L’apéritif,
la mise en bouche sont autant susceptibles de rassasier avant le
repas que d’impatienter le moment de se mettre à table. À propos du livre
des époux Bézian, on se languit d’un menu ne pouvant que réjouir.
Afin de
consoler un enfant qui pleure, il est aisé de lui dire de regarder
les ailes qui tournent, un rotatif qui hypnotise l’attention des
petits… j’ai connu, avec mon dernier, il aurait passé des heures
devant le tambour de la machine à laver… Et pour les gens, avec
les cloches, cela participait de la paix intérieure.
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Paul_Sibra_Don_Quichotte_et_le_moulin,_1924 (moulin du Cugarel) |
Un projet
de moulin commence par la recherche d’un site favorable au vent, le
plus souvent une hauteur, avec déjà la maison du meunier, en
contrebas, basse, sans étage, ensuite, des alentours dégagés, sans
arbres… ce qui a eu poussé, dans l’anticipation de leur
croissance, à des actions délictueuses telle celle de ce grand-père
qui la nuit était parti soulever les jeunes plants ; les arbres
mouraient sans qu’on en connût la cause ; suite aux échecs
répétés, le propriétaire n’avait plus insisté… En hauteur
certes sauf que par vent fort, la solidité s’en trouvait
sollicitée davantage. De cette exposition va dépendre l’ancrage
plus ou moins profond des fondations affectant l’accessibilité de
la cave. Les murs, de pierre à l’Est et de brique vers Toulouse,
sont également plus lourds et épais à la base ; une butte va en
entourer le soubassement, elle permettra l’orientation de la queue,
facilitera la montée aux ailes et la charrette pourra y venir pour
les grains ou la farine ; quant à la capelada, la toiture, elle se
construit comme pour un clocher sauf que sa couverture n’est pas de
tuiles mais de bardeaux, souvent de châtaignier. Le toit pointu tournant permet la manœuvre par rapport au vent. Un moulin hors d'usage n'en vaut plus la dépense, plus économique, une pente de toit en tuile suffit.
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Mireval_Lauragais_Moulin_de_St_Jean 2016 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Author MIC 43 |
Le vent,
toujours le vent, rien que le souci primordial du vent : la
longue-vue reste à portée afin de voir ce que font les autres
moulins, ce qui évite les mauvaises surprises. Le plus mauvais de
tous est l’Autan aux rafales destructrices capables d’emporter
les ailes, voire de décapiter le moulin ! Certaines périodes, au
contraire, se signalaient par leur calme plat, autour de Noël par
exemple, en été, en septembre, forçant alors, pour ne pas perdre
le client, à passer du molin (à vent), à la molina (à eau), d’où
des trajets, du temps et des sous perdus. De faire tourner un animal
n’était pas durable. Un meunier sans plus de moulin a continué
son activité avec un moteur diesel dans sa remise.
Le temps
qu’il fait n’est pas que lié au vent, sa prévision découle de
l’observation résumée dans les adages et dictons :
* les
trois soleils au coucher ou s'il se couche sous son coussin, la pluie est annoncée, idem si l’Ouest est obscur ; le troupeau de nuages blancs fait prévoir un risque
d’orage ; « l’arc-en-ciel du matin, fait tourner le moulin »…
* les
animaux aussi renseignent, ceux de la ferme qui se dissipent, les
pigeons qui se baignent avisent la rentrée prochaine du marin ; les
pies qui nichent haut rassurent, dans le cas contraire, il faut se
méfier du vent d’Autan « Grand vent ne te manquera pas, la pie a niché bas »; pour certains, les serpents qui
traversent les chemins
* suivant
les personnes, les interprétations de la lune peuvent se contredire.
Dans les
dictons, il pleuvra pour les moissons s’il pleut le jour des
Rameaux et s’il fait du vent, comme pour la Saint-Martin, il
ventera toute l’année.
La
situation perchée des moulins attirait la foudre, on veut s’en
protéger grâce au buis bénit du dimanche des Rameaux et certains
sont pour un gros bouquet plus efficace. Le son aigu de la petite
cloche restait censé dissocier le nuage d’orage…
Vent,
voiles, toiles, en plus des souffles qui par l’arbre moteur font
trembler le bâti, à l’air et à la terre vient s’ajouter la
mer… Impossible l’élément liquide ? Et pourtant, à l’égal
d’un marin, le meunier doit prendre des quarts, veiller à l'aide de la longue-vue, monter sur les
ailes pour hisser ou réduire les voiles, gouverner, gérer la marche de sa machine, la préserver
en cas de tempête.