandzi sans qu'aucun bruit ne l'annonce, le vent de mousson venant du nord-ouest. Sans plus remarquer la mousse pétillante de l'étrave, sans plus méditer sur Mamoudzou dans sa verdure sous un gros cumulus d'orage, plus question alors de se laisser au charme de la traversée en barge, observer les îlots rocheux des Sept Frères, les vagues du lagon, ses semblables, les originaux, avec discrétion, plus à la dérobée, les tenues, les jolies femmes, ne soyons pas hypocrites. Sinon, d'ordinaire, je me dis « A la mar dou faire bon ! » (il doit faire bon à la mer) en pensant au Golfe du Lion, à Saint-Pierre ; réflexion au village accablé de chaleur, qui réjouit les enfants de la chance d'y aller, qui passe mal pour ceux qui n'iront pas. 

Anticipant le débarquement dans le ronron du gros diesel, je remarque un deuxième avion à l'approche, un autre Transall, vert armée celui-là, plus doryphore que le premier (27 ans plus tard c'est donc qu'ils étaient deux... venaient-ils tous les deux de La Réunion ? mystère encore...). Sur le coup insensible à l'atmosphère de l'île, le relatant, je réalise combien elle est devenue familière sauf que ce jour-là mes pensées étaient surtout tournées vers un fils qui arrivait ; vers l'aéroport vite vite. 

Vite, le taxi, c'est plus aisé sans bagages, vite qu'il soit plein pour partir sans tarder ! La course sera rapide. les gros coléoptères de l'armée stationnent en deçà de la zone civile. Trois cents mètres de marche rapide, à en oublier la suée, la moiteur, les ondulations des graminées au vent. [...] Qu'ils sont beaux ces appareils à l'arrêt non loin des herbes mouvantes ; comme craignant de ne plus voir ce qui se passe, je contourne dare-dare l'aéroclub, retrouver les avions, les artilleurs, déjà rangés, alignés eux aussi. Leurs tenues tranchent à peine mais les képis dodelinent, massif de pivoines noires. Surpris, désappointé ; où est le visage aimé ? une chatte n'y retrouverait pas ses petits... les fils de France font corps sous l'uniforme. Inquiet, accroché au grillage, je me sens impuissant à patienter par force quand, quelle veine ! en dernière position de la première colonne, il me fait signe du bras, à vingt mètres à peine ; le bataillon fait face aux avions, une énième colonne dodine du képi bien à soixante mètres. 150 têtes dont celle qui m'a trouvé ! la baraka ! il a dû s'exclamer « mon père » puisque les autres se tournent vers ma personne. Stani s'avance autorisé... Un officier a entendu, l'a permis ; allant à sa rencontre, je pénètre dans l'enceinte militaire : embrasser sa belle carcasse, prendre dans les bras comme avec papa aux moments trop nombreux des séparations, dans une étreinte qui a le mérite de camoufler l'émotion « Mon fils comme je suis content de t'avoir là ! »... Oh ! m'avancer en zone interdite ! c'était cavalier de ma part ! Mes pensées pour l'officier... l'armée sait rester humaine. La rupture ne vaut-elle que pour l'instant heureux des retrouvailles ?  

Glorioso_Islands_Map 2006 under the Creative Commons Attribution 2.0 Generic license Author Mr Minton
  

Hier il s'est envolé pour les Glorieuses, de ces Îles Éparses dont on voudrait nous déposséder. Le Transall a dû survoler l'équipe de pêcheurs revenant du Geyser, vingt minutes pour lui, dix-neuf heures sur mer. 

PS : marahaba niengui (merci beaucoup) pour les jolis timbres de vos envois.  

mercredi 27 août 2025

Carte Postale de Mayotte 1.

