mardi 6 novembre 2018

EN PASSANT PAR RÉVEILLOU / Fleury-d'Aude en Languedoc

La route quitte la Combe Levrière. Après la trajectoire rectifiée de l'ancien tracé appelé les Esses, elle gagne le plat de Réveillou. 



Réveillou : non loin de la mer, plutôt que l'installation un peu bohème des cabanons et des caravanes en plein clapas avec quand même une paire de maisons en dur, entre les deux vignes à gauche, une ruine. Une ruine si modeste qu'en la voyant de la route, une célèbre petite chèvre aurait pu s'exclamer dans son patois : " Que c'est petit ! [...] comment ai-je pu tenir là-dedans ?". 

Alors que les domaines viticoles, les campagnes comme on dit, restent habités, seuls les éboulements et décombres, quand des vacanciers ne les ont pas acquis et restaurés, témoignent de l'occupation, encore un siècle en arrière, des anciennes métairies ou bergeries. Rien qu'aux abords de la route de Saint-Pierre, La Broute, Les Légers, Les Courtals, Crémat ou Naout, les Bugadelles,Tuffarel, Réveillou, étaient occupés. Sur le canton voisin, la Caune, la Pierre où habitait la famille d'un petit Jean, mon futur grand-père. Je le vois, passant tous les jours d'école, la barre des Karantes, la garrigue du Cascadel, un col de la Crouzette à 49 mètres d'altitude s'il vous plaît ! pour rejoindre la communale la plus proche, celle de Fleury... 16 kilomètres aller retour. 



A Réveillou, c'est notre bon oncle Noé, jamais à court d'un mot d'esprit, d'une boutade ou d'une blague, qui se rappelle à notre souvenir : 

"... Vesetz, vous voyez Réveillou, la ruine, mon ancêtre Andrieu y était installé à une époque où même les plus pauvres étaient accablés d'impôts (1), gabelle, cens et la dime, ce dixième de tout ce qui rentrait à la maison, qu'il fallait verser à l’Église... le curé devait faire le percepteur aussi... Et béh, mon ancêtre Andrieu, dix enfants dans cette ferme, une pièce unique, a eu l'idée de le porter son dizième pitchou, au ritou ! Il devait être gêné le curé ; c'était sûrement risqué de rouspéter atal, de se faire remarquer de la sorte. Heureusement, la Révolution était dans l'air du temps..."  

(1) Je crois qu'il aurait fait le rapprochement, aujourd'hui, avec les taxes à tour de bras que nous impose le sieur Macron... une de ses expressions typiques émaillerait nos échanges " Mè, de qué fa lou gouvernomént ?!" (Mais que fait le gouvernement ?!).  


  

lundi 5 novembre 2018

BALADE PERIGNANAISE / Fleury-d'Aude en Languedoc.

Le village de Fleury-d'Aude s'est longtemps appelé "Pérignan". Il en reste que les habitants préfèrent se dire Pérignanais que Fleurystes, serait-ce dit avec des fleurs... Et c'est si différent de "Perpignanais" pourtant à une lettre près seulement...

Au sixième rang dans le département, le territoire communal se diversifie entre les garrigues de la Clape, les coteaux, la plaine et le fleuve Aude, les marais d'eau douce, l'étang lagunaire de Pissevaches et plus de six kilomètres de sable pour les plages. 



Au départ du village prudemment installé en hauteur hors de portée des crues furieuses, comme Salles à côté, en direction de Saint-Pierre-la-Mer, on longe d'abord l’Étang, une cuvette asséchée et drainée vers l'Aude par un souterrain. Tout au bout, la route serpente un peu pour monter dans la Clape. 

 Des vignes et quelques rares amandiers le long d'un accès en terre, hier...

       ... et à présent... 

Plus loin, les pins ont effacé le travail de l'homme, comment deviner qu'à la place des arbres, des cistes et des champignons favorisés par les pluies d'automne, la vigne héritée par le copain de papa n'existe plus. Dans la barre rocheuse qui limite ce ravin de Combe Levrière, le travail antédiluvien des eaux courantes a creusé des marmites dans le calcaire, les anciens dont l'oncle Noé parlaient seulement des trous de renards. En quelques décennies, dans un mouvement de balancier, là où les bergers ratiboisaient, les résineux prennent une revanche : ils étouffent la murette censée préserver la terre des aigats subits. 

Même en hauteur, c'est très difficile de rendre des trous de renards à un regard d'enfant.