 

Mayotte. Avril 1998. Visite d'un fils à son père : 

« ... Côté balade, nous avons parcouru la côte nord sous un ciel mi-couvert qui rendait la température plus supportable. “ Tahiti-plage ” (Mtsanga Mtsanyouni pour rester local) nous a fait son coup de charme au soleil couchant. Un samedi, alors que je le croyais de permanence, mon fils a appelé de N'Gouja, la plage aux baobabs et tortues. Il y avait passé l'après-midi avec deux copains suite à un trajet bon enfant en taxi-brousse. J'ai retrouvé Stan, ses collègues David et Christophe, devant une THB. au bar. Petit partage de mots shimaorés pour militaires intéressés sauf que le cours a tourné court : ravissante, la serveuse a inspiré des compliments bien sentis de la part de nos gaillards pavanant dans une surenchère de rires joviaux et sourires enjoués. Mention Bien pour les trois, TB pour la jeune femme même si le mérite en revient à une jeunesse d'insouciance et de joie de vivre... C'est alors que Monsieur le Préfet et Madame ont débouché pour prendre place au restaurant, venant certainement d'un des bungalows cachés sous les cocotiers. Je ne m'y attendais pas mais avec le recul en y repensant, sans que cela soit une promiscuité, la petitesse de l'île favorise une proximité entre « ressortissants » comme disent les autorités non sans une maladresse indécente. N'Gouja reste un lieu où il est de bon ton de montrer une aisance de circonstance, sa tenue “ petit blanc ” relax sans être négligée. 

Ngouja_Beach_(Mayotte) 2016 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic license. Author VillageHero from Ulm Germany

 Dans la chaleur de la nuit, les corps passablement dénudés de nos trois garçons dénotaient même si elles n'avaient rien de provocant. Que ne pardonnerait-on pas au jeune adulte que chaque homme fut à son heure ? Moi, j'étais moins pardonnable, non pour le tee-shirt comme M. le Préfet mais pour mon bermuda de baroudeur déparant la soirée tropicale feutrée. Sentiment dégrisant de la jeunesse évanouie bien que palpitante encore d'autant plus à cause de cette complicité avec la génération montante. 

« ... Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse, 
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà, 
De ta jeunesse ? »

Être ? avoir été ? regrets ? remords ? Personne n'accepte de gaieté de cœur que vieillir est la seule façon de ne pas mourir. Jeunesse récurrente. Platitude. Quoique sans être écorché vif, qui n'a pas subi un trouble intime, une égratignure, un coup de griffe dans sa mémoire sentimentale, charnelle, toujours lancinants ? 
Il ne nous restait plus qu'à quitter ce lieu de détente tropicale, à pas lents et mesurés, plus lourds, me concernant. 
Dimanche de Pâques : avons parcouru la RN1 Mamoudzou Dzoumogné avec un arrêt à Longoni. le déchargement du cargo M.S.C. Sandra allait bon train. Un mois en arrière, le Mermoz avec Jean-Louis Chrétien, Yves Coppens, faisait escale à l'occasion de la croisière des explorateurs. 

Les barges se sont croisées. Ici vers Grande-Terre.

Vendredi de cette semaine, Stani n'était pas à la barge de 20 h 15 : je m'en suis retourné, gros Jean comme devant ; cabossée, sinueuse, la route du col d'Ongojou ne m'en a paru que plus longue. Cela fait bien une paire de fois. Ah ! les enfants, la jeunesse, tout est pardonné dès qu'on les retrouve. S'il appelle qu'il barge ou va barger, nous nous retrouvons au bar du 5/5, là où Georges Bouscasse nous régalait de ses imparfaits du subjonctif. Stan bénéficie d'une longue permission avant le départ aux Glorieuses, le 14 ; je me suis aussitôt désisté pour la partie de pêche au banc du Geyser programmée par Renato revenu nous voir jusqu'à début mai. 
Que nos épisodes mahorais vous trouvent en bonne santé, 
gros poutous, JF.    

vendredi 16 août 2024

INDIEN des vieilles LUNES, le voyage en TCHÉCO (15).

Barge / Florian.

Mercredi 14 août 2024. 3h 30. C'est ce matin. Tout en bas, à Mayotte, ils sont dans la barge, c'est aujourd'hui l'envol, leurs trois cœurs qui changent de pays. La fille qui l'accompagne, qui aujourd'hui accompagne leur fils jusqu'à l'avion puisqu'il s'envole étudier à la Réunion ; Florian, pas encore dix-huit ans, quitte le nid... nouvelle vie, un studio... pourvu qu'il ne fasse pas de mauvaise rencontre... et lui, tout en haut, au bout de l'Aude, à faire réviser ses organes moteurs, à faire profiter sa vieille maman (du 4 décembre 1924) de la maison paternelle, si pleine toujours, de son homme jusqu'au bout aujourd'hui disparu (grand-père et père né le 31 juillet 1922). D'habitude, le mal de dos le réveille mais pas si tôt ; cette fois, c'était dans l'épaule, nerf coincé ou rhumatisme remontant dans la nuque ; idée du paracétamol, sauf que c'est parti comme c'est venu, non, il ne faut rien en déduire, faut pas analyser, c'est comme ça, pas un signe de quoi que ce soit, peut-être simplement psychosomatique, le physique et le mental indissociables.

« …Mon enfant, mon petit
Bonne route... Bonne route
Sur le chemin de la vie
Nos deux cœurs vont changer de pays. » Reggiani. 

Non, Serge, juste un nouvel équilibre à trouver, la tristesse certes y voit une déchirure, pourtant faut pas laisser le cœur s'emballer dans cette impasse, faut le poser, le calmer, le raisonner, tant que la vie le porte, lui et ceux qui lui importent, tout continue à condition de ne pas se laisser embarquer sur le mauvais chemin, morose, stérile... Surtout qu’il faut penser d’abord penser à celui parti se coltiner aux aléas de la vie, pour lui qu’il faut se faire du souci. Dix-sept ans seulement, du jour au lendemain, une première fois brutale, seul dans un studio, à meubler. Au moins qu’il ne lui arrive rien, qu’il reste en vie... la sienne est aussi la leur... Les enfants quittent le nid un jour, à chacun son itinéraire, mais le voyage commun doit se partager jusqu’à l’échéance ultime… La vie n’est qu’une plaisanterie se finissant toujours mal mais qui s’accepte tant que la logique de la vieillesse prévaut, tant que les vieux partent les premiers… 

Dassault_Rafale_C_‘122_4-GA’ 2017 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic license. Author Alan Wilson

Mercredi 14 août 2024, dans un jeu télévisé suivi, la candidate a gagné 20.000 € pour n’avoir pas oublié les paroles de Reggiani sans qu’il y ait quoi que ce soit à déduire, c’est comme ça… Mercredi 14 août 2024, deux Rafale se percutent au-dessus de Colombey-les-Belles causant la mort d'un capitaine-instructeur et de son lieutenant-élève (l'autre pilote est retrouvé sain grâce au siège éjectable. 

Flo envoie des photos de l'aéroport. Départ prévu à 9h 20 (8h 20 au bord de la Méditerranée, 10h 20 à la Réunion).

Alors, cette remontée du Rhin fera-t-elle diversion ?

C’était un 20 juin, une étape entre Colombey-les-Belles et Francfort, par le Luxembourg, la Moselle et le Rhin. 

la Tour des souris du château Ehrenfels 2008 Domaine public Author Brühl

Un méchant archevêque aux greniers débordant de blé, refuse toute aide aux affamés... Alors que, les entendant mourir, il moque leurs gémissements de souris, des rats surgissent de partout et poursuivent le prélat jusque dans la tour de l'île où il sera dévoré vivant. Une légende qu'on pourrait rapprocher de celle du joueur de flûte de Hameln, encore à propos d'une invasion de rats. Les légendes ne procèdent pas d'un claquement de doigts, même plus ou moins transposé, le réel en est toujours à l'origine, au point de logiquement en déduire que les populations ne pouvaient rien contre la prolifération des rongeurs, les famines, les pandémies de peste, la prédation soldatesque. Quant à l'archevêque, il se retrouve archétype du favorisé exploiteur. La légende le punit ; en guise d’exutoire aux vaines rancœurs du peuple, elle venge les gueux, aussi virtuellement qu’une promesse de paradis… 

Sur cet îlot dépendant plutôt du château Ehrenfels, sur l'autre rive, bien que Bingen en soit propriétaire, la tour et un bâtiment des douanes prélevaient un péage, ne serait-ce que sur les marchandises. 
Sur l'autre rive, la droite, sur la hauteur de Rüdesheim-am-Rhein, le monument, le Niederwalddenkmal (38 m. de hauteur, 75 tonnes), à la gloire de l'unité allemande sous Guillaume Ier empereur... exceptionnel de la conception, à sa réalisation (1877), en passant par la souscription, le monument dominé par Germania (12,5 m.), la statue symbolise la dignité d'une nation qui, suite à sa victoire sur la France, retrouve à jamais “ le Père Rhin et sa fille Moselle ”... Décédé vingt ans auparavant, Heinrich Heine aurait-il célébré une Germania aussi blonde que la Lorelei ?

Frankfurt_Airport_Lufthansa_Boeing_747-430_D-ABVZ_(DSC09573)2023 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Author MarcelX42

Ils dépassent Mainz, capitale du land Rhénanie-Palatinat (presque en face de Wiesbaden, capitale du land de Hesse).  
145.572 km., 19h 10, Florian a guidé sur cette route 43 à Raunheim, à gauche de leur itinéraire. C’est qu’il veut “ spoter ”, comme disent ces amateurs jamais lassés des aéroplanes (1), à savoir multiplier les vues et vidéos suivant le type d’avion, les compagnies et il y en a toujours un qui doit se pointer, qui vient de loin, un gros qu’il ne faut pas rater, surtout aux abords d'un des aéroports les plus fréquentés d'Europe, celui de Francfort. Le coin n’est pas choisi au hasard, par vent d’est, c’est ici que les appareils à basse altitude survolent en vue de l’atterrissage, sur deux trajectoires parallèles ; en bordure de Raunheim, la ville bordière, un énième giratoire permet de stationner là où une sortie “ de service ” peu passante donne aussitôt sur une forêt (2) où seuls quelques promeneurs ou cyclistes vont prendre l’air.

Le temps ne pressant en rien, ils ne repartent que deux heures plus tard (21h), après avoir soupé. (à suivre)

(1) Mayotte a longtemps dit « aeroplani ». 

(2) Une forêt allant jusqu’aux pistes de l’aéroport ; dans son sein, un lac qui semble ouvert aux loisirs, simplement nommé « Waldsee », le lac de la forêt (source Google Earth). 

samedi 10 août 2024

INDIEN des vieilles LUNES, le voyage en TCHÉCO (11)

Mercredi 19 juin 2024, Toul, Colombey-les-Belles (enfin !)…

Retour par cette même porte de Moselle, le pont sur le fossé où un jet d’eau donne une sensation de fraîcheur. Aller voir les cygnes et canards en suivant les douves intéresse autant les petits que les grands. 

 

Les canards se tiennent loin des cygnes qui font la loi, néanmoins, plus rapides et habiles, ils arrivent à chaparder quelque provende sous le bec puissant des grands oiseaux. Les cygnes viennent à la rencontre des visiteurs sur la berge… On dit que ce n’est pas une bonne chose de leur donner du pain, que leur régime alimentaire est constitué de végétaux… Justement, il a une endive qui traîne dans le frigo du camion suite à celui de la maison… Une endive, une verdure à part, plutôt blanche et jaune. Premier lambeau, premier bec à barboter, premier rejet indisposé. Deuxième essai, même résultat. De part et d’autre, on persiste. Mais c’est que le cygne secoue la tête, chez les hommes c’est dire non. Et cette endive qui va encore embarrasser jusqu’au sac poubelle… Le cygne bécote à présent quelques brins sur le bord, pour les rejeter aussitôt : « Faut te faire un dessin ? », de sa part, ce ne peut être plus clair. Alors là ! le plus intelligent des deux n’est plus celui qu’on croit…

De l’autre côté, la Moselle venue faire un tour au pied de la Côte de Meuse. Dans ce détour, elle décrit un coude à l’ouest avant de regagner son céans tracé sud-nord. La Meurthe lui aurait-elle pris son lit ? Mystère que ces rivières qui se capturent, se libèrent. 


 


Non, ce n’est pas la Moselle, plutôt un canal puisqu’un pousseur remonte une longue barge assez chargée à voir la ligne de flottaison (1). Canal de la Marne au Rhin ? Et non « Moselle canalisée », avec des sections navigables, d’autres non, ce qui n’a pas gêné le long convoi sous pavillon hollandais… Les Pays-Bas, un pays de canaux et de mariniers ; à l’arrière, une grue pour descendre la sinon les deux voitures… 


C’est beau, impressionnant de regarder cette avancée tranquille jusque dans l’écluse même si le préposé aux amarres a besoin de nombreux essais pour saisir la grosse bitte au lasso… Nous voici doublement loin de « L’Homme du Picardie » (2) sur son automoteur de 38 mètres, le gabarit Freycinet, comme pour les péniches du Canal du Midi dans l’escalier d’écluses à Fonséranes ou celles de la Robine à Narbonne, encore dans les années 60, vers ou depuis Port-la-Nouvelle, alors que le transport fluvial voyait ses jours comptés…

Vers Colombey-les-Belles, les bouleaux témoignent d’une zone climatique froide (au Canada, en Alberta, ils ne résistent pas au changement climatique). 

De quel sculpteur ? Avec la cathédrale comme objectif premier, on passe à côté de bien d'autres richesses... (si quelqu'un veut bien nous en dire plus, en commentaire à l'article...)

Colombey-les-Belles, « aux belles femmes » disaient-ils en 1779, un village lié au sel, aux essarts (défrichages), à l’argile de poterie, des tuiles et pourquoi pas des moulages inspirés par des courbes féminines… Dans le parc des évêques à Toul, n’en avaient-ils pas eu un aperçu des plus parlants ? 

Et Jules le petit neveu, petit bouchon encore mais qui sait dire « encore » pour redemander encore et encore du gâteau ! 


(1) engrais ? sable ? minerai ? ferraille ? matériaux ? fourrage ? combustibles ? produits chimiques ? En octobre 2021, Les VNF (Voies Navigables de France) de Pont-à-Mousson ont établi le plan de transport d'un énorme moteur parti de Champigneulles pour Rotterdam : 310 tonnes pour le convoi, un chargement de 70 mètres sur 11 sur une barge de 120 mètres avec un seul point délicat, un tirant d'air de 3 mètres seulement nécessitant de remplir les ballasts de la barge...   

(2) Tourné en 1967 avec Christian Barbier (1924-2009), Yvette Étiévant (1922-2003), diffusée en 1968, la série la plus vue de l'ORTF (rediffusée en 1973, en couleurs).       


mercredi 26 mai 2021

Un vieil Indien dans la ville, version mai 2021.


Ah les voyages ! Il faut pour le moins s'en accommoder et en définitive se dire que si l'avion ne fait pas demi-tour à cause d'une panne, s'il ne tombe pas, si un pirate ne le détourne pas, ce n'est pas vital s'il atterrit en retard. Et que si on arrive, au bout du compte, même un jour après, ce n'est pas si grave. Et pourtant, les retards et contretemps ne peuvent qu'être sources de stress même si ce stress génère une adrénaline poussant à faire le maximum pour atteindre le terminus. 

Depuis Mayotte, quand on habite en brousse, paradoxalement, à cause de la vie moderne et du parasitisme bloquant des politicards qui, par trop égocentriques, n'ont jamais anticipé les excès du progrès, du modernisme à tout crin, il faut prévoir jusqu'à deux heures dans les embouteillages là où vingt-cinq ans en arrière il fallait une demie heure pour parcourir les trente kilomètres menant à la capitale... Chance, c'est samedi, une heure suffira... 

Mamoudzou et Grande-Terre s'éloignent.

Plus de lumière à l'opposé mais un matin blafard loin de l'idée qu'on se fait des tropiques.


Puis il faut prendre le ferry appelé ici la barge. Il faut barger pour traverser l'isthme entre la Grande et la Petite-Terre. Six heures moins trois minutes et cette dame forte (une big mama dans le langage local) occupée certes mais qui bouche l'accès à la billetterie... pardon que j'ai dit mais la valise ou le sac à dos l'ont poussée un peu. Je n'ai pas été sourd sauf que n'étant pas tombé de la dernière pluie, du tac au tac elle s'est entendue aussi des noms d'oiseaux dans ma langue locale aussi, en occitan. Et la queue au guichet... Chance, l'amphidrome (dernière version de la barge) patiente un peu. Une pauvre femme mendie de l'un à l'autre. Aïe en période de covid ! Les yeux exorbités d'un compatriote lui lancent un “ Dégage ” des plus dissuasifs. Tout le monde reste dans l'expectative. 

De l'autre côté, il faut sauter dans un taxi collectif qui n'a que faire de la limite de vitesse en ville. 2,50€. 

Sans le motif impérieux et le test négatif on ne rentre pas dans l'aérogare vide !

La salle d'embarquement.

Plus de monde et des voyageurs qui arrivent alors que l'heure initiale d'embarquement est dépassée... A ne plus rien comprendre alors qu'il faut prévoir d'être à l'enregistrement au moins deux heures avant le départ prévu...

La compagnie monopolistique de l'océan Indien au prix fort par manque de concurrence. Corsair, venant ou ne venant plus, n'a pas assuré un service acceptable sur dix ans en arrière. Cette année Air France était annoncée pour quatre liaisons directes par semaine avec la métropole sauf qu'ils ont démenti. N'étaient-ce que des désirs pour la réalité ? N'était-ce qu'une rumeur ?


Sésame pour rentrer dans l'aéroport : le test négatif au covid. A l'enregistrement, le test négatif au covid. Au contrôle de police, le test négatif au covid. Personne dans la salle d'embarquement. Ensuite, néanmoins, plus de têtes qui dépassent des sièges. L'annonce de l'appel différé en raison du covid, la bonne excuse... comme si l'épidémie datait d'hier. L'avion aux deux tiers quand même avec 20 bonnes minutes de retard. 


dimanche 14 mai 2017

CHRONIQUE D’UN DÉPLACEMENT PRESQUE ORDINAIRE / Mayotte, La Réunion, Métropole


Bonjour mon fils,
j’espère que tu vas bien et que ta semaine de classe s’est bien terminée. A propos d’école, si ça ne t’embête pas, tu prendras ta rédaction en espagnol sur le marché de "San-Pedro-de-la-Mar" que papi aimerait te l’entendre lire.
 
Sinon, deux jours déjà sont passés et pour ne pas te dire que tu me manques, je vais te raconter ce voyage.
 
Oh, je sais, depuis plus de vingt ans que je fais des allers-retours, moi-même j’ai tendance à penser que ce n’est qu’un trajet de plus. Pourtant, chacun a sa particularité, sa part d’imprévu.
 



D’abord, puisque c’est si compliqué de rejoindre l’aéroport depuis la brousse, il faut bien que je revienne sur mes habitudes. C’est vrai qu’il ne fallait que trente minutes pour rejoindre la capitale avant... et vingt ans avant, on parlait en temps de route et non en kilomètres à parcourir. Aujourd’hui, pour faire ces mêmes trente bornes, il vaut mieux compter quarante cinq minutes et carrément une heure quand on a un avion à prendre. Alors, avant-hier, nos quarante minutes étaient plus que justes, me mettant, qui plus est, à la merci du moindre incident comme une crevaison (vous avez pensé à contrôler la pression des pneus ?). 



Là, cette Renault qui se traînait à trente à l’heure et qu’on a dû se coltiner sur une bonne moitié du parcours. Heureusement que la barge aussi était en retard et que malgré mon chargement, j’ai pensé à ne pas rester en arrière au cas où ils auraient à limiter le nombre de passagers ! 





Pour le taxi encore tout s’est d’autant bien goupillé que je ne me suis pas laissé impressionner par ce poids terrible dans mes mains.
En chemin, nous avons laissé le fils Bamana, l’intellectuel, aux studios de Mayotte Première. Nous nous sommes salués... il n’y aurait la surpopulation due à l’immigration, tout le monde se connaît... je parle des anciens, de ceux qui restent et entretiennent l’idée du microcosme. 

A l’aéroport, nous n’étions qu’une dizaine dans la file mais pour un seul comptoir... 35 minutes de patience donc... j’ai rassuré un monsieur qui craignait de ne pouvoir enregistrer alors que nous n’y étions pour rien. Souriante, la dame demande si j’ai bien le droit d’emporter deux bagages. Accommodant mais non sans confiance je précise que j’ai pris soin de lire, de relire les détails du billet et qu’en cas d’erreur je lui offre mes avocats en trop. Elle les aime, dit-elle en poursuivant l’enregistrement. Avec les cartes d’embarquement et le passeport, elle confirme que je n’ai pas fait erreur, que je n’ai rien à lui céder des 49 kilos d’avocats, de citrons, de courges... Nous sommes bien de la campagne et attachés à la terre. Et moi qui me sentais faiblard pour une quarantaine de kilos ! 


Puis j’ai bien pris soin de sortir l’harmonica qu’ils prennent toujours pour un chargeur de je ne sais quelle arme ! Je range l’ordi, je remets la ceinture, la montre, la banane, les papiers (cette fois pas les chaussures) quand le haut-parleur se met à grasseyer « Les voyageurs ....ova et Dedieu sont priés de s’adresser au personnel de l’aéroport...» La dame du contrôle me renseigne, montrant dans mon dos : « Il vient vous chercher...»
 
Et c’est bien un policier qui me demande de le suivre
« Vous savez ce que vous avez dans vos bagages ? ».
- Oui, je sais...je n’ai rien de spécial... Je pense à  ce que j’ai sur moi, je reste calme, confiant et je ne comprends pas...
A chaque porte bloquée, il présente son badge et nous descendons dans les entrailles de l’aéroport... deux policiers aux frontières, deux gendarmes et ma valise rouge apparaît... c’est donc un contrôle du chargement en soute... 
- Ouvrez, monsieur s’il vous plaît.
Les deux cartons remplis de courges, d’avocats, de citrons apparaissent, les papiers, les slips et les chaussettes pour caler et amortir, le petit emballage avec le démarreur en échange standard aussi.
- Monsieur, peu de personnes savent que les pièces usagées ne peuvent être transportées qu’exemptes de graisse et d’essence... Avec un cutter, le policier défait le carton si soigneusement ajusté pour que le lourd démarreur ne se balade pas comme une cargaison mal arrimée à fond de cale. Finalement il déclare que la pièce est propre...
Nous repassons les portes bloquées alors que tout le monde embarque déjà...